CHAPITRE 1

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L'air est lourd ce soir, presque irrespirable. Le genre de chaleur qui colle à la peau et te fait regretter d'exister. Mais ce n'est pas ça qui me dérange. Non, ce qui me dérange, c'est ce foutu silence.

Un silence épais, oppressant, qui remplace le bruit habituel des voitures et des sirènes. Ce silence-là n'annonce jamais rien de bon.

J'ai toujours su que ma vie était un foutoir, mais ce soir, je le ressens dans mes tripes. Chaque putain de décision que j'ai prise m'a amenée ici, devant cette porte délabrée, dans cette ruelle sombre où l'odeur d'urine se mélange à celle du métal rouillé.

Je sais que je ne devrais pas être là. Que je devrais faire demi-tour, oublier tout ça et continuer ma vie. Mais ce n'est pas une option. Pas quand tu dois de l'argent à des gens comme eux.

Je prends une profonde inspiration et frappe trois fois.

— Qui c'est ? grogne une voix rauque de l'autre côté.

— C'est moi, je réponds, la gorge sèche.

La porte s'ouvre lentement, dévoilant une silhouette massive. Il est là, Bruno, avec sa gueule de bulldog et ses bras qui pourraient écraser une vie en un claquement de doigts.

— T'es en retard, dit-il, ses yeux bruns me scrutant comme si j'étais un morceau de viande avariée.

— J'ai eu des problèmes.

— T'as toujours des problèmes.

Il s'écarte, me laissant entrer dans une pièce étroite éclairée par une seule ampoule vacillante. L'odeur de tabac froid et d'alcool bon marché est suffocante, mais je fais comme si ça ne me dérangeait pas.

Ils sont là, assis autour d'une table bancale : Matteo, avec son costume impeccable et son regard glacial, et quelques-uns de ses hommes. C'est lui que je crains le plus. Il est calme, trop calme, et c'est précisément ce qui le rend dangereux.

— Tu es enfin là, dit-il sans lever les yeux de la liasse de billets qu'il compte méticuleusement.

— J'ai l'argent.

Je sors une enveloppe de ma poche et la pose sur la table. Matteo s'arrête, lève la tête, et me fixe. Son regard me transperce, glacé et sans âme.

— C'est tout ?

Mon estomac se noue.

— C'est tout ce que j'ai pour l'instant, dis-je, ma voix tremblante malgré moi.

Il rit doucement, un rire qui me donne envie de vomir.

— Tu crois que je vais accepter ça ?

Je serre les poings.

— Je vais te donner le reste, j'ai juste besoin d'un peu plus de temps.

Il se lève lentement, et même si je fais tout pour ne pas bouger, je sens mes jambes fléchir légèrement. Matteo n'est pas grand, mais il a une présence écrasante, un magnétisme qui te pousse à obéir même quand tu sais que ça va te coûter cher.

— Le temps, murmure-t-il, n'est pas une ressource que je distribue gratuitement.

Il s'approche, s'arrêtant à quelques centimètres de moi.

— Tu m'as déjà fait perdre de l'argent, et maintenant, tu me fais perdre mon temps. Dis-moi, qu'est-ce que je devrais faire pour te faire comprendre que je n'aime pas être pris pour un con ?

Je ne réponds pas. Parce que je sais que quoi que je dise, il trouvera un moyen de me briser.

Matteo se tourne vers Bruno.

CARRERA  | TOME1 Sentiment éperdu Où les histoires vivent. Découvrez maintenant