Jamais séparés

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Mon réveil sonne pour la troisième fois depuis ce matin. Il est 7h37. Je crois que, cette fois-ci, je ferai mieux de me lever si je ne veux pas finir vraiment en retard. Je me redresse, m'étire puis attrape mon téléphone. Je regarde rapidement les actualités et, voyant qu'il n'y a rien de bien intéressant, je me lève et ouvre mon dressing. Aujourd'hui au programme : rien de spécial. Comme hier. Comme avant-hier. Comme avant-avant-hier. Et comme il y a deux semaines en fait. Je m'habille donc très simplement; un polo bordeaux, un jean, des bottines et une veste noirs conviendront parfaitement. Je descends les escaliers et arrive dans la cuisine. Thomas et mes parents sont déjà levés.

- Enfin ! Je commençais à penser que je devais venir te réveiller ! s'exclame mon père.
- T'inquiète, je gère, affirmé-je.
- Tant mieux. Bon alors, j'ai le droit à mon bisous du matin aujourd'hui ? me demande-t-il.
- Si j'avais dix ans, je t'aurai dit oui et je serais venu te faire un gros bisous baveux, dis-je. Mais là, je vais plutôt me contenter de me presser une orange, ajouté-je en me munissant du fruit en question.

J'entends Thomas pouffer de rire. J'imagine que papa doit faire une sale tête. Je souris fièrement et attrape un verre dans le placard.

- Se pourrait-il que ma fille préférée se soit levée du pied gauche ce matin ?
- Papa, je suis ta seule fille, lui rappelé-je en riant.
- Cela ne veut pas dire que tu n'es pas ma préférée, répond-il.
- Eh ! intervient Thomas en riant. Sympas !
- On rigole Thomy chéri, dis-je. Et pour répondre à ta question papa, non, je ne me suis pas levée du pied gauche.
- M'appelle pas comme ça ! me dit mon frère.

Je me contente de lui faire mon plus beau sourire, puis je regarde ma mère; elle observe la scène en riant. Je jette un coup d'œil à mon portable; j'ai encore du mal à me faire à l'idée que je ne vais plus recevoir de message de la part de Marck avant longtemps...
Chassant ce souvenir de mes pensées, je bois quelques gorgées de mon jus d'orange puis attrape un morceau de pain que je recouvre de confiture. Je termine rapidement de déjeuner puis débarrasse la table.

- Tu veux que je te dépose au lycée, Alyson ? me demande papa.
- Non, je vais y aller avec ma voiture. Mais, c'est gentil de proposer, répondé-je.
- D'accord. Bon, par contre Thomas dépêche toi on va y aller !
- Ouais, ouais.

Mon frère est rentré en classe de cinquième il y a deux semaines. On peut dire qu'il n'est pas du genre "scolaire" : il va en cours seulement parce qu'il n'a pas le choix. Il préfèrerait largement rester toute la journée à la maison et jouer aux jeux vidéos. Ce n'est pas un élève perturbateur pour autant, il respecte les limites imposées; en revanche, je ne peux pas en dire autant de ses amis. De mon côté, je viens d'entrer en terminale. Je me considère comme une élève moyenne; j'ai de bons résultats dans certaines matières, des moins bons dans d'autres. Je n'ai pas toujours un comportement irréprochable, mais je suis loin d'être la pitre de la classe.
Je monte dans la salle de bain, me brosse mes cheveux bruns naturellement ondulés. Je me lave les dents et me maquille : un léger trait de crayon noir sous les yeux et du mascara noir afin de mettre mes yeux noisettes en valeur. Je cherche à être un minimum présentable; et à ne pas ressembler à un zombi dépressif. Je retourne dans ma chambre, attrape mon sac à main dans lequel je range toutes les affaires dont j'aurai besoin aujourd'hui. Je veille à ne pas oublier ma carte de cantine ni mes clefs de la maison. Il est 8h08. Les cours commencent à 8h15; je ne vais pas tarder à partir.

- Tu finis à quelle heure Thomas ? demandé-je en arrivant en bas des escaliers.
- A 17h30; et toi ?
- 17h00. Je passerai te chercher si tu veux, ça t'évitera de prendre le bus. Papa fini tard et maman a un rendez-vous chez le coiffeur.
- D'acc, ça marche. A ce soir.

Les deux hommes de la famille quittent la maison. Je rejoins ma mère qui se trouve dans la salle à manger.

- Bon, commencé-je.
- Comment tu vas ? me coupe-t-elle.
- Bien.
- Tu es sûre ?
- Je m'en remets, affirmé-je en détournant le regard, sentant les larmes monter.

Maman me regarde un moment mais n'insiste pas. Intérieurement, je la remercie. Je la salue, me dirige vers l'entrée et claque la porte. Je monte dans la voiture que mes parents m'ont offerte il y a deux mois, pose mes affaires sur le siège passager et mets le moteur en marche.
Je prends quelques minutes pour observer l'ancienne maison des Wisley. Comme elle parait triste les volets fermés, les mauvaises herbes montant le long des murs... Le vieux couple a déménagé quelques mois auparavant. Ils affirmaient être très vieux et voulaient se rapprocher de leurs familles respectives... C'est dommage, leur bonne humeir quotidienne me manque déjà...

****

Comme chaque jour depuis deux semaines, je souhaite croiser Marck le moins possible. Le gros point positif, c'est qu'il n'est pas dans ma classe. Le gros point négatif; c'est que nous sommes dans le même lycée. J'aperçois de loins mes amis; enfin; disons que je les entends d'abord. Comment ne pas reconnaître les voix et les rires de mes imbéciles préférés ? Cela dit, lorsque je m'approche d'eux, tous se taisent.
J'avance d'abord vers Jeremy pour lui dire bonjour. C'est un grand blond aux yeux verts, c'est un vrai coureur de jupons, il faut le dire; mais avec moi, il n'a jamais rien tenté, enfin, jusqu'à maintenant... Il me regarde droit dans les yeux pendant quelques secondes qui me paraissent durer des heures. Je fronce légèrement les sourcils puis fais la bise à Emilie; une fille plutôt discrète qui s'entend presque avec tout le monde. C'est la cousine de Jason. Lui, il habite dans la même rue que moi; je l'ai rencontré quand j'avais neuf ans lors d'un repas entre voisins organisé par les Wisley. Il est très gentil. C'est un grand sportif; clairement, le sport, c'est sa passion.
Je sourie à ma meilleure amie et lui fais la bise. Caroline est tout simplement fantastique, elle a été ma première amie ici, on est sur la même longueur d'onde. Sa maison est presque en face de la mienne, nous passons nos vies l'une chez l'autre. Cette fille est magnifique.
Je termine par saluer Austin, un brun aux yeux noisettes, qui est de loin l'ami le plus compréhensif et loyal que j'ai; et son acolyte Evan, qui physiquement lui ressemble beaucoup; mais qui est un vrai pitre.

- Ok, qu'est ce qu'il se passe ? demandé-je à mes amis, voyant qu'un lourd silence inhabituel règne ici.
- Rien t'inquiète poulette, me répond Evan.

Je lève les yeux au ciel et souris malgré moi. Mon premier cours de la journée est mathématiques. Caroline, Jason et moi nous rendons au quatrième étage du lycée tout en discutant. Les autres sont dans une autre classe. Notre ami rejoint ses camarades de l'équipe de foot tandis que Caroline et moi nous installons à une table en attendant le professeur.

- Alors ?
- Quoi alors ? répondé-je du tac-au-tac.
- Bah... Comment tu vas ?
- Ma mère m'a posé la même question; et je te donnerai la même réponse Caro; ça va.
- Ecoute Alyson, je ne suis pas née de la dernière pluie d'accord; quatre ans de couple, ça ne s'oublie pas comme ça...
- La preuve que si, répondé-je froidement. Je m'en suis remise.

Elle ne répond pas tout de suite. Je profite de ce silence pour sortir mes affaires et reprendre mon calme.

- Tu savais que ton frère s'était déjà remis en couple ?! demandé-je en me redressant.
- Qui ?
- Bah ton frère ! T'en as pas trente-six des frères...
- Ah ! Oui !
- Non mais sérieusement, ça fait à peine deux semaines qu'il m'a quittée, et il est déjà avec une autre.
- Tu sais, Marck a toujours été comme ça..
- Oui, mais quand même j..
- Je croyais que tu t'en étais remise !? me coupe-t-elle.
- C'est le cas, répondé-je.
- Bon, pour changer je sujet; commence mon amie en se levant et en parlant un peu plus fort; un sourire aux lèvres.
- Pour changer de sujet, asseyez-vous et veuillez sortir vos affaires mademoiselle Gilbert, l'interrompt alors monsieur Jones, notre professeur de mathématiques.
- Bien sûr, répond-elle, mal à l'aise.

Je souris à mon amie tandis qu'elle reprend sa place à mes côtés. Que la journée commence.