40-Flagellation

89 10 14
                                        

Playlist :

LET THE WORLD BURN - Chris Grey

Lorelye

La salle du conseil était vaste et solennelle, sculptée dans la pierre ancienne de Naos. Des tentures lourdes tombaient des murs, obscurcissant la lumière venue des hautes fenêtres. L'air y était épais, saturé du parfum des bougies et du poids des regards qui pesaient sur Lorelye.

La princesse se tenait droite, drapée dans une robe encombrante qu'elle exécrait. Son corsage était trop serré, et chaque mouvement lui rappelait l'entrave de cette mode qu'elle ne supportait pas. Elle aurait tout donné pour pouvoir se présenter en pantalon, ou du moins dans une robe qui lui laissait un semblant de liberté. Mais ce n'était pas une journée de liberté. C'était un jour de jugement.

Elle s'agenouilla devant le conseil, les plis de sa robe se déployant autour d'elle comme les mailles d'un filet qui l'emprisonnait. Les juges, tous des hommes, la surplombaient de leur austère autorité. En face d'elle, le roi de Naos la fixait avec un regard glacial, sans une once de compassion.

la voix du plus ancien des juges retentit, grave et sans appel :

— Lorelye de Naos, vous êtes appelée ici pour répondre de vos crimes. Avez-vous libéré Lilianna Rivaldo ? Cette sorcière a été vue au royaume de Sirius par le prince héritier lui-même, et nous connaissons tous ici vos liens étroits avec cette sorcière, cracha-t-il du bout des lèvres.

L'accusation frappa Lorelye comme un coup de fouet. Ainsi donc, c'était cela. Les preuves contre elle venaient de Kairik Sirius, son futur mari. La trahison avait le goût amer du fer rouillé. Il l'avait livrée, comme on livre une ennemie, comme si elle était une étrangère, indigne de confiance.

Mais Lorelye ne céda pas. Elle releva lentement le menton et, d'une voix claire, répondit :

— Ce n'est pas moi qui ai fait cela.

Les juges s'entre-regardèrent, leurs bouches fines se tordant en expressions sceptiques. Ils s'avancèrent, encerclant presque Lorelye, la forçant à soutenir leurs regards perçants. L'un d'eux reprit :

— Vous avez disparu pendant plusieurs mois. Où étiez-vous ?

Lorelye réprima un frisson. Elle ne pouvait pas révéler la vérité. Elle ne pouvait pas leur donner ce qu'ils cherchaient : du pouvoir. Si jamais ils apprenaient la vérité sur sa mère ou que le royaume de Nevaneria existait encore, elle ne savait pas ce qu'ils pourraient leur faire.

— Je ne peux pas vous répondre.

Un murmure courut dans l'assemblée. Un autre juge, plus jeune mais non moins cruel, s'appuya sur la balustrade en bois sculpté qui le séparait de Lorelye.

— La violence pèse en vous. Vous n'avez jamais caché votre dédain pour les traditions, ni votre colère contre ceux qui vous imposaient leur loi. Comment pourrions-nous croire en votre innocence ? Vu qu'elle ne semble pas être coopérative, faisons-la entrer.

Une brève étincelle d'indignation traversa le regard de la princesse. Ils ne la jugeraient jamais pour ce qu'elle était réellement, seulement pour l'image qu'ils avaient d'elle. Un monstre de rage, une femme indigne de gouverner tant qu'elle n'aurait pas épié ses crimes. Des crimes qu'elle n'avait pas commis.

Les portes de la salle du conseil s'ouvrirent à la volée et un silence oppressant s'abattit sur l'assemblée. Les juges, le roi et Lorelye elle-même tournèrent leur attention vers les nouveaux arrivants. Les gardes s'écartèrent pour laisser passer un homme aux cheveux noirs striés de fils d'argent, enchaîné, son regard dur fixé sur la princesse agenouillée.

Âmes Étoilées Tome II [TERMINÉ]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant