Chapitre 3: Amis

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Atlas pénétra dans le café sans réfléchir à ce qu'elle faisait. Elle repensait à Liza, Amy, Nyss, Shake et Pria... Ses souvenirs d'enfance se mêlaient aux odeurs des boissons et des cappuccinos que l'on versait dans les tasses. Elle se souvenait des soirées passées à lire au coin du feu avec Hana, des bols de thé qui brûlaient les doigts et des histoires racontées. Atlas chercha distraitement ses amis du coin de l'œil et finit par les repérer, assis à une table non loin et se lançant des regards meurtriers. En s'approchant, la jeune femme n'eut aucun mal à en deviner la raison. Le regard de sa meilleure amie s'éclaira en l'apercevant et elle s'approcha d'elle pour lui faire une accolade.

- Je t'en prie, Atlas, marmonna Hana d'un ton direct, dis à ton frère monsieur le génie que non, Stark n'est pas un dieu!

Atlas eut un éclat de rire en voyant l'air consterné de son amie et la flamme dans ses yeux. Hana était la personne la plus merveilleuse qu'elle connaissait. Elle avait des cheveux châtains clairs coupés courts, un sourire éclatant et plein de malice et des yeux dorés où brillait un feu de liberté et de malice. Elle avait la peau constamment bronzée et un rire si éclatant qu'il entraînait ceux des autres avec lui. Hana était brillante, d'une intelligence terriblement prononcée qui lui avait valu la place d'assistante d'Ewen Kamer à l'âge de 21 ans. Atlas avait soutenu que Kamer était probablement un quarantenaire pervers pour avoir engagé une jeune et belle assistante. Chaque fois qu'elle le prétendait, Hana avait un sourire énigmatique mais ne pouvait pas nier car elle était contrainte de garder l'identité et l'apparence d'Ewen secrète.

Duncan maugréait, en retrait, fusillant Hana du regard. Duncan était lieutenant et sa carrure le faisait savoir. Sa mâchoire carrée cadrait parfaitement avec sa silhouette musclée, ses bras épais et sa mine d'insensible. Mais sous son apparence de brute, Atlas avait appris à déceler la douceur du jeune homme qui était démontrée par de multiples petites attentions invisibles au premier abord: la façon dont il ébouriffait ses cheveux blonds d'un air gêné, la manière dont ses grands yeux gris étaient concentrés sur son interlocuteur, à l'écoute. Son parfum fruité et ses rares sourires sincères. Atlas était sa sœur adoptive et celle qui le connaissait le mieux. Au collège, lorsque chacun la fuyait à cause de la réputation de ses parents, lorsque certains qui avaient repéré sa timidité maladive et son extrême pâleur, lorsque même Hana était devenue impuissante à l'aider, c'était Duncan qui avait prit sa défense. Duncan qui avait menacé ceux qui s'en prenaient à elle, qui les avait dissuadés de recommencer.

Leurs disputes cachaient tout autre chose, Atlas en était persuadée. Il avait remarqué les regards gênés que Duncan lançait à Hana et les rougissements que ceux-ci engendraient. La journaliste était persuadée qu'ils finiraient par se déclarer leur flammes mutuelles, qu'il suffisait d'un peu de patience pour faire d'eux un couple parfait. Mais un désaccord puissant régnait entre eux, les divisant toujours un peu plus: leurs convictions politiques opposées. Hana qui était courageuse, audacieuse et une aventurière hors pair ne rêvait que de la surface. A l'inverse, Duncan qui était discipliné et obéissant ne songeait qu'à en interdire l'accès. Quant à elle, Atlas ne savait que faire. Elle savait que si ses parents avaient étés présents, ils lui auraient soutenu que la liberté valait le risque, qu'il fallait explorer la surface. Après tout, Andrew Kamer était leur ami. Mais traumatisée par la mort de ses parents, elle avait juré de toujours choisir la sécurité. Il n'y avait en Atlas rien de brave, de courageux. Elle avait peur la nuit, dans le noir. La journée, dans les ombres de la maison. Elle était nostalgique. Repensait toujours aux moments les plus douloureux, les plus traumatisants. Elle ne savait pas être heureuse. Atlas avait toujours envié le courage inébranlable d'Hana, mais elle savait au fond d'elle que ses "circonstances atténuantes" avaient créées un traumatisme que rien ne saurait briser.

Elle leva la tête vers sa meilleure amie avec un sourire.

- Je vous ai déjà dit que je détestais ce débat. Vous ne pouvez pas passer cinq minutes en tête à tête sans avoir sans cesse envie de vous égorger à ce sujet?

Hana eut un sourire d'excuse et elle échangea un regard appuyé avec Duncan qui se tourna vers Atlas.

- Ok, on va arrêter si ça t'embête, n'est-ce pas Hana?

Hana acquiesce.

- Merci. En plus, j'ai quelque chose d'important à vous annoncer. déclare Atlas d'un ton malicieux

- Laisse moi deviner, s'exclame Hana, tu sors avec quelqu'un? Il est beau? Comment il s'appelle?

- Et si tu laissais parler Atlas, Hanie? murmure Duncan d'un ton apaisant.

Hana rougit.

- Oui, bien sûr, pardon...

Atlas lui lance un sourire et la serre dans ses bras: sentir l'odeur de son parfum donne immédiatement à la jeune femme l'envie de sourire.

- Je vais interviewer Ewen Kamer. annonce-t-elle du ton le plus détaché possible afin de profiter au maximum de la stupéfaction de ses amis

En effet, Duncan s'étouffe avec son jus de cranberry et se mets à hoqueter tandis que Hana pousse un petit gloussement surexcité.

- Excellent! Tu vas rencontrer Ewen! Je pourrais enfin te parler de lui plus en détails... s'exclame-t-elle avec un air gourmand

Atlas dissimule un sourire irrépressible vite interrompu par l'expression de fureur qui s'affiche sur le visage de Duncan.

- C'est hors de question! Atlas, je t'en prie, tu es complètement folle, tu ne peux pas faire ça. C'est de la faute de cet homme et de son père si tu es orpheline, tu l'as déjà oublié? Bordel Atlas, il ne faut pas...

Le désespoir se lit sur son beau visage. La jeune femme se sent aussitôt terriblement coupable de déformer un tel être de douleur et à la fois en colère qu'il l'accuse de la sorte. Un combat acharné se livre en elle, combat vite remporté par sa rage.

- Bien, si tu penses ça de moi je suppose que je n'ai rien de plus à te dire.

Et c'est avec une expression de rage et de douleur qu'Atlas disparaît, son téléporteur à la main, son visage blafard tourné vers l'avenir: elle a fait son choix.

SouterrainsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant