Chéri on a gagné au loto !

Chapitre 4

Maria, notre nouvelle femme de ménage (très gentille), vient deux fois par semaine dans chaque appartement. Martin lui a fait signer un contrat de secret professionnel pour notre appartement voisin. J'ai su très vite que cette Maria est une femme bien. Un jour, au début qu'elle venait chez nous faire le ménage, elle m'a amené une liasse de billets, pour environ 400 € en billets de 20. C'est des économies que j'ai fait pour m'acheter des chaussures (avant d'être riche). Quand on a gagné au loto, j'ai oublié que j'avais caché ces sous dans une botte de neige d'Ange et Maria a mit la main dessus en rangeant.

Au bout de quelques temps, lassés des hôtels et aussi pour placer de l'argent dans la pierre, comme dit Martin, on a acheté une maison à Miami, un loft à Manhattan et un yatch dans le sud de la France. Bien sûr, j'y ai vu une nouvelle chance de ranger mes chaussures. Mes bottes de pluie Burberry ont atterri à Manhattan, mes sandalettes dans le yatch et quelques autres paires d'été à Miami.

Ca me fait vraiment plaisir d'avoir un appart à Manhattan, on a décidé de garder notre appartement en France, car on l'aime beaucoup et on ne veut pas changer de vie radicalement, pour le bien de tous, mais un appart à New York, c'est vraiment top. C'est un bel appartement avec trois chambres, lumineux et moderne, avec quand même du beau parquet en chêne clair et surtout, une vue sur la rivière Hudson. Je m'y sens terriblement bien, mieux qu'à Miami où j'ai juste l'impression d'être en vacances chez mes moustiques. A Manhattan, je me sens dans mon élément. Pour sortir les jours de pluie, j'ai investi dans des escarpins Louboutin (Loubs comme disent les américaines), ceux transparents en pvc avec un bout pointu noir. Pour aller avec, j'ai acheté un imperméable en pvc transparent et noir Wanda Nylon. Cet ensemble reste à New York et je me fais une joie de le retrouver à chaque fois.

Ma famille ne sait toujours rien de notre situation financière, malgré les propositions d'Anatole de leur montrer l'appartement des voisins à chaque fois qu'ils viennent.

Mais on a décidé de faire une exception pour un couple d'amis, Alicia et Marc. Ces gens sont nos amis depuis des années, Marc travaillait avant avec Martin. Ils n'ont pas d'enfants, on a toujours pensé que l'un d'entre eux est sûrement stérile, mais on n'a jamais osé leur demander. Si ça se trouve, ils sont juste intelligents et veulent dormir le matin.

Ca fait un bien fou de partager son bonheur !

Passé la surprise de l'annonce de nos millions, ils sont juste heureux pour nous, encore plus quand on a proposé de leur prêter notre maison de Miami (et quand j'ai prêté à durée indéterminée une de mes 15 paires de Louboutin à Alicia en lui faisant visiter l'appartement des « voisins »).

Avec Alicia, ça a tout de suite été un coup de foudre amical lors de notre rencontre. A l'époque, on n'avait pas d'enfants et on se voyait plus souvent. On a une complicité inexplicable toutes les deux, un humour que personne ne comprend en général. Alicia est une fille canon, mais dans son corps de femme superbe, c'est un vrai mec qui dit des horreurs et qui pète à table. Alicia est capable de dire à une jeune mère que son bébé est moche et de traiter un gamin de petit con dans la rue (je l'ai déjà vu faire). Quand on s'est connues, on arrivait à discuter des heures de mode. A l'époque la plus grande marque qu'on pouvait se payer c'était Nike. On était fan de sacs Chanel (on l'est toujours), à tel point qu'on a économisé ensemble pour s'offrir un beau sac noir matelassé de la marque sur Ebay. Quand on l'a reçu, il s'est avéré que c'était un faux, une contrefaçon. Il faut dire que l'équivalent de 200 € c'était pas cher du tout. Vrai ou faux, on l'a trainé pendant des années en faisant une garde alternée, jusqu'à ce que l'une de nous deux s'en paye un vrai. Je ne sais pas où est ce sac maintenant, sûrement dans un placard. Si il y a une chose bien avec la trentaine c'est ça, à vingt ans tu cherches à approcher ton rêve de Chanel, à trente, tu t'achètes ton sac avec ta carte bleue et ça, Loto ou pas Loto. C'est juste ton banquier qui n'est pas content de ton découvert.

- Aby, ça change quoi vraiment dans la vie de tous les jours d'être riche comme vous ? Me demande Alicia.

- Ben tu vois, c'est super, on peut faire tout ce qu'on avait envie de faire depuis toujours, mais quand tu te lèves le matin, tu as toujours envie de ton thé bien chaud avec une tartine ! J'ai essayé le petit déjeuner au champagne, mais j'étais pétée direct !

- Vous devez être plus heureux quand même ?

- Ben ça, ça aurait été si on avait été malheureux avant, c'est surtout notre banquier qui est heureux. Bon, ok, on est plus heureux quand même, disons qu'on n'a plus de soucis, c'est sûr. Et j'ai aussi percé un mystère, que je n'aurais jamais percé sans tous ces millions : J'ai découvert pourquoi certaines femmes arrivent à garder leur vernis à ongles plus de trois heures et d'autres non.

- Pourquoi ?

- En trois mots : Femme de ménage !

- Oh, quelle découverte... Merci de l'avoir partagée avec moi, au moins, je n'aurais pas besoin de gagner au Loto pour comprendre ce point, j'ai appris quelque chose, merci Aby !

L'air ironique d'Alicia m'amuse, mais en même temps je me tourmente pour mes parents.

- En fait Alicia, je ne sais pas si on a fait le bon choix de cacher tout ça à notre famille. Ca me fait tellement de bien de le partager avec toi. Cacher notre richesse nous donne l'impression d'avoir fait une bêtise qu'on veut leur dissimuler quand ils sont là. Surtout quand ils parlent de leurs galères financières, alors que moi, le matin, mon seul souci est de savoir quelle paire de chaussures je vais choisir en fonction du temps qu'il fait... Et aussi échapper à la voisine dingue qui m'espionne.

- Hein ? C'est qui celle là ?

- Une folle...

- Plus folle que toi ? C'est inquiétant...