Chapitre 4: Le jour fatal

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Ils arrivent. Ils viennent. Ils courent. Ils attendent. Ils s'impatientent.

Leur heure approche. N'entendent-t-ils pas leurs pas des profondeurs des enfers faire trembler le sol avec la fureur d'une tempête ? Ne sentent-ils pas cette odeur de brûlé, celle de la fumée et des flammes s'échappant des fissures de la terre ? Ce murmure ne se propage-t-il pas dans le vent, annonçant ainsi l'arrivée d'une force à craindre ?

Était-elle la seule à sentir que quelque chose n'allait pas ?

Emma pouvait aller n'importe où, jamais ce mauvais pressentiment ne la quittait. Sans cesse, des voix résonnaient dans sa tête pour lui dicter que la fin approchait, qu'ils arrivaient... Mais évidemment, elles ne précisaient jamais qui arrivait. Sauf que, sans le préciser, on sentait tout de même ce sentiment d'urgence et de danger pressent.

Et au travers ces curieuses impressions, la jeune fille pensait à Dominic. À ce qui pouvait l'avoir poussé à avoir agi ainsi. Qu'avait-elle fait de mal ? Où leur amour avait-il dérapé ? Pourquoi l'avait-il trahi ?

L'adolescente songeait à ce fameux jour, celui de sa mort. Et si un seul des détails de cette journée avait été différent, serait-elle encore en vie ? Ou était-ce écrit quelque part sur un bout de parchemin qu'Emma Label devait mourir à cette date précise ? Toutes des questions sans réponse.

Le parc de son enfance était sinistre la nuit tombée. Les arbres ressemblaient à des monstres prêts à surgir de l'obscurité. Des ombres dansaient sur les parois des modules de jeux et une créature semblait se tapir dans un tunnel. Il n'y avait pas un rire d'enfant ni un chant d'oiseau. Même les voitures s'étaient tues puisqu'aucune ne passait sur la route. Le silence plombait.

Emma se balançait tristement. Ses pieds passaient au-travers les copeaux de bois comme s'ils n'existaient pas. Enfin, plutôt comme si elle n'existait pas. Pourtant, à ses yeux, son corps ne lui paraissait pas très différent. Sa peau était simplement plus diaphane sous la lune et son reflet renvoyait un regard vide et sans couleur. Ses iris avaient conservé leur vert, mais les arcs-en-ciel qui y dansaient auparavant avaient disparu sans laisser de trace.

Puis, soudain, un gamin apparut sur le chemin en courant. Sa silhouette maigrelette avait quelque chose d'irréel. Il avança vers elle. La jeune fille ne comprenait pas pourquoi jusqu'à ce qu'elle puisse le voir de plus près. Le petit garçon possédait d'immenses prunelles de la couleur des cieux. Elles étaient d'un bleu si pâle que la nuance se mêlait presque au blanc. Lorsqu'Emma effleura sa peau d'une blancheur incroyable, elle constata qu'elle était glaciale. Il s'agissait d'un fantôme.

L'adolescente demeura bouche bée tandis que l'enfant prenait la parole :

— Fais attention. Elle te surveille.

— Qui ça ?

— Elle.

Il pointa la dame qu'Emma avait remarquée à ses funérailles, postée à l'autre extrémité du parc. La femme demeurait figée dans l'ombre, mais on sentait son regard pesant fixé sur Emma. Celle-ci tressaillit, le cœur emballé. Elle détourna les yeux et préféra quitter les lieux pour échapper au mal que dégageait la mystérieuse inconnue.

Aussitôt, ses pensées concernant sa mort la rattrapèrent dans sa course parce que jamais elle ne pourrait effacer de sa mémoire ce jour fatal.

***

La journée s'était écoulée sans encombre. Ce n'en était qu'une parmi tant d'autres, sans rien de singulier. Emma rentra chez elle, puis fila dans sa chambre. Elle effectua quelques devoirs et de l'étude, les écouteurs dans les oreilles. La musique emplissait son esprit si bien qu'elle faillit ne pas entendre la sonnerie du téléphone lorsqu'Annabella téléphona chez elle.

Le Jugement du Diable - Tome 1 - La délivrance du malOù les histoires vivent. Découvrez maintenant