28. Ça n'en valait pas le coup

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Il est proche de midi quand on arrive à l'Hôtel-Dieu, Franz et moi. On m'a laissé dormir plus longtemps que prévu. La faute à qui ? Je soupçonne un peu tout le monde d'avoir participé à cet oubli.

Pendant que je me la coulais douce dans mon lit, Jane a téléphoné. Nate a repris connaissance, parfaitement lui-même. Il n'est resté éveillé qu'une dizaine de minutes. Parce qu'il est toujours aux soins intensifs, je me demande si on me permettra enfin de le voir.

Ils ont intérêt !

Je suis si impatiente d'être dans la chambre cinq cent vingt-sept que je rate presque Patrick, le père de Nate. Il est assis dans les marches de l'entrée en conversation sur son portable. D'un geste il nous fait signe de l'attendre. ̶M̶e̶r̶d̶e̶ ̶!̶ ̶Je réfrène mon envie les planter là, mon frère et lui.

Mais je suis ailleurs.

Je n'en peux plus ! Nate pense-t-il à moi en ce moment, comme je pense à lui ? Est-il encore fâché contre moi ? Certainement pas, il doit dormir. Est-ce que ce fléau que j'ai attiré sur lui a servi à quelque chose ? ̶J̶e̶ ̶l̶'̶e̶s̶p̶è̶r̶e̶ ̶!̶

Tant pis si ce n'est pas le cas ! Ce qui compte, c'est qu'il soit vivant. J'ai eu tout le loisir d'imaginer un monde sans lui pendant ces affreuses minutes où on ne savait pas !

Franz serre la main de Patrick qu'il n'a jamais rencontré. La conversation s'engage. J'aurais dû faire les présentations. Un peu tard pour y penser...

- La condition de Nate s'est améliorée, d'après ce que j'ai pu comprendre ? commence Franz.

- Oui. Tout ses signes vitaux sont bons... explique-t-il à mon frère. Bonjour Haydn, me salue-t-il en m'embrassant, avant de me gratifier du même sourire à tomber que celui auquel son fils m'a habitué. On m'a dit que tu avais passé la nuit ici... Merci !

Sa présence est réconfortante.  Je suis heureuse de le revoir, mais aussi morte de honte alors je me contente d'un hochement de tête. Si seulement il savait !

- Si ça n'avait pas été de Jane et d'Annah, elle serait encore en train de harceler le personnel de l'hôpital ! ajoute Franz à moitié sérieux.

Me prenant de vitesse, il poursuit avec la question qui me brûle les lèvres depuis notre rencontre avec M. McLeister.

- Sait-on finalement ce qu'il a eu ?

- Pour l'instant, les médecins hésitent entre la syncope cardiaque et la crise d'épilepsie majeure, avec un penchant pour l'épilepsie. Ils vont y aller par élimination, poser un diagnostique différentiel. Il va y avoir beaucoup de tests avant qu'on puisse être définitivement fixés...

Mon frère attrape ma main et reste sans voix devant l'énormité de la nouvelle. J'inspire à fond mais ne dis rien. Ce n'est ni une syncope ni une crise d'épilepsie. Les spécialistes pourront chercher longtemps, ils ne trouveront jamais l'origine du problème !

Franz finit par dégeler.

- Nate est courageux, il passera au travers... Quoi qu'il arrive ! certifie-t-il.

- Oh, je n'ai aucun doute là-dessus ! approuve mon beau-père, rayonnant de fierté. Il est fort mon gars !

Mon silence a l'air normal dans les circonstances. Se méprenant sur les véritables raisons de mon mutisme, Patrick reprend :

- Allons... Nous surmonterons cette épreuve tous ensemble. Nate est chanceux d'avoir une fille aussi géniale que toi à ses côtés, Haydn !

DissonancesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant