CHAPITRE DEUX : LA DECOUVERTE ~ #6 : La grande roue

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Les pièges de Yowan n'avaient pas été déclenchés pendant la nuit. Il les ramassât, mais en redéposait sur notre chemin, près de ce fameux parc d'attraction dont Nylo voulait faire une petite escale.

« S'il te plaît ! priait le petit en regardant Jayden qui n'était pas d'accord. S'il te plaît, s'il te plaît, s'il te plaît !

- Non ! On n'a pas le temps pour ça Nylo ! »

Le petit actionna sa montre et disparut. Nous n'entendions plus que sa voix.

« Puisque c'est comme ça, tu ne me vois plus !

- Il est insupportable quand il fait ça... »

Malgré son invisibilité, les traces de ses pas se voyaient sur le sol, et la poussière du sable s'envolait derrière chacun de ses petits pieds. Il marchait en direction du centre du parc.

Yowan venait de finir de poser les pièges dans la forêt. Il décide de suivre Nylo ; je l'accompagnai.

« Tu es donc... Roi de Vauban ?

- C'est exact.

- Grande responsabilité...

- Oui mais... C'est plutôt ma femme qui s'occupe de ça à plein temps. Elle prend ça très à cœur... Elle a toujours été proche des habitants de Montparnasse, et aujourd'hui avec ceux de Vauban.

- Et vous comptez avoir des...?

- Des ?

- Des enfants.

- Ah... C'est assez compliqué... Elle... Un accident durant les évènements l'ont... rendue stérile. Elle avait, d'après les médecins, déjà un ovule stérile, mais le deuxième a été touché par... enfin bref, nous ne pouvons pas avoir d'enfants.

- Ah, je suis... désolé.

- Aucun souci »

Nous suivions encore les pas de Nylo qui continuait à avancer, parcourant ce qu'il restait du parc.

« Moi non plus je n'ai pas eu d'enfant, poursuivit Yowan, et Nylo aurait vraiment été l'enfant que j'aurai voulu avoir. Mais je suis bien trop vieux pour être son père, riait-il, je pourrai plutôt être son grand-père !

- Tu ferais un fabuleux grand père, lui affirmai-je, et je pense que Nylo te considère comme un grand-père maintenant. Tu es tellement gentil avec lui.

- Je pense surtout qu'il n'était pas très heureux avec ses parents. Et sa maladie, ou en tout cas ce qu'il le rend ainsi, ne lui facilite pas la tâche. Nous sommes peut-être à ses yeux, sa nouvelle famille.

- Nous sommes une famille. »

Nylo réapparut, la tête vers le ciel, la bouche entrouverte et ses mains tenant sa passoir sur sa tête pour pas qu'elle ne tombe en arrière. Il nous regarda et nous dit :

« Je veux monter là-haut. »

Il parlait de la grande roue.

Je ne savais pas lequel de Yowan ou moi avait le plus le vertige. La frontière était assez mince. Nylo était un vrai singe comparé à nous : il grimpait sans crainte.

Une fois là-haut, nous admirions le paysage. La forêt était impressionnante et grande. A droite et à gauche de nous, deux villes se dressaient dans la végétation. Il nous restait tellement de chemin à faire, tellement de chose à découvrir.

Je fermai les yeux, quand soudain...

Un cri, entre celui de l'humain et de l'animal, résonna dans l'ombre du bois. Puis un second. Puis un troisième. Puis un quatrième. Puis encore un, et encore un autre jusqu'à-ce qu'ils deviennent indénombrables, créant ainsi un brouhaha incessant qui commençait sérieusement à nous faire froid dans le dos. Je voyais Jayden et Noraa prendre leurs armes en bas. Je pris la mienne également. Yowan attrapa Nylo par le bras.

« On devrait descendre, tu penses pas ? » me demanda Yowan, inquiet.

Une explosion retentit dans la forêt. Une seconde également. Le feu créa une déflagration qui s'extirpait par le dessus des branches.

« On descend, maintenant. » ordonnais-je.

Là, plus de vertige. Seulement l'instinct de survie pour descendre l'échelle de la grande roue, les marches trois par trois.

« Qu'est-ce qui se passe ? demanda Nylo, mort de peur.

- Je sais pas, mais ne nous quitte pas d'une semelle, lui ordonnais-je, il faut rejoindre Jayden et Noraa sans plus attendre. »

Les cris continuèrent, de plus en plus intenses, se rapprochant de plus en plus du parc.

Je voyais les deux militaires tirer dans la forêt. Jayden me regarda et me cria :

« COUREZ ! COUREZ ! »

Là, c'était la première fois que je la voyais dans ses yeux.

La peur.

Je la ressentais dans ses mots. Je le voyais : il était effrayé. Ce n'était pas un exercice. Nous étions en danger. En danger de mort.

Yowan prit Nylo sur son dos et commençât à courir à l'opposé de la bataille. Je le suivis. Le petit pleurait, le visage en sanglot, les mains s'agrippant au cou du vieil homme.

C'est alors que je les vis : ces créatures, ces monstres.

Ils couraient, la bouche ouverte, en proie de chasse. Ces humains - ou du moins ce qu'il en restait - aux orbites vides, la tête regardant le ciel, suivaient le son des coups de feu. Noraa et Jayden continuaient à tirer. Je les voyais reculer peu à peu, jusqu'à fuir.

« COUREZ ! COUREZ ! »
« NE VOUS-ARRETEZ PAS ! »

Je ne regardais plus derrière moi. C'étaient mes jambes qui couraient à présent ; mon esprit était ailleurs, loin d'ici. Ma vision était floue, mon corps était lourd. Je ne pensais plus à rien à part courir. Je m'essoufflais peu à peu, en suivant Yowan. J'avais l'impression de ne pas avancer, que mes jambes étaient prises dans du béton. Les cris des créatures, les pleurs de l'enfant, les aboiements de Lucky, les coups de feu et les explosions : ils raisonnaient dans mon crâne, en écho, comme des cloches, comme les fameuses cloches de minuit.

J'avais peur.
Peur qu'ils me rattrapent.
Peur de mourir.
Peur.

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⏰ Dernière mise à jour : May 09, 2016 ⏰

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UN CŒUR TAILLÉ DANS LA PIERRE | Science-FictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant