PARTIE 11. LA MORT EST UN ADIEU QUI EST À UN DIEU*

36 5 0
                                    

Trois étés et trois hivers étaient venus puis repartis, depuis que l'âme de la petite Ashley Robinson avait retrouvé le chemin vers la paix. Pour ce faire, elle s'était servi de Shawn avec qui elle avait la capacité de ne faire qu'un, étant donné qu'il était doté du don. Elle avait projeté sa propre image dans les pensées de l'adolescent (comme elle l'avait déjà fait avec le souvenir de la cachette de la clé), puis elle l'avait utilisé comme lien de connexion pour atteindre celles de son père. Même si l'épisode surnaturel avait bien fatigué le jeune médium, cela en avait valu la peine.

Pour Alan Robinson l'illusion était celle d'une vision dans laquelle il parlait avec son enfant disparue, par une belle journée ensoleillée, au beau milieu d'un jardin fleuri qu'il connaissait bien. Pour tenir la promesse qu'il avait faite à sa fille durant ce phénomène paranormal, il réintégra ses fonctions à St Fortunat. Y compris ses activités bénévoles auprès de ses petits patients fragiles. Il était redevenu le doc et il vivait beaucoup plus facilement sa peine. Dès lors, lorsqu'il évoquait sa femme et sa fille, c'était pour faire part de bons souvenirs et d'anecdotes marrantes. Bien sûr elles lui manquaient, mais il savait qu'il les retrouverait un jour. Le moment n'était tout simplement pas encore venu.

En ce qui concernait Shawn, alors âgé de dix-sept ans, il était devenu un brillant jeune homme dont le choix de son orientation professionnelle, n'avait pas manqué de surprendre son entourage. Lui, qui depuis sa plus tendre enfance éprouvait une totale aversion pour les psychothérapeutes, avait opté pour cette voie. Il était passé par tellement d'épreuves, qu'il comprenait les maladies de l'esprit sans difficulté. Ayant été formé sur le terrain, il était plus à même que quiconque pour soigner ces maux complexes.

Un soir, tandis qu'il dessinait consciencieusement avec des écouteurs sur les oreilles dans sa chambre, (toujours dans la maison des Gray, avec lesquels il s'entendait parfaitement bien, désormais) ; la lumière de sa lampe de bureau vacilla. Puis, un courant d'air frais lui glaça instantanément les mains. Ça ne pouvait pas être Ashley puisqu'elle était partie. La fille du doc reposait en paix. Il se leva pour observer la pièce tout autour de lui et se rendit compte que la fenêtre était entrouverte.

- Quel con ! J'ai mal fermé la fenêtre et je m'étais déjà fait tout un film. C'est bon, Shawn, tous les phénomènes qui semblent un peu bizarres ne sont pas forcément surnaturels, pensa-t-il.

Comme il était minuit passé d'une bonne demi-heure et que la fatigue le prenait depuis un petit moment, déjà, il éteignit la lampe de bureau qui fonctionnait de nouveau normalement et alluma celle de la lampe de chevet. Jusque-là, passionné par son activité, il n'était pas parvenu à lâcher son crayon, mais pour le coup il ressentit si bien la fatigue qu'il ne prit même pas la peine d'enlever ses vêtements. Il se faufila sous ses draps et rejoignit les bras de Morphée en quelques minutes, seulement.

Ça ne pouvait être qu'un rêve, Ashley n'était pas réellement là avec lui en ce moment. D'ailleurs, elle n'avait plus cet aspect spectral mais elle possédait un corps solide comme tous les autres êtres vivants. En plus, ils étaient assis à la même table, l'un à côté de l'autre dans la même salle de classe. Cela n'avait vraiment pas de sens.

- Ashley, tu es revenue ? Qu'est-ce qui se passe ?

- J'aimerais que tu fasses quelque chose pour moi, Shawn. Je voudrais que tu me mettes en relation quelques instants, avec ma sœur bien-aimée qui est si malheureuse. J'ai besoin de lui dire au revoir.

- Mais tu n'as pas de sœur, Ashley.

Le décor se modifia et ils se retrouvèrent dans les couloirs de St Fortunat. Elle planta son regard un moment dans le sien avant de lui répondre, faisant ainsi durer le suspense.

Au-delà de toutes rancoeursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant