La simplicité n'est pas morte

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Et le temps s'arrête. Comme si tout était figé.

Ses yeux ne clignent plus; aucun souffle ne sort de ma bouche. Une larme reste figée au centre de ma joue. Pas un battement de cœur, pas un décibel. Ses cheveux semblent toujours ébouriffés par un vent marin qui n'existe plus. Plus de vent, plus de rotation terrestre, pas même une imperceptible trace de vie. Plus de mouvement.

L'immobilité intersidérale.

Et pourtant.

Un fourmillement serait une comparaison grotesque. Une sensation étrange, beaucoup trop vague. Un sentiment confus, beaucoup trop minimisé. Une explosion pourrait, à la rigueur, se rapprocher de ce qu'il se passait actuellement dans mon cerveau, et le terme d'apocalypse cognitive -qui venait de surgir dans mon esprit- me paraissait alors tout trouvé pour l'occasion.

Trois mots, sept lettres qu'il répète et la vie repart le temps d'un halètement seulement.

Quel meilleur moyen pour recoller des rêves brisés ? Pour promettre que tout ira mieux ? De l'espoir, de la confiance, de la force, qui me semblent si loin et dérisoires.

Ces mots il les répète une fois encore, à m'en donner des vertiges. La peur, la peur de l'inconnu, de l'incertitude, du renouveau, et cette effrayante impression que sortir enfin de la spirale infernale sera plus dur que d'y avoir vécu, tout me submerge et me yeux papillonnent d'affolement.

Je les entends une nouvelle fois, plus rassurants et plus doux. Quelle étrange phrase qui me chuchote qu'il n'y a plus rien à craindre. Et j'ai envie de la croire. De tout laisser aller, de ne plus me soucier de rien. D'être enfin libre et légère, comme je l'ai toujours mérité dit-elle. En paix, je rajoute.
"Je vous aime."

Ces mots, brûlants et ultimes cette fois, me sortent enfin une idée censée de la torpeur dans laquelle ils m'ont plongée plus tôt. Une idée, une pensée au premier regard anodine et pourtant si évidente, qui monte en moi comme un cri. Un cri de désillusion, de réalité à l'état brut, de révolte, de justice, un cri implacable et qui veut sortir, et se révéler au monde entier, et hurler "J'ai compris maintenant ! Vous ne m'aurez plus !" d'un air victorieux empreint de l'ironie constante de la vie, et pourtant !

Et pourtant.

C'est avec un grand calme que je plante mes yeux dans les siens, et que mon regard scande à l'unisson mes paroles, tandis que je me révulse :

-Mais pas moi !


*Numéro 6 : à partir de là ce ne sont plus des rédactions, à part quelques exceptions qui seront précisées !*


Pourquoi j'aurai dû naître animaleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant