Le lendemain matin, mon réveil sonna, comme à son habitude. Ce son strident et aigu résonnait dans mes oreilles. Après quelques minutes, durant lesquelles je priais pour que cette sonnerie fasse entièrement partie de mon imagination, je me levai de mon lit à baldaquin, la couverture enroulée autour de mes maigres épaules, pour conserver la chaleur des draps sur ma peau blanche.
Alors que je me dirigeai vers ma salle de bain en traînant les pieds, la porte s'entrouvrit pour me laisser voir à travers mes paupières mi-closes, le visage de ma grand-mère qui souriait faiblement.-- Bonjour ma chérie... Étant donné les circonstances quelques peu...
Elle marqua une pause en posant ses doigts sur son menton, comme si elle cherchait un mot approprié pour définir notre étrange situation. Mais finalement elle dit:
-- Spéciales... Il serait préférable que tu n'ailles pas au lycée aujourd'hui, j'ai plusieurs petites chose à te révéler... me confia-t-elle en passant une main hésitante dans son épaisse chevelure argentée.
A cet instant précis, je lâchai ma couette d'un seul coup et courus vers elle afin de l'enlacer tendrement. Je déposai un doux baiser sur sa joue et m'exclamai avec une voix enrouée:
-- Tu es la meilleure, Helen!!!!!! JE-T'-ADORE!!! Merci, merci,merci!
Elle esquissa un sourire discret en me voyant réagir de la sorte.
-- Je te signale jeune demoiselle que ceci est entièrement à cause des événements récents, me prévint-elle en pointant un doigt sur ma poitrine. Dès que tu sauras tout ce dont tu as besoin de connaître, tu retourneras à l'école, n'est-ce pas Ambre?
-- Bien-sûr... répondis-je en levant les yeux au ciel.C'est en courant que je rejoignis mon lit douillet en poussant un soupir de soulagement. J'enfouis mon visage sous mon oreiller encore tiède et me roulai en boule. En me voyant ainsi, Helen manifesta son exaspération en soufflant bruyamment et en marmonnant des mots que je ne compris pas. D'en bas elle cria à mon intention:
-- Je te laisse quinze minutes, Ambre, et pas une de plus! Nous avons beaucoup de choses à faire !
Les quinze minutes qui m'étaient accordées, passèrent à la vitesse de l'éclair. J'entendis ma grand-mère rentrer en trombe dans ma chambre. J'ignorais avec soin les cris qu'elle m'adressait, quand, soudain, je sentis une eau glacée se déverser violemment sur le haut de ma tête. Je me réveillai alors en sursaut, la rage au ventre mais en voyant l'expression crispée de mon assassin, je me détendis et lui souris timidement.
-- Je suppose que cela fait plus de quinze minutes... J'ai tort? demandai-je en craignant une réponse.
-- Oh oui, jeune fille ! Cela fait une heure et comme je te l'ai déjà dit, nous avons beaucoup de chose à faire aujourd'hui, il ne faut pas perdre de temps, m'annonce-t-elle avec un air sévère. Donc tu vas commencer par prendre une douche RAPIDE ! Et j'exige que tu me rejoigne dans la voiture dans DIX minutes. Je ne tolérerai aucun retard cette fois-ci.Les sourcils froncés et les traits tirés, elle sortit de la chambre d'un pas énergique. J'entendis la porte d'entrée claquer brutalement.
- Oui, mon commandant! lançai-je en exécutant un salut militaire grotesque.
Sur les instructions de ma grand-mère, je filai sous la douche et décidai de régler la température de sorte à ce qu'elle soit assez froide pour m'empêcher d'y rester plus de deux minutes. J'enfilai ensuite un jean boyfriend retroussé ainsi qu'un pull bordeaux avec un décolté finement lacé. J'appliquai une fine couche de mascara sur mes longs cils, attrapai une veste en cas de pluie et devalai rapidement les escaliers. Quand je fus arrivée en bas, je remarquai qu'Helen était déjà installée à l'avant de la Jeep couleur gris métallisé. Je m'emparai d'une pomme qui trônait sur la grande table en bois massif, et courus rejoindre la voiture. Je claquai la porte et montai brusquement pour m'asseoir sur le siège passager. Je lançai un regard à Helen, cherchant à savoir si elle était encore en colère contre moi. Mais elle m'ignora, mit le contact, et démarra.
-- Tu n'es pas très douée avec les horaires, dit-elle sans me regarder toute fois.
-- Ouais, ouais je sais, on me l'a dit des millions de fois: dépêche toi, Ambre, tu vas être en retard; tu as vu l'heure Ambre? Tu n'es pas en vacances! Il faudrait vraiment t'acheter une montre un de ces jours! Pourquoi ai-je encore reçu un message du proviseur me disant que tu arrives sans cesse dix minutes en retard ? Comment peux-tu être en retard quand tu n'a même pas d'horaires à respecter ?J'énumérai tout ceci en soupirant aux endroits propices, en roulant des yeux de temps à autres, ou encore en agitant les bras de manière pittoresque. À la fin de mon monologue, j'aperçus un sourire rayonnant s'étendre sur le visage de ma conductrice. Nous partîmes alors à rire de bon cœur en repensant et en partageant nos bon vieux souvenirs. Souvenirs dans lesquels j'étais toujours la malheureuse héroïne.
Au bout d'un quart d'heure une question me traversa l'esprit, je réalisai que je me dirigeai vers une terre inconnue, il ne m'était pas encore venue à l'idée de demander vers où allions-nous.
Quand j'eus posé ma question, Helen me répondit de façon mystérieuse:
-- Nous nous dirigeons vers un endroit chargé d'histoire, de vérité et un endroit où tu DOIS te rendre. C'est une sorte de...tradition... Oh! Regarde ce que tu me fais dire! Je vais gâcher ma propre surprise! me reprocha-t-elle en tapant sur le volant avec force et violence.
-- Pardon... Je ne savais pas que cela devait être une surprise! ajoutai-je en marmonnant les dernières syllabes.En regardant par la fenêtre, je vis s'étendre devant mes yeux ébahis une vaste clairière dont les hautes herbes étaient encore brunes à cause de l'été qui fut très sec cette année. J'admirais pensivement l'étendue campagnarde qui nous entourait, la faible lueur du soleil de novembre se reflétait sur la pelouse en de splendides rayons dorés. Je m'attendais à ce que l'on continue la route afin d'arriver dans une ville ou quelque chose qui y ressemblerait, mais ma grand-mère coupa le moteur au milieu du champ et se tourna vers moi.
- On est arrivées! me confia-t-elle en murmurant pour retenir son excitation.
- On est arrivées? demandai-je étonnée. Qu'est-ce qu'on fabrique en plein milieu de la campagne?
- Tu verras... ajouta-t-elle en levant un sourcil.À l'image d'Helen, je descendis de la voiture en sautant. Je fis quelques pas afin de détendre mes muscles qui s'étaient engourdis après un trajet d'environ une heure. Je pris une grande inspiration afin d'absorber cet air si différent de celui qui se trouve çhez moi. Les odeurs de thym, de romarin et de sauge vinrent délicatement chatouiller mes narines. Je m'étirai en un seul mouvement et regardai autour de moi.
-- C'est parti ! lança Helen avec enthousiasme.
Elle avait récupéré un gros sac à dos en toile noire dans le coffre de la voiture ainsi que deux paires de bâtons de randonnée et se dirigeai vers un chemin rocailleux si banal, que je n'aurai pu différencier des autres. Elle semblait connaître parfaitement les lieux. Je tournai la tête toutes les cinq secondes afin d'envelopper de mon regard cet impressionnant paysage monotone et régulier. Quand je me fus enfin habituée aux alentours, j'assaillis Helen de mes questions.
-- Pourquoi ne m'avez-vous pas prévenue quand j'étais petite?
Ma grand-mère n'eut pas besoin de me demander de quoi je parlais, elle me répondit, le souffle haletant:
-- Ta mère voulait que tu le découvres par toi-même, le jour de tes seize ans, comme beaucoup de tes ancêtres avant toi. Quand le cancer l'a gagnée, elle m'a fait jurer de ne jamais te parler de tes futures aptitudes avant ton seizième anniversaire. Je priais de mon côté pour qu'elles ne se manifestent jamais. Alors, quand j'ai vu que ce jour là que rien ne se passait, j'étais extrêmement soulagée et me suis gardée de te dire la vérité. J'ai pensé que si tu restais en dehors de tout ça, tu serais sans doute en sécurité. J'ignorais jusqu'ici qu'il était possible de recevoir son aural après seize ans.
Elle avait déballé ces paroles sans interruption, si bien qu'une fois terminées, elle s'arrêta, se pencha en avant, les mains sur les genoux, et soupira. Elle releva la tête, elle était dégoulinante de sueur. Je n'avais pas remarqué depuis combien de temps nous marchions, mais je me sentais moi aussi un peu fatiguée.
-- Nous y voilà, dit-elle d'une voix instable.
Elle désignait du bout du doigt un grand chêne qui devait être vieux d'au moins cent ans. Je regardais en levant la tête, les innombrables branches dont il était doté. Il était certes impressionnant, fort, beau et d'une hauteur à couper le souffle, mais je n'étais pas sûre de comprendre.
-- Tu m'a amenée ici pour me montrer... Un arbre?! demandai-je un peu déçue et énervée d'avoir fait autant d'efforts pour un gros arbre plein de feuilles.
- Pas n'importe quel arbre, Ambre ! Pas n'importe quel arbre...

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De glace ou de feu
FantasíaAmbre, 16 ans, semblait enfin avoir repris sa vie en main, 3 ans après la mort de ses parents. Elle habite désormais chez sa grand mère dans le Minnesota. Mais un matin d'hiver, une curieuse légende racontée pendant son enfance parut prendre tout so...