Même tomber sur un dragon plus qu'énervé, assassin connu, qui veut ma mort, qui crache du feu et dont la queue peut m'étouffer m'aurait moins fait chier. Sauf que mon étoile a décidé de faire de ma journée une grosse merde.
Je termine de monter les escaliers et je me redresse en positionnant un peu mieux mon sac sur mes deux épaules.
Violette cligne des yeux et détourne le regard sur la porte de sa salle, la tête toujours droite. Je pouffe, c'est ridicule. Pourquoi continue-t-elle de faire croire au lycée qu'elle est au dessus de tous ? C'est carrément con. Ses yeux se tournent vers moi et la lueur colérique qui les allume me fait sourire un peu plus. Elle va réellement vouloir me tuer si je continue.
- Il n'y a rien de marrant, surtout quand on vient de se faire humilier par Kellin, siffle-t-elle avec moquerie et je me renfrogne.
- Qui a été humilié devant plusieurs lycéens aussi ? je lui demande en me rappelant notre querelle.
- Ferme la, gros salopard, grince-t-elle en posant ses mains sur ses hanches.
- Quel joli vocabulaire pour une jeune lycéenne, je remarque en m'avançant lentement vers elle.
- Tu n'es qu'un gros con.Elle pose sa main à plat sur mon torse quand j'arrive face à elle et je ricane méchamment alors que nos yeux s'encrent les uns dans les autres. Ses muscles se contractent et ses pupilles se foncent sous la colère. Je reste détendu, je n'ai plus grand chose à perdre.
- Tu comptes te foutre de moi encore longtemps ? grogne-t-elle.
- Et tu crois m'arrêter avec cette petite main ? j'agrippe doucement son poignée et l'enlève de mon torse.
- Tu te prends pour qui ? crache-t-elle en me poussant en arrière de ses deux mains.
- Tu l'as obtenu ton rendez-vous ? je ricane en me postant à nouveau devant elle.
- Fils de.... commence-t-elle.
- Tututu, je la coupe en posant mon doigt sur sa bouche et ma manche redescend. On ne dit pas de vilaines choses quand on est une fille.J'attends une réplique mais rien ne vient. Et je réalise soudainement pourquoi. Je recule d'un coup et baisse ma manche sur mon bras. Mon corps se contracte, je me sens vide, figé dans un passé. Merde. Violette a toujours les yeux fixé sur ma main, ou plutôt mon poignet. Je n'arrive plus à bouger, je suis tétanisé. Elle a vu un bout de moi, un bout de mon passé, de ma vie, de ma destruction. Ses yeux se lèvent vers moi alors que je la regarde depuis le début. Je m'attend à ce qu'elle éclate de rire, qu'elle parte prévenir ses amis, qu'elle annonce à tout le lycée ce qu'elle a vu. Je m'attend à tout sauf à ce qu'elle fait réellement.
Elle s'approche lentement de moi alors que je ne bouge pas. Mes jambes sont encrés dans le sol pourtant mon cœur bat la chamade. J'ai peur. Personne n'a vu tout ça avant elle. J'ai dépassé des douleurs dans ma vie mais celle-là est ineffaçable. Elle me marque depuis ces dernières années, elle ne disparaîtra sûrement jamais, c'est ce qu'ils m'ont dit en s'occupant de moi.
Violette glisse ses doigts autour de mon poignet et me le lève. Je n'arrive pas à reprendre le contrôle de mon corps, je suis paralysé par la peur, par les souvenirs qui se bousculent dans ma tête. Ses doigts font glisser lentement ma manche vers le bas. Et ils glissent le long de mon poignet torturé pendant des années. Mon cerveau se reconnecte alors que mon corps. Je recule en la poussant aussi. Son don cogne le mur derrière elle et je m'appuie à celui qui est derrière moi. Ma respiration s'accélère alors que je n'arrive pas à stopper mes tremblements. Je panique. J'ai peur. Mon souffle est court, ma tête tourne et je me laisse tomber au sol. Je passe mes mains dans mes cheveux et les laisse sur ma nuque. Merde ! Pourquoi ?!
- Putain ! Putain... je murmure en me balançant légèrement.
- Léo. Léo ! répète Violette un peu plus fort en se postant devant moi, accroupie. Ne panique pas. C'est bon, ça va, elle caresse ma joue en gardant ses yeux dans les miens. Ce n'est rien. Je ne dirai rien. Ça va aller.
- Tu te fous de moi ? je ricane amèrement. Comment veux-tu que ça aille ? Tu as bien vu, ça ne va pas.
- Je...
- Non, tais-toi, je soupire alors qu'elle pince ses lèvres entre elles. Fous moi la paix. Va me balancer à tes potes, va faire ce que tu fais de mieux : détruire les gens. Va dire à tes cons d'amis ce que tu viens de voir, va leur dire ! je crie en relevant un peu plus la tête et elle écarquille les yeux. Tu ne sais faire que ça ! Profites-en ! Continue !
- Mais arrête ! hurle-t-elle à son tour en me coupant. Je ne dirai rien ! Tu es complément taré ! Un malade mental sans déconner ! C'est clair que ça ne va pas dans ta tête !Ces paroles me font mal, très mal. Mon cœur se serre, ma tête est à deux doigts d'éclater et je me sens sur le point d'exploser. Elle en rajoute, elle continue de me dire que je suis fou. Et j'y crois. Je suis fou, complètement malade. Je n'ai plus de sens, mon cerveau est parti en total opposition de mes anciennes pensées : celle où le Bonheur est maitre des lieux. Je me sens défaillir, ses mots me font mal. Ils me transpercent et me brûlent. Elle a raison : je ne vaux rien. Je devrais mourir, ou au moins disparaître d'ici, de cette ville. Je fais trop de peine à ma famille, je détruis tout ceux que j'entoure. Seuls mon frère et mes cousins m'en voudront. Mais c'est à eux que je fais le plus de mal. Je les traîne dans mes histoires, ils souffrent par ma faute, par mes erreurs. Et je ne veux pas que ça continue.
- Je m'en vais.
J'ai lâché ces simples mots et ça a coupé net Violette. Ses yeux se sont arrondis alors que je me lève. Elle m'imite et je replace mon sac sur mes épaules. La cloche sonne alors et des élèves se pressent dans les couloirs. Je baisse les manches de mon sweat et souris doucement à la jeune femme qui me fait face.
- Au revoir, je me baisse et pose avec douceur mes lèvres sur son front.
D'un pas décidé, je prend la direction de la sortie de l'établissement. Ce dernier geste était simplement pour la remercier : elle m'a ouvert les yeux. Et il était temps que quelqu'un le fasse.
"Je suis désolé Gale. Ben et Josh aussi. Mais je vous ai déjà trop blessé. Il est temps pour moi de partir et de vous laisser m'oublier. Je vous apporte trop de problèmes. Ne me pleurez pas, peut-être qu'un jour je reviendrai. Au revoir."
Message envoyé.
J'entre dans le premier train qui entre en gare après avoir acheté une place et je m'assois sur la première place que je trouve. Je regarde le paysage défilé lentement quand le train démarre. Tout en souriant, je lance la musique et j'oublie ce que je suis en train de faire.
Je suis convaincu d'une chose : je risque de regretter rapidement ce que je fais. Mais je ne veux pas y penser de suite. J'y penserai quand mon frère réalisera ce que j'ai fais et que mes cousins m'harcèleront de messages.
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Changement de rôle
Teen FictionD'un côté, il y a Violette, populaire, aimée et enviée de toutes. Elle veut se faire parfaite et elle aime faire croire que tout va bien bien dans vie. De l'autre, il y a Léo, renfermé, exclu et affreusement seul dans le lieu qu'est le lycée. Il se...