Le bruit métallique des bottes de Kael résonnait derrière moi alors que nous descendions les marches menant aux cachots. J'avais ordonné qu'il m'accompagne, non pas par choix, mais parce que sa manière non conventionnelle d'aborder les problèmes pourrait se révéler utile. Pourtant, sa simple présence m'irritait."Vous marchez vite, ma reine. Vous fuyez quelque chose, ou vous essayez de me semer ?" lança Kael, sa voix dégoulinant de sarcasme.
Je m'arrêtai net, me retournant pour le fusiller du regard. "Peut-être que je me demande encore pourquoi je tolère votre insolence, Kael."
Il haussa un sourcil, son sourire insupportable toujours plaqué sur son visage. "Parce que, malgré tout ce que vous voudriez croire, je suis votre meilleur atout. Ou bien peut-être que, sous votre façade glaciale, vous appréciez mes charmantes interventions."
Je repris ma marche sans répondre, refusant de me laisser entraîner dans ses provocations. "Vous êtes ici pour m'aider à obtenir des informations. Pas pour vous livrer à vos joutes verbales."
Les cachots étaient sombres et oppressants, l'air chargé d'humidité et d'une odeur rance qui s'insinuait jusque dans ma gorge. Les torches projetaient des ombres tremblantes sur les murs, renforçant l'atmosphère lugubre. Devant nous, deux gardes ouvrirent la porte rouillée d'une cellule. À l'intérieur, trois hommes se tenaient assis, les poignets liés. L'un d'eux releva la tête, ses yeux brillants d'une défiance mal dissimulée.
"Voilà donc la reine tant redoutée," murmura l'homme, un sourire en coin sur ses lèvres fendues. "Vous avez l'air moins intimidante que ce qu'on raconte."
"Et vous êtes exactement ce à quoi je pensais : un idiot qui ne sait pas fermer sa bouche."
L'homme fronça les sourcils, mais je levai une main pour imposer le silence. "Votre audace ne vous servira à rien ici," dis-je, glaciale. "Parlez, et peut-être que vous sortirez d'ici en vie. Sinon, je vous laisse à Kael. Il adore les cas difficiles."
Kael s'avança, croisant les bras, et l'ombre des torches rendit son expression encore plus menaçante. "Elle ne ment pas. Je prends ça comme un défi personnel."
Un des prisonniers détourna les yeux, mais celui qui avait parlé maintint son regard fixé sur moi. "Je n'ai rien à dire. Vos hommes nous ont interceptés à tort. Nous ne sommes que des marchands."
"Des marchands qui transportent des documents codés ?" demandai-je, sèchement. "Votre mensonge est insultant. Vous servez mieux votre cause en avouant."
Kael se pencha vers lui, son ton devenant presque amical, ce qui rendit ses mots d'autant plus glaçants. "Laissez-moi deviner. Vous espérez que si vous gagnez du temps, vos petits amis viendront vous sauver. Mauvais pari. Le temps est de notre côté."
Je m'écartai légèrement, laissant Kael prendre les devants. Bien que ses méthodes fussent brutales et irritantes, elles étaient indéniablement efficaces. Tout en l'observant jouer avec les nerfs des prisonniers, je ne pouvais m'empêcher de me demander si cet homme était une arme que je pouvais vraiment manier ou si, tôt ou tard, il finirait par se retourner contre moi.
Finalement, l'un des prisonniers craqua sous la pression, balbutiant des fragments d'informations. Nos soupçons furent confirmés : une opération rebelle se tramait à l'intérieur même des murs du château. Kael jubilait à son succès, mais je me contentai de fixer les hommes, mes pensées déjà tournées vers les implications de cette révélation.
"Gardes, emmenez-les. Doublez la surveillance des cachots," ordonnai-je.
...
Alors que nous quittions les cachots, Kael, fidèle à lui-même, ne put s'empêcher de parler.
"Encore une preuve que, malgré vos doutes, je suis indispensable," lança-t-il avec un sourire suffisant.
Je ralentis légèrement, le regardant du coin de l'œil. "Vous êtes insupportable. C'est tout ce que je retiens."
Kael rit doucement. "Et vous, vous êtes tellement rigide qu'un brin de vent pourrait vous briser. Mais au fond, nous faisons une bonne équipe, non ?"
Je ne répondis pas. Ce jeu d'aiguilles m'épuisait. Kael n'était rien de plus qu'un outil, et un outil restait utile jusqu'à ce qu'il ne le soit plus. Ma seule préoccupation était de maintenir l'équilibre fragile de mon royaume.
Mais alors que nous progressions dans les couloirs, un hurlement déchira l'air.
Kael dégaina immédiatement son épée, son instinct de combattant prenant le dessus. "Restez ici," ordonna-t-il.
"Pas question," répliquai-je, saisissant une dague sur une étagère proche.
Nous sortîmes ensemble dans le couloir, où deux gardes gisaient au sol, immobiles. L'un d'eux avait les yeux grands ouverts, figés dans une expression de surprise qui me glaça.
"Restez derrière moi," murmura Kael, son ton inhabituellement grave.
Une silhouette jaillit des ombres, rapide comme un serpent. Une lame scintilla brièvement sous la lumière vacillante des torches. Kael bougea avant même que je puisse réagir, parant l'attaque d'un mouvement fluide.
Le combat qui s'ensuivit était une danse mortelle. L'assaillant était un professionnel, ses coups précis et calculés. Mais Kael, avec une agilité presque féline, esquiva chaque assaut, ripostant avec une férocité maîtrisée.
Je restais en arrière, figée. Une partie de moi savait que je devais agir, que je ne pouvais pas me contenter de regarder. Mais mes jambes refusaient de bouger, et la dague dans ma main me semblait soudain inutile.
Kael désarma finalement l'assaillant d'un mouvement brusque, envoyant sa lame valser sur le sol. Mais l'homme, implacable, sortit une dague de sa ceinture. Cette fois, Kael fut plus rapide. Il planta son épée dans le flanc de l'homme, qui s'effondra dans un râle.
Kael arracha le masque de l'homme, révélant un visage familier. Mon souffle se bloqua.
"Non..." murmurai-je. C'était l'un des serviteurs du château. Un homme que je croisais tous les jours, que j'avais vu sourire et jurer fidélité à ma couronne.
Kael, impassible, nettoya sa lame. "Vous voyez ? Vos ennemis sont dans vos murs. Ce château est un nid de vipères."
Plus tard, dans la salle d'étude, je feuilletais les documents codés avec des gestes mécaniques, mon esprit encore hanté par l'image du serviteur. Kael, adossé nonchalamment à une chaise, semblait parfaitement à l'aise.
"Alors ? Vous êtes prête à écouter ma proposition ?" demanda-t-il, son ton moqueur adouci par une touche de sérieux.
"Je déteste cette idée," répondis-je, sans lever les yeux.
"Vous n'avez pas à l'aimer. Vous devez juste l'accepter. Ces mercenaires peuvent entraîner vos hommes et débusquer les traîtres. Ce soir n'était qu'un avertissement. Si vous n'agissez pas, la prochaine fois, ce sera votre tête."
Je serrai les bords du parchemin entre mes doigts, les mots de Kael résonnant avec une vérité inconfortable. Le poids de ma décision pesait déjà lourd, mais je savais qu'il avait raison.
"Faites ce qu'il faut," murmurai-je finalement.
Kael hocha la tête, un sourire satisfait sur les lèvres. "Vous prenez la bonne décision."
Alors qu'il quittait la pièce, je restai seule dans le silence oppressant, fixant l'horizon sombre par la fenêtre. Mon royaume semblait paisible, mais je savais que c'était une illusion. Une tempête approchait, et je devais être prête à l'affronter.
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La Reine et le Mercenaire : le Prix du Trône
Любовные романыDans le royaume d'Elandor, où les vents glacés des montagnes du nord soufflent sur des terres en guerre, la jeune Reine Elara lutte pour maintenir son autorité face à des menaces aussi nombreuses qu'implacables. Lorsqu'un mercenaire impétueux et cyn...