N.B : Qui es-tu ?

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          J'aimerais vous écrire que je ne suis personne.

En aucun cas je n'influencerais suffisamment mon environnement pour que je puisse un jour être satisfait de moi même, cependant, si je ne me voue à satisfaire quiconque et ne quémande à nul de me satisfaire, si un frais matin tu m'aperçois dévaler une pente comme si chacun de mes sauts me permettais de respirer les nuages ou bien, monter par deux les marches du métro, embarrassé par de lourds et inconfortables sacs, alors il m'arrive de rêver que mon sourire, mes larmes pudiques  , mon regard distrait te transmettent quelques émotions et que celles-ci influencent le fil de ta journée. Néanmoins , il me semble que nous soyons trop étanche à l'autre pour nous permettre de ressentir sa fièvre, son effroi, son tourment , son extase , sa sérénité.
Sans doute que ces frontières psychiques gardent nos âmes saines, ou bien, uniques actrices de nos sentiments.

Je suis paradoxale ; j'aimerais partager et me ressourcer de l'essence d'autrui - puisque je recherche vainement la mienne - mais ne peux expliquer mon malheur, car la parole est déesse de transmission et permet de lier quelques esprits.

J'ai peur.
Peur de persuader quiconque que la mort est une échappatoire sulfureuse, qu'il s'ensorcelle.
J'ai peur de charmer et de plaire, que l'on désir être plus proche de mon coeur que je ne le suis, et de mon corps aussi.
J'ai peur que dans un fantasme égoïste on veuille me sauvegarder, quitte à me priver de liberté, qu'on me serre entre des bras , qu'on m'emprisonne.

Lorsque je reconnais l'humanité de quelqu'un et ainsi sa complexité, je tente à m'éloigner dans un réflexe identitaire.
Est-ce que je pourrais me perdre dans un autre ? M'évanouir et ne pas me retrouver ?
Est-ce qu'il pourrait annihiler mes instants bien malheureux, extraire une partie de moi , ne sauvegarder que ma surface , que ce qu'il souhaite voir ?
Je veux connaître l'autre , suffisamment pour le comprendre , mais ne veux pas répondre à tous ses "pourquoi" parce que si ses questions curieuses sont motivés par un amour ou par une naïveté excessive , je pourrais bien briser davantage et atteindre une zone de son être dont il n'avait pas conscience.

"La mort est une maladie héréditaire, et sexuellement transmissible " écrivait Marc Vilrouge dans son roman poétique L'Herbe De Saturne.

Malgré ma réserve j'aime l'Homme, être proche de lui et apprendre de son optimiste. J'ai envie de respirer son air, de suivre ses pas, de danser sur ses chansons, de vibrer sous ses mots et de palpiter sous sa peau. Courir plus vite, crier plus fort, être là. Être vivante. Malgré mon enjouement je n'oublie pas que je préserve en mon sein un funeste dessein.

IndescriptiblesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant