Flou total

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J'étais effondrée. Je retins mes larmes devant mes amies, même si Fanny se doutait certainement de quelque chose, la connaissant. Mais, sic'était le cas, elle cachait très bien son inquiétude. Je ne voulais pas non plus pleurer dans la rue, ça ne se faisait pas.Alors, je marchais, digne, retenant tout ce que je ressentais. Ce ne fut que lorsque je fermais la porte de notre grand appartement derrière moi que je recroquevillais, assise sur le sol et me mit à pleurer. D'un côté, je me demandais pourquoi je pleurais, après tout, je ne la connaissais que depuis peu. Mais, le simple fait d'avoir pu la blesser me faisait également souffrir au plus profond de moi. Comment avais-je pu être aussi stupide ?! Je ne savais pas si cet article était vrai ou non, dans le fond. Blandine m'avait bien eue dans le fond, elle savait que je serai incapable de cacher ça à Camille. Mais quelle conne !

Je sentis une main se poser doucement sur mon épaule. Je relevais la tête vers ma mère. Ses bras étaient encore bandés, mais elle avait repris des couleurs. Elle me sourit, avec douceur et m'aida à me relever avant de me prendre dans ses bras. Je retrouvais ma maman.Une mère meurtrie par son passé, par son couple qui a volé en éclats... Mais une mère tout de même. Même si tout cela me chamboulait encore plus que je ne pouvais l'être déjà en ce moment, j'aimais mes parents, et rien ne pourrait changer cela, pas même un divorce. Je m'appuyais contre elle et pleurais de longues minutes. Elle me berça, me susurra des mots rassurant qui me calmèrent, peu à peu. Je me laissais entraîner dans le salon, où je m'assis sur un fauteuil, et elle se dirigea vers la cuisine.

Elle revint rapidement avec un chocolat chaud onctueux et quelques biscuits au citron, mes préférés. Elle alluma une cigarette, chose que je ne l'avais pas vu faire depuis une bonne dizaine d'année,mais je me taisais. Elle m'interrogea du regard et cela me suffit à tout lui raconter. De ma rencontre avec elle, au vernissage, à notre rencontre le soir-même. Elle m'écouta avec patience, un petit sourire serein sur le visage. Lorsque j'eus fini, elle attrapa ma main et m'embrassa sur la joue.

« Je ne sais pas vraiment ce que tu peux ressentir pour cette jeune femme,mais c'est assez fort pour que ton cœur ne reste pas insensible.Fais des recherches. Redonne lui la crédibilité qu'elle mérite dans ton esprit et pose toi les bonnes questions ? Que représente-t-elle pour toi ? Un avenir sans lendemain ou à deux ? »

Choquée,je rougis violemment et la fixais, les yeux écarquillés.

« Maman !J'ai Jonathan quand même !... Et j'aime les hommes... »

Même moi je sentais que ma phrase sonnait faux. Mais pourquoi ?!!Impulsivement, j'attrapais l'étui en acier de ma mère, en tirai une cigarette que j'allumais. Je n'étais qu'une petite fumeuse occasionnelle qui avait du fumer une ou deux clopes en soirée. Et la première bouffée me fit tourner la tête. Ma mère eut l'air surpris mais ne dit rien... Je savais qu'elle préférait que je le fasse devant elle plutôt que dans son dos. Je ne fumais qu'une seconde fois avant de lui tendre la clope, qu'elle prit sans un mot.Nous restâmes quelques instant dans le silence.

« Tu vois, même toi, ma chérie, tu sais que ce que tu dis n'est pas juste pour ton cœur... Et Jonathan ? Que ressens-tu réellement pour lui, dans le fond ? Es-tu avec lui parce que tu l'aimes, ou pour les convenances, comme nous te l'avons si bien appris ? Ma puce... Je ne te laisserai pas faire la même erreur que moi par le passé. »

Une erreur ?... Mon dieu, je ne savais plus quoi penser. Mon téléphone sonna doucement, m'indiquant un SMS. C'était Fanny.

*J'ai vérifié, elle a été acquittée ! Coup monté, regarde ça !*

C'était suivi de deux liens internet. Rapidement, j'allais vérifié. Ça n'avait été qu'un coup monté pour lui soutirer de l'argent. D'un côté, j'étais énormément soulagée. Elle n'était coupable d'aucun crime. De l'autre, je me sentais tellement stupide ! Ma mère avait jeté un œil et souriait.

« Tu devrais l'appeler, ou au moins lui envoyer un message pour t'excuser. »

J'acquiesçais d'un signe de tête. Il fallait aussi que je réfléchisse à tout ça. Ce n'était pas simple, mais alors pas du tout. Je dînais rapidement, sur le pouce, dans mes pensées, et allait me coucher, de bonne heure, après avoir pris un somnifère, nécessaire si je ne voulais pas passer une nuit blanche à ruminer.


Après un petit déjeuner en mode vaseuse et une douche qui ne me réveilla qu'à moitié, je pris le métro, en direction de la faculté. Le somnifère m'avait fait dormir toute la nuit, mais là, ce n'était pas vraiment la joie. Ma mère était partie tout, me laissant un mot pour me dire avoir une affaire urgente à régler. Du coup,transport en commun. Pas en état. Et encore, heureusement que j'étais partie tôt, vu à l'allure à laquelle je marchais,j'allais finir par arriver pile à l'heure.

Au final, l'air frais me donna un coup de fouet, et je pus arriver plus vite que je ne le pensais. Je n'aurais peut-être pas du... Blandine était là, et elle n'était pas seule... Jonathan. Ils semblaient parler. Qu'est-ce qu'elle allait lui raconter, elle encore ? Je n'eus pas le temps de réagir la première, Jonathan m'avait vu. Il se précipitait vers moi et n'avait pas vraiment l'air serein, au contraire. Il était même en colère, je le connaissais. Je n'eus pas le temps de dire un mot qu'il m'attrapa par le bras et me traîna,devant tout le monde, dans un coin plus désert. Ça commençait bien...

Ce fut limite s'il me balançait pas contre le mur.

« Alors comme ça, tu fricotes ouvertement avec une gonzesse ? Une criminelle, en plus ? »

Pardon ?Je le fixais surprise. Comment ça je fricotais ? Il avait vu ça où, lui ? Blandine... Elle essayait de me pourrir la vie,maintenant qu'on avait découvert son manège. Quelle gamine !

« Mais non ! Ça va pas ? Elle veut juste m'aider à m'améliorer,et au passage, les accusations contre elle ont été démenties. Ce n'est pas une criminelle ! »

Il bouillait intérieurement, je pouvais le voir. Il était rouge de colère, et il devait se retenir de ne pas frapper contre un mur...Ou sur moi, je ne savais pas trop. Il m'attrapa le bras et planta son regard dans le mien, le plus sérieux possible.

 « Rien à foutre de tes excuses à deux balles. Toi, tu fricotes peut-être pas, mais tu sais pas ce qu'elle te veux, cette femme-là !Alors tu vas l'effacer de ta vie, tu ne la reverras plus jamais !Ça va s'arrêter de suite, cette histoire, avant que ça dégénère,compris ? » 

EllesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant