"Biiip!!!Biiip!!!Biiip!!!". Ce son strident parvint sans mal à me tirer de mon sommeil. Je soulevai alors ma main -- elle me parut si lourde, comme gorgée de fatigue -- afin d'atteindre mon réveil. J'ai appuyé dessus avec insistance jusqu'à ce que la sonnerie cesse et me suis levée tout en gardant les yeux clos. Je filai sous la douche où, chaque matin, l'eau brûlante heurte violemment ma peau endormie. Quand j'en fus ressortie, je jetai un coup d'œil à la pendule : 7h30 ! Ça y est je suis en retard!! J'attrapai alors un large pull en cachemire bleu marine, un jean slim ainsi qu'une paire de basket et un chewing-gum. Je dévalai les escaliers, saisis mon manteau d'une seule main et me précipitai vers la porte, quand j'entendis Helen crier derrière moi :
-- Petit déjeuner!!!!
Je stoppai net et entamai alors une marche arrière en direction de la table et m'emparai d'un toast préalablement beurré et m'exclamai à mon tour:
-- À tout à l'heure !!
J'ai claqué la porte et débuté ma course jusqu'au lycée. Sur le chemin, je croisai Mélissa, une fille de ma classe avec qui j'ai l'habitude de partager mon trajet. On se correspond assez bien, elle et moi, on se salue brièvement et sans bruit quand on s'aperçoit, et nous gardons le silence jusqu'à notre arrivée. C'est étonnant que l'on s'entende bien, car elle n'est pas comme moi, elle est sociable, amusante, jolie et sympathique mais le matin, elle s'adapte, pour moi. On se tait et seule notre présence nous suffit... C'est comme un lien invisible ou des ondes qui traverse nos deux corps, comme si notre conversation muette se résumait à marcher ensemble.
À la seconde où nous pénétrâmes dans l'enceinte du lycée, la sonnerie retentit et nous nous dirigeâmes vers notre salle de classe. Nous avons déboulé dans la pièce bruyante et surchauffée même pour le temps hivernal. Je m'assis aux côtés de Mélissa au second rang, quand deux adolescents entrèrent à leur tour, main dans la main. L'un d'entre eux, grand, blond et avec des tâches de rousseur, balaya la pièce du regard d'un air satisfait. Il avait une démarche assurée et décontractée, tout en lui laissait transparaître son bien-être et son aise. La deuxième était elle aussi blonde mais elle ne ressemblait en rien à son compagnon, les traits de son visage étaient tirés et déssinaient sur sa figure une expression de sévérité et de sérieux. Les muscles bandés, elle progressait, la mâchoire serrée. Sa chevelure était nouée en une longue et fine tresse et lui donnait un air stricte. Enfin pour peaufiner son image, elle observa la foule avec un regard hautain.
Ces deux derniers, ayant effectué une entrée fracassante, s'installèrent juste devant nous, et le professeur, M.Lewis, entra en soufflant bruyamment et en haletant. Il jeta avec un grand bruit, son cartable sur son bureau et entâma avec difficulté son discours quotidien:
-- Bonjour à tous, veuillez excuser mon retard, cela ne se reproduira plus. J'espère que chacun a passé un excellent, formidable, incroyable ou encore un fantastique week-end.
Aujourd'hui est une journée un peu spéciale, puisque nous accueillons avec plaisir deux nouveaux élèves: Irina Dinov et Ezek....Ezakil...
-- C'est Ezekiel, Monsieur, a coupé le garçon en se levant silencieusement, mais tout le monde m'appelle Zeke...
Il sourit alors à toute la classe avec un sourire éclatant qui en fut presque ridicule.
-- Tenez, M.Dinov, venez donc vous présenter devant la classe... suggéra M.Carlois en reprenant son souffle.
Zeke se déplaça donc jusqu'à l'estrade située juste devant le tableau. Après une respiration qui se voulait théâtrale, mais qui n'en fut que plus embarrassant, il commença son récit :
-- Salutations! Je m'appelle Ezekiel Dinov. Tout d'abord, c'est un honneur d'arriver dans un lycée aussi chaleureux et prestigieux que le vôtre, ma sœur jumelle et moi sommes d'origine russe, mais nous arrivons tout juste de Los Angeles...Il avait prononcé cette dernière phrase avec un accent que l'on aurait pu croire exagéré, et en appuyant sur les deux derniers mots. Puis, il réajusta une mèche de ses cheveux brillants d'une manière si grotesque que je dus étouffer un éclat de rire. Attendez... il qualifiait notre médiocre établissement de "prestigieux" ?
-- Nos parents sont décédés 2 ans auparavant, nous logeons donc seuls dans un studio non loin d'ici et sommes actuellement à la recherche d'un colocataire agréable, responsable et surtout qui participe aux tâches ménagères ! a-t-il continué en pointant un index vers le plafond.
En me retournant, j'aperçus la totalité des filles de la classe la bouche entrouverte, papillonnant des paupières devant la pseudo "beauté" de notre nouveau camarade. Je poussai alors un soupir d'exaspération.
-- Bien, je vous remercie Zeke... s'empressa d'ajouter M. Carlois en essuyant la sueur qui perlait sur son front.
Malgré cet événement inattendu, le professeur put donner son cours de mathématiques sans encombres. Quant à Irina, elle n'avait prononcé un mot de la matinée et semblait vivre sur une autre planète bien que son regard perçant lui donnât un air si alerte que je n'osais la regarder dans les yeux.
Son frère s'exprimait toujours à sa place. Elle ouvrait de grands yeux à chaque fois que l'on prononçait son nom. Tout ceci m'intriguait mais après reflexion, je me suis convaincue qu'elle ne comprenait sans doute pas notre langue.Après une journée normale, je me hâtai de rentrer chez moi (seule) afin de décompresser au bord de MON lac.
Je l'ai toujours vu comme une propriété privée, du moins, durant l'hiver. Celui-ci est si calme, si désert, durant cette saison tant redoutée par la majorité des habitants d'Alvarado.
Je passai la tête dans l'ouverture de la porte d'entrée de la maison, attrapai mon vieux plaid et courus en direction de la rive. Je sortis avec précaution mon carnet de mon sac à dos et commençai à écrire. À mon immense surprise, l'inspiration me manquait...
Je m'efforçai de chercher un sujet d'écriture, mais rien... Rien ne traversait mon esprit...
Habituellement, plein d'idées et de ressources qui me parviennent rien qu'en m'asseyant sur la rive déserte, mais aujourd'hui...
Je restai, ici, à réfléchir pendant ce qui me parut une éternité. J'avais la coutume de m'abandonner à des personnages fictifs, mais aujourd'hui aucun d'entre eux ne m'intéressaient. Je décidai donc de rechercher dans mon histoire personnelle. Mon journal d'écriture devint ainsi mon journal intime. Tout ce que je n'avais jamais osé prononcer à voix haute depuis la mort de mes parents apparaissait sur ce papier jauni par le temps et les éclaboussures d'eau. Ma main ne s'arrêtait pas et mon écriture penchée remplissait à présent une bonne douzaine de pages. Je sentis alors un grand soulagement, un poids se retira, un poids, qui, il me semble, a toujours été là, posé sur mon coeur ou mon estomac j'étais désormais incapable de préciser. En repensant à tout ce qu'il m'est arrivé, je sentis les larmes me monter aux yeux, lentement, doucement, prêtes à couler. Des larmes froides, si froides, glacées.... Glacées ??
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De glace ou de feu
FantasíaAmbre, 16 ans, semblait enfin avoir repris sa vie en main, 3 ans après la mort de ses parents. Elle habite désormais chez sa grand mère dans le Minnesota. Mais un matin d'hiver, une curieuse légende racontée pendant son enfance parut prendre tout so...