Chapitre 3

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À chaque fois qu'elle ouvrait la boîte à musique, elle observait la seule et unique pierre qu'elle possédait. Comme c'était étrange! Tout lui semblait maintenant plus vaste et plus compliqué, comme si on lui avait caché quelque chose toute sa vie. Elle fit jouer la musique. Assise sur le sol de sa grotte, Amaryllis réfléchissait. Réfléchir à quoi? À tout. Tout était mystérieux depuis qu'elle avait trouvé la boîte à musique. Cette fille qui lui avait donné la perle, cette Euterpe qui marchait sur l'eau, celle qui jouait magiquement de la flûte, elle cachait une part de mystère. La musique cessa de jouer. Derrière Amaryllis, les feuilles de lierre s'arc-boutèrent, créant ainsi un bruit de feuilles d'automne contre le vent. Mais ce n'était pas le vent; c'était le bruit qui accompagnait une nouvelle apparition. Amaryllis se retourna subitement, les yeux écarquillés.

- Vous..., réussit-elle à articuler.
- Oui? Qu'y a-t-il? demanda la jeune inconnue.

Elle ressemblait bizarrement à Euterpe, mais avait la peau noire et les yeux d'un jaune soleil. Son front était orné d'une sorte de bandeau d'étoiles qui allait de pair avec ses yeux et qui contrastait avec sa peau. Sa longue robe blanche était resplendissante, tout comme l'était celle d'Euterpe. Sa voix restait aussi aiguë qu'un enfant, quoique teintée d'une certaine maturité. La fille tenait dans ses mains un très antique globe terrestre.

- Que faites-vous ici? demanda Amaryllis.
- Tu as rencontré Euterpe. C'est bien.
- Comment le savez-vous?
- Je sais beaucoup de choses...

«Comme Euterpe... »

- Ah bon... Vous voulez ma boîte à musique, je suppose?
- Non, pas précisément.
- Alors, que voulez-vous?
- Suis-moi, je vais te montrer!

Décidément, elle était plus joyeuse qu'Euterpe. La jeune fille noire prit la main d'Amaryllis et l'emmena à l'extérieur de la grotte jusqu'à l'orée de la forêt. De là, elles pouvaient voir le village peuplé des Autres.

- Ne les trouves-tu pas magnifiques? demanda l'étrangère.
- Qui? Les Autres? Je ne sais pas trop.
- Ils sont fascinants! Ils ne sont pas très intelligents, mais ils ont leur charme.
- On dirait que tu parles d'eux comme on le ferait pour des animaux!
- Ce n'en sont pas?
- Non! Enfin, peut-être...

Elles observèrent le village au loin pendant quelques instants. Amaryllis ne savait vraiment pas quoi répondre face à cette étrange fille qui ne lui avait même pas encore dévoilé son nom. Cette dernière semblait intéressée par tout ce qui avait trait à l'univers et aux humains, et elle paraissait pleine de ressources.

- Je m'appelle Uranie.
- Moi, c'est Amaryllis.

Uranie était un nom beaucoup plus mélodieux qu'«Euterpe». On aurait d'ailleurs dit que son nom lui seyait parfaitement bien.

- Euterpe t'a donné la perle: tu as donc réussi l'épreuve de confiance. Félicitations!
- Une épreuve? Quelle épreuve?
- Euterpe m'avait bien dit que tu poserais beaucoup de questions! railla Uranie. Maintenant, regarde le ciel, acheva-t-elle.

Amaryllis leva les yeux. Le magnifique ciel lui ouvrait les bras. Souvent elle avait regardé le ciel comme un lieu magique et inaccessible. Elle baissa les yeux vers Uranie qui avait les siens fermés. Elle avait toujours le menton levé, comme aspirée vers les cieux. Elle avait vraiment l'air de se sentir libre.

- Ne sens-tu pas l'énergie qu'il dégage?
- Un peu, je sens le vent frisquet.
- Non, pas ça. Je parle d'une toute autre énergie. La sens-tu?

Amaryllis se ferma les yeux et leva la tête vers le ciel. Aussitôt, elle se sentit traversée par une sorte de force invisible. Elle écarta les bras et respira un bon coup. Quelle merveilleuse sensation! Amaryllis s'imaginait plus légère que jamais, comme un oiseau. Elle rouvrit les yeux. Uranie la regardait, toute surprise.

- Ta connexion avec le ciel est encore plus forte que tu ne le crois.
- Ma connexion?
- Tu comprendras en temps et lieu.

Uranie prit une profonde inspiration et continua.

- Le ciel est plein de mystère, dit Uranie. Il faut simplement se laisser aller. Si seulement tu avais vu les galaxies, les mondes, l'univers les planètes, les étoiles: c'est tellement magique! Il n'y a pas de mots pour le décrire.
- Tu as déjà vu les planètes?
- J'en ai vues plus que jamais tu ne pourras en imaginer.

Amaryllis prit alors conscience que s'il y avait une deuxième fille, il devait y avoir une autre pierre.

- Est-ce qu'il y a sept autres filles qui viendront me donner les autres pierres?
- Tu es intelligente, mais ce n'est pas si simple.
- Qu'y a-t-il d'autre?
- L'équilibre doit être restauré le plus vite possible, sinon tout s'écroulera. Ta réussite est primordiale, Amaryllis; plus tu apprendras et plus ce sera clair pour toi.

Uranie prit son globe terrestre et le tourna. Une sorte de mécanisme s'enclencha et le globe s'ouvrit sur une autre boîte à musique, jaune cette fois.

- C'est la tienne?
- Oui.

Uranie l'ouvrit et prit une pierre jaune se trouvant à l'intérieur. La pierre était rectangulaire et était un peu plus grosse que la perle, sa couleur jaune ambre était la même que celle des yeux d'Uranie: c'était une topaze.

«Voici le deuxième secret: D'une étoile elle est née, aussi belle qu'un soleil elle restera. Prends-en bien soin, tu n'en auras qu'une à chaque fois. Deux sur neuf, il t'en reste sept à trouver.»

- Attends! J'ai d'autres questions!

Mais déjà, une brume désormais familière se leva. Amaryllis chercha Uranie dans la fumée épaisse, mais elle n'y distinguait plus rien. Amaryllis observa attentivement la topaze aux éclats de soleil et referma ses doigts dessus. Elle s'assit par terre et attendit que la brume l'enveloppe jusqu'à lui faire perdre conscience.

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