Décembre et les douze flocons de culpabilité

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Bonne Lecture !

Décembre et les douze flocons de culpabilité

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PLayList : U2 – With or Without you ; Aaron – Last Highway ; System of Down - Roulette

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Louis ne dort jamais. Il regarde Monsieur Styles allongé sous la couverture. Il attend dans le noir que son calvaire cesse enfin ; que son horrible cadeau lui parvienne. Le photographe faisait semblant d'être dans les bras de Morphée - plutôt que dans ceux de son prostitué - afin de prolonger ce rendez-vous non-amoureux. Et quand il eut enfin les yeux ouverts, il voyait le regard chargé de détresse de son pantin. Celui qui exécutait sa volonté quand il glissait quelques pièces d'argent dans la fente prévue à cet effet. Le manège tournait encore et encore, emportant ses passagers dans un tourbillon de douleur. Alors Harry jouait avec Louis, tirant les fils. Mais Louis ne s'amusait pas. Il subissait cette mauvaise plaisanterie. Quelques billets le forçaient à simuler alors qu'on violait son être dans son intimité...

" - Tu me fais la gueule ? Demanda un jour le photographe en lui tendant l'enveloppe contenant ses gages. J'aimerais te voir sourire un jour ; pour de vrai.

- Vous préférez la nuit et moi aussi. Mais vous me payez plus... alors j'imagine que c'est pour sourire. "

Louis tourna son visage vers le bouclé et eut un sourire forcé qui s'évanouit aussitôt, sûrement échappé quelque part au-delà de la prison de ses traits. Auparavant, il n'avait jamais eu de remords à user des services d'un prostitué. A vrai dire, il se foutait royalement de leur existence en dehors de ses draps. Il les avait payé une fortune. Les draps ou les hommes ? Les deux. Luxure. Le photographe se laissa retomber sur le matelas de son atelier. Il avait l'impression d'avoir soulevé une tonne en tendant cette enveloppe. La culpabilité. Harry comptait ces quelques semaines sur le bout des doigts. Ceux qui avaient si souvent effleuré le corps de Louis... Plus de jours encore l'avaient écarté de son automnale tentative de suicide. Désormais il se noyait dans la chevelure du châtain ; se plongeait dans cet océan de plaisir ; se délectait de l'écume de l'extase bien qu'elle appartienne à Mars plutôt qu'à Vénus. Et Louis se battait contre ce démon intérieur qui avait pour logis son fort intérieur.

Harry l'observa mettre l'enveloppe dans la poche intérieure de sa veste. Machinalement, son pantin n'avait pas vérifié si le compte y était. Il n'avait même plus peur de se faire avoir car Harry l'avait déjà eu ; pleinement. Du bout des doigts le photographe alla caresser le dos de son amant pré-fabriqué qui ne put réprimer un frisson comme si un glaçon avait parcouru son échine. Harry retira sa main, la réalité lui brûla la paume : il dégoûtait Louis. Il avait beau sourire, tout ceci était faux. Faux comme un Noël aux déclinaisons commerciales.

" - L'enveloppe semble plus épaisse. Fit remarquer le prostitué en remettant son pull gris mettant ses yeux en valeur. Est-ce juste une impression ? "

Le photographe détailla son cou ainsi que son dos offert puis passa une main dans ses cheveux en bataille. Comment expliquer cette subite générosité ? Après de longues minutes, Louis se retourna et l'observa du coin de l'œil.

" - Je prends ça pour de la pitié.

- J'aime la pitié. Vous devriez faire de même. "

Il se tut.

" - Si vous aimez la pitié, jamais vous n'aurez... Vous m'avez pris ce qui m'est de plus précieux en tant qu'homme : ma fierté.

" - Précieuse mais marchandable. Rétorqua l'autre. "

Sensitive Polaroïd | l.s |Où les histoires vivent. Découvrez maintenant