L'Humanité Disparue ; l'humanité retrouvée

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Rose, absorbée dans sa fouille, ne savait plus combien de temps elle grattait cette pierre. C'était devenu une manière d'oublier, d'échapper à la réalité brutale de leur situation. Petit à petit, elle dévoilait une forme intrigante, des motifs gravés qui prenaient vie sous ses doigts sales. Elle n'en avait dégagé qu'une infime partie, mais elle distinguait déjà des courbes sinueuses, des écailles finement sculptées. La tête d'un serpent d'or – un naga, sans doute – semblait émerger de la terre, et pour la première fois, elle ressentait un semblant de paix en découvrant cette relique enfouie, perdue depuis des siècles.

Elle sursauta en sentant une main ferme se poser sur son épaule. Prête à réagir, elle releva les yeux et découvrit l'homme qui la fixait, mais sans la menace habituelle. Dans sa main, il tenait deux pics sur lesquels étaient empalées de grosses araignées noires.

— Merci pour ce que vous avez fait, dit-il, sa voix basse et rauque.

Elle se raidit, les yeux toujours rivés sur lui.

— Je ne l'ai pas fait pour vous. Je l'ai fait pour moi, répliqua-t-elle, amère.

Il hocha légèrement la tête, puis, sans commentaire, lui tendit l'un des pics.

— Venez, j'ai trouvé ça à manger.

Elle hésita, dégoûtée à la vue des araignées, mais se rappela les quelques fois où elle en avait goûté dans les rues du Cambodge. Ce n'était pas par choix.

— J'en ai déjà mangé au Cambodge... et je n'aime pas ça, murmura-t-elle, la voix plus défensive qu'elle ne l'aurait voulu.

— C'est tout ce que nous avons, pour l'instant, répondit-il simplement. Je vais préparer un feu.

Elle le regarda s'éloigner et s'atteler à allumer un feu avec une facilité déconcertante. Ses gestes, sûrs et rapides, trahissaient un entraînement précis, presque automatique, comme s'il avait déjà répété ces mouvements dans d'autres jungles et d'autres combats. En observant ses bandages, elle ressentit un étrange mélange de dégoût et d'amertume. La douleur encore vive dans son corps, le souvenir du goût métallique et amer qui persistait sur sa langue, tout cela venait se superposer à ce moment surréaliste, tandis qu'il préparait leur maigre repas de survie.

Les flammes s'élevèrent enfin, et il lui tendit l'une des piques, l'araignée rôtie exhalant une odeur âcre. Elle accepta sans rien dire, fixant l'insecte grillé avec dégoût, avant de l'interroger, le regard rivé sur le feu qui crépitait entre eux.

— Quand les secours viendront, vous serez arrêté. Vous le savez ?

Il ne répondit pas immédiatement, ses yeux sombres rivés dans les siens, comme s'il sondait sa question jusqu'au fond. Puis, d'un ton détaché, presque glacé, il répondit :

— Vous n'avez pas compris. Il n'y aura pas de secours. Nulle part. L'humanité est en train de s'éteindre.

Le silence qui s'ensuivit fut lourd, pesant, brisé seulement par le crépitement du feu. Elle laissa ses mots résonner en elle, tentant de mesurer ce qu'ils signifiaient réellement.

Love takes time [DARK ROMANCE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant