Chapitre 8.

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Je me suis enfuie sans un mot. Aucun son n'a précédé mon départ. Rien. Il fallait s'y attendre, en même temps. Pourquoi m'aurait-t-il retenu, après tout ? Et pourquoi aurais-je simplement voulue qu'il me retienne ? C'est moi qui ai voulu mettre fin à tout ça.

Je me suis recroquevillée au pied d'un muret, et me suis laissée allée. Je ne saurais dire combien de temps. Je ne sais même pas si les cours ont repris.

Personne ne c'est arrêté, personne ne m'a demandé si j'avais besoin d'aide, ce qui n'allait pas, si je voulais en parler... Tout simplement car tout le monde le sait. Tout le monde est au courant de cette rupture. Et tous semblaient d'accord : il fallait me laisser seule.

Turde n'était pas là, aujourd'hui, et je n'ai pas le courage d'allumer mon portable pour savoir si elle m'a textée, si elle est au courant... Mais à quoi bon ? Je ne veux pas en parler.

Une masse s'affale à côté de moi. Je ne prends pas la peine de relever la tête, trop intéressée à apprendre par cœur chaque imperfection d'une pierre que j'avais trouvée à mes pieds.

- Je suis désolée de t'avoir laissé seule aussi longtemps. Je pensais qu'il valait mieux que tu te retrouves un peu avec toi même pour... Réfléchir.

Il semble avoir pris une assurance depuis que je l'ai laissé au réfectoire. Comme si, à chaque fois, une personne devait être stable pour soutenir l'autre, qui est dans son pire état. Je ne réponds rien, ne bouge pas, ne pleure pas. Je suis aussi neutre que cette pierre que je tiens dans la main. J'aime bien, au final : caillou est un bon destin.

- Je t'ai ramené ça, tu dois avoir faim.

Sous mon genou, il fait passer un sandwich. Il m'apparaît, bien évident, dans le cocon protecteur que je m'étais crée entre mes jambes. Je ne le remercie pas, faisant preuve d'une impolitesse remarquable, mais je ne suis pas d'humeur à dire quoi que ce soit. Dieux, laissez moi me morfondre en paix. Et au mieux, transformez moi en caillou.

- Je suis désolé pour... Ce qui c'est passé. C'est en partie de ma faute.

- C'est pas de ta faute, grognais-je. Une relation qui débute par la haine est vouée à l'échec.

Je relève les yeux vers lui et il s'affale contre le mur un peu plus.

- C'est ce dont tu essaye de te persuader.

Je regarde devant moi et ne réponds pas. C'est si évident que ça ? Je le fusille du regard et lui assène un coup de coude dans les côtes, ce qui le fait pouffer.

- Mêle-toi de tes affaires !

Il rit à gorge déployée, et je lui redonne un coup de coude dans les côtes, mécontente.

- Enfoiré !

- Tu l'es toute autant que moi.

Il esquisse un sourire espiègle et ce mordille la lèvre inférieure comme pour réfléchir ou pour trouver ses mots.

- En vérité, je pense que tu as bien fait... Non pas que je voulais que tu rompes avec lui ! Du tout ! Mais... Mais tu ne mérite pas ça et... Enfin lui non plus...

Il s'emmêle rapidement dans ses paroles, et soupire, frustré.

- Je suis vraiment nul pour réconforter les gens...

Je souris franchement sous son regard désolé. Sans même le vouloir il a épongé dans sa simple maladresse mon désarroi, et son air soulagé ne me permet que de l'apprécier encore plus.

- J'ai deux choses à te répondre. Tu choisis laquelle ?

Son regard me sonde, curieux.

- La première, m'annonce-t-il joyeux.

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