Docteur qui ?

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Doctissimo... Je vois pas en quoi ça peut m'aider.
L'homme s'approche de moi.
"Ouuuh vous avez une petite mine...
- C'est l'ascenseur.
- Ah, ça a dû aggraver votre cancer.
- Pardon ?
- Vous avez un cancer des jambes. Et une thyroïdite aiguë.
- Hein ?"
Il me faut un moment de réflexion pour comprendre que je ne suis pas en danger de fauteuil roulantage imminent. Tout ça n'a aucun sens, pas étonnant vu là où on est...
"Comment doit-on vous appeler ? Docteur...
- Juste Docteur. Je suis le Docteur.
- C'est du plagiat ça."
Il ignore ma réponse et part fouiller dans un tiroir de son bureau. Il commence à jeter des papiers tout autour de lui avec enthousiasme au fur et à mesure qu'il les passe en revue. Bientôt le sol du bureau se couvre de feuilles blanches et de radiographies de différentes parties du corps humain et animal, et même d'objets visiblement vivants. Je ramasse une radio d'une lampe torche qui laisse voir des organes à la place des piles et un cerveau là où devrait se trouver l'ampoule.
"Qu'est-ce qu'il fait ? Il nous a oubliées ?
- Non non je lui ai expliqué la situation. Il cherche un papier important.
- Tu lui as rien dit !
- Il en a pas l'air mais il est très intelligent.
- Je dirais plutôt surhumain à ce niveau là.
- Mais il n'y a pas d'humain ici.
- TA-DAAAA !"
Le Docteur brandit un papier ne comportant en tout et pour tout qu'une phrase écrite en tout petit à la première ligne.
Il nous fait signe de le suivre.
Il sautille dans les couloirs tandis que nous le suivons et que je comprends de moins en moins ce qu'il se passe. Nous arrivons dans un immense hall aussi blanc que le reste du lieu. Le plafond est si haut qu'il se perd dans une brume opaque au bout d'une dizaine d'étages. De chaque galerie partent d'autres couloirs, et des centaines d'entités en blouses blanches s'affairent en donnant à l'ensemble un air de ruche futuriste.

Le Docteur s'approche d'une sorte d'accueil situé au centre du hall. Il arrache un micro des mains d'une des cinq pauvres secrétaires.
"Mes chers amis, j'ai une annonce sans précédent à vous faire. Cette charmante jeune fille ici présente... Je ne sais pas son nom, doit aller aux Grands Centraliseurs dans les plus brefs délais. J'ai besoin de quelques volontaires pour l'accompagner sur cette route périlleuse."
Les entités se retournent, me regardent un instant et reprennent leurs activités en grommelant.
"Les sympathiques volontaires obtiendront une consultation gratuite ainsi qu'une ordonnance dédicacée par nul autre que moi."

À ces mots, tous se précipitent vers nous, et je remarque aussi un bon nombre de patients parmi eux.
Seuls cinq d'entre eux restent en retrait et semblent s'en battre totalement les steaks.
"Eh vous là ! Les cinq insensibles à mon charme ! Vous avez probablement le sida !"
Ils se retournent et le regardent d'un air stupéfait et outré. Contrairement à la plupart des autres, leur apparence est assez normale. Enfin, selon les critères de cet endroit. J'arrive à les voir grâce à l'espace que les groupies ont ouvert au regard du Docteur Joli cœur.

Un garçon d'une douzaine d'années habillé de la manière la plus basique qui soit, jean-t-shirt-baskets, et avec une casquette fluo à motifs géométriques. Il arbore l'air le plus blasé possible.

Une jeune fille toute mimi avec de beaux cheveux blonds ondulés, un chemisier blanc à petites fleurs trop choupi, une jupe bien repassée, des chaussures vernies et des chaussettes blanches à rubans. Tout ça respire la mignonitude. Naturellement, elle rougit.

Un jeune homme dans la vingtaine taillé comme une asperge, châtain avec une mèche bleue, un embryon de barbe sur le menton et un air complètement paumé. Il porte un t-shirt Legend of Zelda et un jean déchiré, visiblement pas pour le style.

Un petit muffin au papier violet avec des yeux, une bouche et des cure-dents en guise de bras et de jambes.

Et un chaton gris qui se lèche délicatement le pelage.

Ils approchent lentement, aussi perplexes que moi.
Le Docteur s'avance et les pousse vers nous avec un sourire trop large pour être sincère.
"Bon, maintenant vous avez votre escorte ! L'un d'eux doit bien savoir comment y aller ! Ah, j'oubliais. Le docteur Ezra ici présent va venir avec vous. Vous lui trouverez sûrement une utilité, contrairement à moi. Sur ce, j'ai du travail. Bonne chance."

Il tourne les talons et s'engouffre dans un des couloirs, disparaissant dans cette blancheur si pure que les formes se confondent.

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