Amour en retard

19 - Mission 100 - L'orphelinat

Deux ans étaient passés. Mai et Naru étaient plus proches que jamais. Ils se comprenaient en un regard. Le jeune homme était plus doux, plus souriant. Eugène et Masako vivaient dans le même immeuble, au rez-de-chaussée. Cet appartement s'était libéré une semaine avant leur mariage et Eugène avait sauté sur l'occasion. En même temps, le quartier était super, tranquille et sécurisé, et l'immeuble moderne et gardé, à deux pas de l'agence. L'appartement était un peu plus grand que celui de son frère, avec une salle de bain et deux chambres en plus, ainsi qu'une petite terrasse avec un coin jardin et un accès direct au parc. L'appartement idéal pour fonder une famille. Ce qu'il n'avait pas manqué de faire.

Comme le voulait les traditions, le mariage fut consommé la nuit de noce. Le mois d'après, Masako annonçait sa grossesse.

Naru ne l'avait pas dit, mais il était très heureux pour son frère. Ils avaient eu une magnifique petite fille appelée Tami et le deuxième enfant étaient en route. Elle voulait tout faire à l'ancienne, aucune protection, allaitement le plus longtemps possible, pas de nombre défini d'enfant... Naru ne comprenait pas l'intérêt, mais Eugène était content, il voulait une grande famille et c'est surement ce qu'il aurait.

- Mai ! On doit y aller ! cria-t-il en observant l'heure.

La jeune femme se hâta de finir sa valise. Ils avaient une nouvelle mission. Et même s'il s'était adouci, Naru restait Naru.

Elle boucla le bagage et le prit pour aller le rejoindre. Naru récupéra la valise de sa compagne et ils partirent. Mai était souriante. Elle était contente de partir en mission ! Avec ses examens, elle n'y était pas allée depuis plus d'un mois.

- Où allons-nous ? demanda-t-elle, curieuse.

- Un vieil orphelinat.

- Ton frère et Masako viennent avec la petite ?

- Non, Masako ne se sent pas bien en ce moment, elle reste avec Tami ici, soupira-t-il.

Mai sourit, c'était mieux comme ça, surtout s'ils allaient dans un vieil orphelinat, ça pouvait être dangereux pour la petite.

Lin les attendait en bas de l'immeuble avec Eugène qui saluait sa petite famille.

Mai se hâta d'aller les saluer.

- Bonjour princesse ! Trois jours que tata ne t'a pas vu ! Tu m'as manqué !

Elle eut le droit à un immense sourire et un long monologue incompréhensible.

- Ce bébé, rit Eugène. C'est une comique. Je vais t'interdire de la voir où elle va finir comme toi, une vraie casse-cou.

- Je ne le permettrai jamais, dit calmement Masako. Ma fille ne sera pas comme Mai, mais le reflet de sa mère.

- Ouille, ma pauvre, tu pourras venir chez quand tu veux, je te protégerai ! s'amusa Mai en caressant sa joue.

Eugène pouffa, puis chacun monta dans un véhicule.

Dans la voiture, Naru posa doucement sa main sur le ventre de sa compagne. Ça se voyait à peine, lui le voyait car il la connaissait, mais pour le moment, personne ne l'avait remarqué et ils préféraient le garder pour eux.

Lin leur jeta un coup d'œil, un peu surpris du geste de son protégé. Il devinait leur regard, mais s'ils n'avaient rien dit, c'est qu'ils avaient leurs raisons.

Mai s'endormit sur le trajet. Ce n'était pas très loin, mais son corps s'habituait encore à son état et elle était très fatiguée.

Ils arrivèrent à peine une demi-heure plus tard.

Mai ouvrit difficilement ses yeux en ayant un haut-le-cœur. Elle observa le bâtiment face à elle, elle devint soudainement très pâle.

- Mai ? s'inquiéta son compagnon en la voyant immobile.

- Qu'est-ce que... Qu'est-ce qu'on fait ici ? chuchota-t-elle en tremblant, attirant la curiosité des deux hommes.

- C'est ici qu'est notre prochaine affaire, lui répondit Oliver.

- Pourquoi ici... Tu aurais dû me dire où nous allions... lui reprocha-t-elle, les larmes aux yeux.

- Tu connais cet endroit ?

Elle allait répondre, mais le moine, impatient et ne les voyant pas sortir de la voiture, frappa à la vitre de la jeune femme qui sursauta violemment. Surpris, il ouvrit la portière.

- Ça va ? Je ne voulais pas te faire peur, s'excusa-t-il. Tu ressens déjà quelque chose ?

- Pourquoi ne nous as-tu pas dit le nom de l'orphelinat, Naru ? le fusilla-t-elle.

- Je n'en voyais pas l'intérêt.

- Tu n'as jamais lu mes rapports sur ta chérie, à ce que je vois.

- Des rapports ? demanda Mai, surprise et blessée.

- Quand je t'ai engagé, il y a quelques années, et que tu as commencé à avoir certaines capacités, j'ai demandé un rapport à Madoka. Mais je l'ai lu rapidement, rien de bien intéressant.

- Rien de bien intéressant ? répéta la jeune femme, blessée.

Il soupira, comprenant qu'elle le prenait mal. Il s'avança vers elle mais elle recula d'un pas, le regard noir.

- Si ce rapport n'était pas si intéressant, ça ne sert à rien que tu le saches. Madoka, je t'interdis de lui révéler quoi que ce soit. Après tout, aucune obligation, je suis une intervenante extérieure, pas son employée.

- Mai, grogna Naru en essayant de lui attraper le bras.

Elle se dégagea et alla ouvrir le coffre. Elle était furieuse. Mai était gentille, chaleureuse, mais elle restait très secrète. Ils n'avaient su que quelques mois plus tard qu'elle était orpheline. Elle ne demandait pas d'aide et travaillait dur pour vivre.

La jeune médium prit sa valise et le sac où contenait son matériel pour le thé et avança vers l'immense bâtisse carrée. Un long frisson l'a pris. Ils étaient là. Allaient-ils se montrer, ou l'ignoreraient-ils pour se venger ? Etaient-ils devenus sombre ? Sans but ? Avait-il fait du mal à d'autres enfants ?

- Mai, la rattrapa tout de même Eugène en portant sa fille. Que se passe-t-il ? Pourquoi es-tu en colère.

- Je n'ai pas envie d'en parler Eugène.

Son ton était sec. Les membres de la SPR décidèrent d'un commun accord de la laisser se calmer avant d'essayer d'engager la conversation. Ils savaient qu'elle avait fait plusieurs orphelinats et foyer avant d'atterrir chez une de ses professeures. Ils étaient sûrs que celui-là devait être une des étapes, mais laquelle ?

Au fur et à mesure des années, ils avaient réussi à apprendre quelques détails, ça ne se passait pas très bien, Mai était une enfant solitaire et turbulente...