Chapitre 19 : Les âmes

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Ou comment avoir à ses côtés un pote ayant la puissance de destruction d'une arme nucléaire et se rendre compte que l'insulter n'était peut-être pas la meilleure technique de survie

Un battement de paupières plus tard et c'est déjà terminé. Les deux sentinelles sont étendues sur le sol, face contre terre, main serrant toujours leur arme. Ils n'ont pas eu le temps de souffrir. Tout s'est terminé avant même qu'ils aient pu prendre conscience de ce qui leur arrivait.

Même Rash a eu du mal à suivre les mouvements pourtant pas forcés de Zashanö. Il se surprend à se demander comment il avait pu battre un tel guerrier. Plus qu'un guerrier même, un Assassin, exactement comme lui.

Le frère d'âme lui répond d'une pensée :

J'ai beaucoup progressé depuis la dernière fois que nous nous sommes rencontrés.

Il sourit puis ajoute :

Et il faut dire aussi que tu me plaisais quand tu m'as découvert. J'admirais ton potentiel et c'est avec toi que je voulais vivre mes aventures.

Cette révélation fait sourire Rash à son tour. Il supposait que Zashanö s'était un peu laissé faire lorsqu'ils avaient dû se battre la première fois, mais c'est la première fois que son arme lui confirme cette impression.

« Bon, tu me détaches ou tu restes là à me regarder ? »

L'âme ne se le fait pas dire deux fois et d'un coup de dague bien placé coupe les fers de Rash. Ce dernier prend un moment pour masser ses poignets endoloris. Des marques rouges sont apparues, lui tirant sur ses muscles à chaque mouvement.

Pendant ce temps, Zashanö, d'un grand coup de pied fait voler en éclats la porte en bois menant vers la sortie. Aucun autre soldat se trouve de l'autre côté. C'est une bonne chose –pour les gardes qui auraient pu croiser leur chemin.

D'une pensée, l'entité et le mage décident de partir à la recherche de Rose et de Nosikä, et par la même occasion, de trouver l'emplacement de leurs armes et vêtements. Car ceux que porte Rash en ce moment ne sont pas des plus pratiques pour voyager, et encore moins pour se battre. Ils sont d'une matière dure et pas du tout élastique ce qui retient tous ses coups et l'empêche de se mouvoir tranquillement. D'un autre côté, il est assez logique que les Orkes ne les vêtissent pas d'habits confortable, pense Rash d'un œil amusé.

Ils remontent les escaliers et retrouvent dans le dédale de couloirs et de passages, le chemin qu'ils avaient emprunté à l'allé...

De retour à leur précédente cellule, Rash s'étonne de ne pas y trouver Rose. Une panique incontrôlable le gagne. Sa moitié s'est faite transférée dans un autre endroit. Ou pire, s'ils n'avaient pas besoin d'elle, ils l'ont surement déjà tuée.

Il s'effondre dans le couloir face au dernier endroit où il a vu sa bien-aimée et les larmes, pourtant rares chez les Elf, se mettent à couler. Il perd espoir. Rien ne lui permet de retrouver sa trace et il n'est pas en état de réfléchir correctement.

Mais Zashanö, plus expérimenté, prend les choses en main. Il n'est peut-être qu'une projection magique de sa véritable essence, mais il peut quand même savoir où trouver sa forme matérielle dans le monde réel. Il ferme les yeux un instant et tente de visualiser le paysage qui se trouve aux côtés des poignards. Des formes vagues et indistinctes lui apparaissent. Après un moment de réflexion, il se tourne vers son maître. Il sait quel chemin prendre.

« Rash, nous devons y aller. Je sais où me récupérer. L'arc Nosikä est au même endroit, ça veut dire que si nous devons les retrouver ce sera là-bas, elle va finir par comprendre q Aller, lève-toi. »

Rash n'entend qu'un bourdonnement familier. La voix de son arme paraît comme lointaine et incompréhensible. Il se laisse tirer vers le haut et se faire porter par Zashanö –du moins, il suppose que c'est lui. Ils parcourent quelques mètres avant de finir par s'arrêter. Il ne pleure plus, c'est la colère qui a remplacé sa tristesse. Une colère sourde, muette et aveugle, qui ne laisse rien d'autre passer. Il laisse cette émotion curieuse prendre le dessus sur sa raison. Les Orkes vont payer pour ce qu'ils ont fait à Rose.

Et ils paieront par le sang.

Il se relève, tremblant d'une énergie impure. Sa magie répond parfaitement à ses désirs. Il récupère sa tenue d'Assassin, jetée prestement sur une table d'une salle d'armes –probablement là où se retrouvent les sentinelles après leur service– juste à côté de ses poignards, mais l'arc à disparu. Apparemment, Rose est déjà passée par ici. Après s'être changé, il tend une main vers ses armes. D'un froncement de sourcil, les deux armes volent vers leur maître. L'Assassin les saisit d'une main ferme et les glisse dans le même mouvement dans les plis créés pour la circonstance de son habit fraîchement retrouvé.

Pendant tout ce temps, Zashanö se tenait juste à côté de son allié. Il ne bougeait pas, mais quand Rash prend les dagues, il pose une main sur son épaule et lui glisse :

« Je te servirais jusqu'à ma mort, prononce-t-il dans un souffle, mais n'oublies pas pour quoi tu te bats. »

Rash se dégage doucement mais fermement de l'emprise de son jumeau. Mais ce dernier ne renonce pas pour autant.

« Souviens-toi de la dernière fois que je t'ai laissé utiliser une partie de mes véritables pouvoirs, tu n'as pas su les dominer entièrement et tu as failli y rester. Je te demande juste d'être prudent, pour ton propre bien. »

Rash finit par regarder dans les yeux son arme. Il comprenait les conseils de son ami mais ne pouvait laisser impuni les crimes de cette race barbare. Sa décision est prise. Il hoche la tête et libère sa magie. L'aura dorée, étincelle aux côtés de son utilisateur, apparaît autours du mage pour s'infiltrer dans son corps, répondant à l'appel.

Zashanö se fait plus translucide, son esprit ne peut pas rester pour toujours dans ce monde, et il doit économiser ses forces pour rester aux côtés de Rash pendant sa vengeance –car c'est bien de cela dont il s'agit.

L'homme ouvre sa main et laisse échapper un nuage d'un noir qui semble absorber la lumière. Il se place devant son maître et l'averti une dernière fois :

« N'oublies pas qui tu es, Assassin. »

Puis plonge sa main dans le corps de Rash. La fumée se répand dans le corps du magicien à la vitesse de l'éclair. Immédiatement, son aura change pour un noir plus sombre que la nuit elle-même.

« Et surtout, ne renie pas qui tu es. Ne renie pas ta magie. Arrête de te cacher derrière cette couleur jaune. Accepte-moi où tu n'arriveras jamais à manipuler mes pouvoirs. »

Rash vient de recevoir une partie d'un pouvoir qu'il ne comprend même pas. Il avait fait appel à sa magie et voilà que Zashanö lui insère cette flamme noire dans la poitrine. Elle se met à grandir, et à remplacer sa propre magie. Non, c'est encore plus beau que ça, elle se combine à sa propre magie, réveillant quelque chose qu'il avait chassé de lui il y a bien longtemps. Le noir revient, la couleur de Zashanö. Sa couleur. Comment a-t-il pu l'oublier ?

Il retrouve son côté maléfique. Son autre personnalité. Le véritable Ecichaa. Le véritable Assassin.

L'AssassinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant