Chapitre n°11 : Ligotée

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Les rues sont calmes et vides. Totalement désertées. Il est quatre heures et demie du matin. Le jour pointe déjà au loin, tandis que la lune disparaît derrière les gratte-ciels, immense.

Mes talons frappent le sol. J'ai encore les yeux rougis par les larmes. Je me suis arrêtée dans la toilettes publiques pour affiner mon maquillage, gommer mes cernes, mes cicatrices, à l'aide de correcteurs. Même si certaines (la plupart) sont indélébiles.

Maintenant je marche vers mon destin. Aussi terrible soit-il. Toute la nuit, j'ai inventé des scénarios sur ma vie future. Certains étaient idéalistes, d'autres cauchemardesques. Mais je connais l'horreur. Et je n'en ai plus peur. J'ai peur d'une seule chose au monde.

Toute la nuit je me suis répétée que ce que j'allais vivre ne pourrais jamais être pire que ce que j'ai déjà vécu.

Je marche vite. Quelques rares voitures me frôlent, si vite que cela crée un courant d'air qui agite mes cheveux. Je serre dans mon poing un pendentif en argent représentant un aigle en argent noir. Les rebords de ses ailles sont en obsidienne, et il ouvre les ailles, prêt à s'envoler. Pourtant l'aigle s'est déjà envolé au ciel...

J'arrive à la gare, et je monte les marches deux par deux, haletante. Il y a peu de monde. Seulement quelques passant, qui ne font guère attention à moi. L'air glacé que je respire me brûle les poumons. J'entre par la grande porte vitrée qui s'ouvre à mon approche. La gare est immense. Sa toiture transparente est voûtée, et laisse passer les rayons du soleil. Les murs végétaux récemment brumisés d'eau fraîche semblent couvertes de perles. Encore une fois, je trouve ce lieu parfait. Impeccable.Terriblement moderne et neuf. Une illusion de richesse.

J'observe autour de moi, à la recherche de silhouette familière. Il n 'y a aucune des filles sélectionnées. Hier, j'ai tout fait pour essayer d'établir un lien, de trouver une caractéristique commune à toutes mes coéquipières, mis à part la beauté. Mais rien. Au départ, je pensais qu'ils sélectionnaient les fortes, les rebelles. Comme Victoire, Kristen et moi. Mais en observant Gabrielle et les suivantes, j'ai rayé cette possibilité. Peut-être qu'il nous sélectionnait pour un talent quelconque. Une forme d'aptitude. Mais je n'en suis pas certaine. Si tel avait été le cas, pourquoi procéder à une sélection ? Pour brouiller les pistes, songeais-je, incertaine. Il faudra ré-exploiter cette piste.

Je jette un coup d'œil à ma montre digitale. Je suis en avance. Je cherche des yeux les écrans plats qui affiches les heures de départ. Je cherche le train 21, que l'on nous a indiqué hier. Voie 7. Destination : Terbenek. Une ville Sytarienne. Bon. J'emprunte un escalator en verre, et je monte au deuxième, tout en analysant mon environnement, prête à réagir en cas d'attaque extérieure. J'ai demandé à Niall de me faire revoir toutes les leçons qu'ils m'avaient apprise. Grossièrement, certes, car il était impossible de tout revoir en deux heures, mais l'essentiel. Et je gardais tout ses conseils en mémoire, prête à les appliquer en cas de besoin. Des conseils pas seulement physiques, sur la puissance des coups ou comment lancer son poing, mais aussi plus psychologique, analytique. Comment se tirer de telle ou telle situation. Comment adoucir son adversaire. Le manipuler. Le faire chanter. Bref. Comment survivre.

Je laisse mon regard dériver sur les murs, plongée dans mes réflexions. Le bâtiment est entièrement fait en verre, avec des jeux de miroirs et de lumière, si bien qu'il n'y a que quelques néons artificiels.

Le ronronnement des machines est le seul bruit que j'entends. De temps à autre, le crissement d'un train qui arrive à destination. Tout est calme. Je suis la rampe de verre, immobile. Les commerces sont fermés, les passants enfermés dans leurs bulles.

J'arrive à proximité du quai. La voie est en réalité un demi-tuyau, sur lequel le tain glisse grâce à un système d'inversement magnétique. En regardant de plus prêt les passagers patientant, je remarque qu'il y a déjà les garçons, et vingt autres hommes habillés en noirs. Les vigiles.

Expérience 21Où les histoires vivent. Découvrez maintenant