Chapitre Trois
__Une fois dans l'ascenseur, j'appuyai sur le bouton du dernier étage.
- Si quelqu'un me demande, je reviens dans cinq minutes, dis-je à Hoa quand elle sortit au vingtième.
- Embrasse-le pour moi, fit-elle en feignant de s'éventer. Je me sens toute chose rien qu'à l'idée de l'embrasser par procuration !
__Je grimaçai un sourire avant que les portes se referment, et la cabine reprit son ascension. Arrivé au dernier étage, je traversai le hall décoré avec goût, en direction de la porte de verre fumé sur laquelle s'étalaient les mots TOMLINSON INDUSTRIES.
__Contrairement à son habitude, la réceptionniste rousse se montra particulièrement coopérative et appuya sur le bouton de la porte avant même que je l'atteigne. Elle m'adressa ensuite un grand sourire qui m'incita à redresser le dos. J'avais toujours eu l'impression qu'elle ne me portait pas dans son cœur, et son amabilité soudaine ne me dit rien qui vaille. Je lui fis cependant un signe de la main et la saluai au passage parce que je ne suis pas désagréable – tant qu'on ne me fournit pas une bonne raison de l'être.
__Je m'engageai dans le long couloir qui conduisait au bureau de Louis et m'arrêtai dans la deuxième aire d'accueil où Geoffrey, son secrétaire, avait son bureau.
__Il se leva aussitôt.
- Bonjour, Harry, dit-il en décrochant le téléphone. Je le préviens que vous êtes là.
__La paroi de verre transparent qui séparait le bureau de Louis du reste de l'étage pouvait être obscurcie à volonté en pressant un simple bouton. Elle l'était, ce qui ne fait qu'accroître mon malaise.
- Il est seul ?
- Oui, mais...
__Je ne le laissai pas achever sa phrase. Poussant la porte vitrée, je pénétrai dans le domaine de Louis et remarquai immédiatement qu'un des coussins du canapé gisait au sol. Sur l'épaisse moquette, des traces indiquaient que le canapé avait été décalé de quelques centimètres.
__Les battements de mon cœur s'accélérèrent et mes paumes devinrent moites. L'angoisse atroce qui m'avait submergée un instant plutôt s'intensifia.
__Je venais à peine de remarquer que la porte du cabinet de toilette était ouverte quand Louis en sortit, torse nu. Il avait les cheveux humides, comme s'il venait de prendre une douche, et le haut de son torse ainsi que son cou étaient empourprés, comme lorsqu'il venait de faire de l'exercice.
__Il se figea en me découvrant et son regard s'assombrit un instant avant que le masque impassible derrière lequel il dissimulait ses émotions se mette en place.
- Tu tombes mal, Harry, dit-il en enfilant la chemise qui se trouvait sur le dossier d'un des sièges du bar – une chemise différente de celle qu'il portait en arrivant. J'ai un rendez-vous et je suis en retard.
__Je m'agrippai à ma sacoche de toutes mes forces. Sa semi-nudité, l'intimité de cette scène avaient suffi à raviver mon désir. Je l'aimais à la folie, il m'était aussi nécessaire que l'air que je respirais... et je ne pouvais que comprendre ce que ressentaient Eleanor et Hannah, à quelles extrémités elles seraient capables de recourir pour le détourner de moi.
- Comment se fait-il que tu sois à moitié nu ?
__Incapable d'empêcher mon corps de réagir à la vue du sien, je n'arrivais pas non plus à juguler les émotions qui m'assaillaient. Les pans de sa chemise fraîchement repassée laissaient entrevoir ses abdominaux et ses pectoraux nettement dessinés. Je ne pus m'empêcher de songer à son sexe, et un frisson de désir me traversa.