Accroupi près d'une rivière, Gustaf se nettoie les mains. Sous ses ongles, des bouts et cervelle. Il a eu la mauvaise idée de plonger ses pouces dans les orbites putrides d'un zombie. Pour savoir ce que ça fait, d'approcher la mort de si près.
L'abomination a clamsé définitivement dès que ses doigts ont atteint les tissus cérébraux.
Gustaf ne comprend pas ce qu'ils ont d'effrayant. Ils sont lents. Ils sont faibles. Isolés, ils sont ridicules. En bande, il suffit d'être un peu malin pour en venir à bout en quelques coups judicieusement placés. Un coup dans la tête d'un zombie ne garantie pas que les autres ne chercheront pas à vous attaquer en même temps. D'ailleurs, il entend l'une de ses saloperies se rapprocher dans son dos, sans aucune once de discrétion. Pourquoi en ferait-il preuve ? Ils ne connaissent pas ce mot. Ils ne connaissent rien. Ils ne connaissent pas la parade non plus. Sinon, Gustaf aurait plus de mal que ça à enfoncer sa clé à molette dans son crâne. Un instant, il croit que le métal vaguement rouillé resterait coincé. Mais il parvient à la retirer sèchement en repoussant le cadavre du pied.
Il ne s'éternise pas près de la rivière.
Mais il ne se presse pas pour autant.
D'une démarche lente et mesurée, il marche le long de la rivière, silencieux. Avec un bout de chiffon flanqué d'ordinaire dans sa poche, il essuie vaguement sa clé à molette, sans s'arrêter une seule seconde. S'arrêter, ça signifie abandonner. Abandonner, ça signifie crever. Et Gustaf n'a pas fait tout ce chemin pour se laisser dépérir maintenant.
Il s'ennuie. Un peu. En trois semaines, il n'a croisé personne. Enfin, il a croisé un nombre incalculable de zombies, mais pas une seule âme en vie. Mais que ça le dérange, non. Mais que ça lui manque, oui. Habitué aux mugissements des téléviseurs, aux grognements des passants et aux relents dérangeants des fast-foods, il se dégoûte à apprendre à aimer la solitude. Le silence. L'odeur de la mort et des cadavres.
Et il marche.
Jusqu'à ce que le soleil se couche. Mais il ne s'est pas attendu à ce que son ennui vole en éclats si vite. Il n'a eu besoin que de poser le pied sur la route, à deux pas d'une station service à l'abandon. Son repaire.
Occupé par d'autres âmes en vie.
Il grogne, mais n'hésite pas une seule seconde à s'approcher.
Ils sont armés. Ils ont des flingues, chargés. Et une balle s'envole, ricochant sur l'asphalte.
— En plus d'être des squatteurs, vous êtes assez stupides pour tirer.
Gustaf roule des yeux, flanquant ses mains dans ses poches. Un sourire narquois s'esquisse sur ses lèvres, alors qu'il poursuit sa diatribe venimeuse.
— Vous êtes chez moi, messieurs.
— Et alors ?
— Je n'aime pas que l'on s'invite chez moi sans mon accord.
Il perd son sourire, Gustaf. Parce qu'on le met déjà en joue.

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dead men
Terror"Dead men tale no tells." Mais ils marchent, les hommes morts. Ils marchent et ils dévorent les vivants.