Je lance une musique sur mon téléphone en sortant du lycée. J'ai besoin de me détendre surtout que j'ai toujours l'impression que mon torse est en train de se faire rouler dessus par un camion. Même si je respire plus facilement, j'ai encore du mal à me redresser entièrement.
Je passe devant les populaires sans même les calculer. Je ne les ai pas vu après l'incident au self et ça me va très bien. Pourtant, je m'attends à ce qu'ils me fassent une crasse dès qu'ils en auront l'occasion surtout que Violette a dû leur dire notre petite confrontation. Mais je ne baisserai pas la tête et je ne les laisserai pas me ridiculiser.
Une musique enivrante me fait les oublier et je me concentre sur les paroles qui m'amènent dans un autre univers : celui qui est tout beau, tout rose. Je me délecte de cet instant, me laissant bercer par la fragilité et la douceur du chanteur. Je laisse son histoire m'envelopper et ses mots me transpercer. Je le laisse m'emmener dans son monde là où lui, il connait le bonheur.
Ce même bonheur que j'ai connu. Celui qui nous consume sans nous laisser le temps de dire "ouf". Celui qui arrive comme une fleur, qui nous met le cœur en cage et qui nous sourit. Celui où tu sais qu'au moindre faux pas, tu vas souffrir. Celui où tu t'attends à caresser les étoiles et les astres les plus beaux, les plus brillants. Celui où tu sais que des ailes vont pousser dans ton dos. Ce bonheur là, je l'ai eu. Il m'a amené tellement haut, tellement loin que j'ai cru être invincible. J'ai cru que tout serait toujours pareil, que je vivrais toujours avec ce sentiment d'amour, de confiance, de sensation d'être aimé plus que nécessaire. J'ai cru que tout serait toujours beau et qu'il n'y aurait jamais de problèmes. J'y ai cru comme les chrétiens croient en Dieu, comme deux plus deux font quatre, comme la Terre tourne autour du Soleil. J'y ai cru sans même me poser de questions, sans même me dire que je risquais de tout perdre. J'ai foncé la tête baissée dans ce monde où le bonheur est le mot d'ordre.
Et putain, je me suis brûlé les ailes comme personne ne peut l'imaginer. J'ai touché le paradis pour tomber en enfer, à côté de Satan qui était fier de son coup de pute. Il était heureux de me voir détruit, misérable et rongé par tant de regrets. Il se délectait de mes larmes, de ma haine et de cette envie de tout foutre en l'air. Ses diablotins de merde devaient sûrement danser en riant alors que je me repliais sur moi même. Ils devaient inventer un hymne à la victoire pendant que Satant enfonçait ses griffes acérés en moi, m'interdisant de remonter à la surface. Cela n'a pas été trop dur, je me suis mis à l'apprécier. Satan était doux même si il me bouffait de l'intérieur, il me renvoyait tous ces souvenirs en plein tronche chaque soir ou à chaque fois que je croisais une photo me rappelant le temps où j'étais dans les nuages. Il devait bien s'éclater à me voir hurler de rage, à détester le monde entier. Il devait tellement rigoler de ma détresse et de cette armure que je me construisais. Il doit toujours avoir un petit sourire de vainqueur car je n'ai toujours pas avancé. Je suis toujours dans ma petite armure et je ne l'enlèverai pas. J'aime ma carapace, j'aime m'éloigner de la société et être dans mon berceau de souvenirs douloureux. J'aime me rappeler à quel point s'attacher à un être est destructeur. J'aime me dire que tout ce qui croient que l'amitié est une des plus belles merveilleux au monde connaîtront la défaite et l'horreur de ce qu'ils appellent "le plus beau sentiment au monde", celui d'être aimé et d'être entouré.
L'amitié, c'est de la merde en boîte. Trop de bons moments qui partent en fumée dès qu'on désire s'exposer de trop près. Je ne veux plus approcher les étoiles. Je ne veux plus frôler les astres. Je vais simplement garder les deux pieds sur terre. Pourquoi s'entourer d'être qui nous tourneront le dos ? Pourquoi croire que ces sentiments sont doux et indissociables dès que nous croyons être avec la bonne personne ? Je ne sais pas pourquoi, et je ne veux pas savoir. Je sais simplement que des amis, je n'en veux plus. Je me suis fait avoir une fois, pas deux.

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Changement de rôle
Teen FictionD'un côté, il y a Violette, populaire, aimée et enviée de toutes. Elle veut se faire parfaite et elle aime faire croire que tout va bien bien dans vie. De l'autre, il y a Léo, renfermé, exclu et affreusement seul dans le lieu qu'est le lycée. Il se...