Wildly yours | 2

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Un bruit sourd de fracas résonna dans tout l'appartement: ce qui réveilla Rose en sursaut. Après deux jours de collocation, elle n'en était plus à sa première frayeur. Etre l'unique fille de l'appartement conduisait les garçons à jouer avec ses nerfs. La veille encore, Dean s'était amusé à se cacher sous son lit, attendant qu'elle éteigne la lumière pour bondir. Mais, l'origine de son angoisse quant à ce bruit se résumait au fait qu'aucun des garçons n'étaient censés être présent à l'appartement. Ils étaient de sortie au bar, à l'angle de la rue. Elle ne les avait pas suivi dans leur envie soudaine de faire la fête. Tout simplement à cause de son projet qui commençait à lui grignoter tout son temps libre. 

Rose repoussa les mèches qui lui tombaient sur le front avant de se glisser sur la pointe des pieds dans le couloir. L'intru continuait de casser tout ce qui lui venait sous la main. Jusqu'à ce que le silence reprenne ses droits dans l'appartement. Une odeur de tabac parvint au nez de la jeune fille qui glissa un coup d'oeil dans le salon. Un profond soupire de soulagement lui échappa quand elle réalisa que ce n'était que Freddy. Ce dernier détourna son attention de sa cigarette pour la porter sur la silhouette de Rose. Elle portait un t-shirt de Dean trois fois trop grand pour elle et sa chevelure retombait en cascade sur ses épaules. Le brun aurait presque cru voir un ange dans son salon. Si elle n'avait pas ouvert la bouche.

- Tu m'as foutu les boules, Freddy, bon sang ! Je te croyais au bar avec Dean.

- J'y étais, répondit-il la voix tremblante.

Seul la luminosité de la lune leur permettait de percevoir le visage l'un de l'autre. Rose fronça les sourcils et, après s'être frottée les bras pour se conférer un peu de chaleur, se planta face à son collocataire. Ce dernier termina sa cigarette qu'il jeta avec rage par la fenêtre. 

- Tu pleures ?, le questionna t'elle, doucement.

Il la fusilla du regard. Les larmes avaient créées des sillons transparents le long des joues creusées du jeune homme. Ses yeux étaient également rougis. C'est pourquoi il jugea la question de la jeune fille inutile et terriblement humiliante dite à voix haute. Voyant ces sentiments torturés dans les traits de Freddy, Rose posa une main sur son bras. Mais, il la repoussa d'un geste, s'éloignant. 

- J'essaie de t'aider, là !, s'exclama t'elle alors qu'il quittait la pièce. Quel caractère de cochon ! 

La jeune fille secoua la tête puis rejoignit la chaleur de ses draps, laissant le brun en tête à tête avec ses problèmes de nature inconnue. Bien qu'en deux jours ils aient réussi à renouer le dialogue, il n'était toujours pas aisé pour Freddy d'accepter la présence de l'étudiante. Chaque effluve de son parfum, chaque mascara oublié au coin du lavabo, chaque mot de sa part le ramenait irrévocablement à Natalia. 

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Rose était retombée dans les bras de Morphée, bercée par ses inquiétudes. Freddy avait profité de l'assoupissement de sa nouvelle collocataire pour se faufiler dans sa chambre. Il voulait en savoir plus sur celle qui partageait leur quotidien dorénavant. Le brun s'empara du carnet à croquis qui trainait sur la table de chevet et commença à le feuilleter. Chaque page ne faisait que refléter l'esprit de la jeune fille. Des formes sombres et indéfins y étaient tracées. On pouvait plonger dans un regard torturé ou les courbes d'un soleil éteint depuis longtemps. Cette découverte le prétrifia. Il était loin d'imaginer que derrière les traits sereins de Rose se trouvait un ouragan de pensées noires. 

- Mais, qu'est-ce que tu fais dans ma chambre ? Et, c'est, c'est mon carnet que tu as dans les mains ?, s'éveilla Rose. 

Sous la frayeur de cette intervention inattendue, Freddy lâcha le carnet qui tomba, ouvert, au sol. La jeune fille s'assit dans son lit pour ramasser l'objet et interroger le brun du regard. 

- On ne te connait pas, Rose, je voulais juste obtenir quelques infos à ton sujet !, se défendit-il.

- Mais t'es complètement siphonné mon pauvre ! D'abord tu démolis tout dans le salon, ensuite tu me repousses sans raison pour au final finir par t'introduire dans ma chambre ?!

La porte d'entrée claqua et des éclats de rire résonnèrent dans l'appartement. Dean venait de rentrer de sa soirée et apparemment, il n'était pas seul. Rose s'apprêtait à reprendre son excès de colère contre le brun. Mais ce dernier lui plaqua une main contre la bouche pour réprimer sa voix. Il lui fit signe de se taire le temps que leur colocataire s'enferme dans sa chambre pour s'occuper de son invitée. Malheureusement, le sort s'acharna sur eux. La porte de la chambre s'ouvrit sur un Dean amoché par l'alcool. Freddy se précipita alors sur Rose qui retomba lourdement sur le matelas, sous le poids du jeune homme qui feignit de s'être assoupit. 

- Regarde Natalia, il est passé à autre chose, alors il va falloir le laisser tranquille maintenant, déclara Dean en titubant. Oh, mince, c'est la chambre de Rose... Fred ?! Oh merde, alors ! 

Et, il referma la porte, continuant de jurer jusque dans sa chambre. C'est alors que Freddy se redressa sous l'expression furibonde de Rose qui prit tout de même la peine de chuchoter.

- Bordel ! C'est quoi cette histoire ?! Natalia ? 

- Calme-toi, Rose, je vais t'expliquer ! 

Elle croisa les bras, déterminée à obtenir une explication béton. 

- Quand j'étais au bar avec Dean, j'ai aperçu Natalia. Elle m'a vu et a commencé à se diriger vers moi mais je ne pouvais pas lui parler, je n'étais pas prêt alors je suis revenu à l'appart ! La revoir m'a mis dans une telle rage que j'ai envoyé valser tout ce qui se mettait sur mon chemin... Quand tu es arrivée, je venais de me dire que je ne retrouverai peut être jamais le bonheur... De plus, je venais de recevoir un message de Dean me disant de trouver une fille à glisser dans mon lit, histoire de repousser Natalia, lui faire comprendre que j'avais tourné la page... Sauf que je n'ai pas trouvé la foi de le faire...

- Oh, Freddy, t'es tellement niais comme garçon... Evidemment que tu retrouveras le bonheur ! Par contre évite de me prendre pour une écervelée ! T'as "tourné la page", mon oeil, t'en arriverais pas à de tels recours si tu l'avais vraiment oublié ! Maintenant, va te coucher, t'as pris ta revenche, t'as fouillé dans mes affaires, je pense que t'en as assez fais pour ce soir... En plus avec vos histoires je vais être complètement crevée demain.

Rose se repositionna sous ses draps, prenant soin de tourner le dos au brun. Ce dernier baissa les yeux. A cet instant, il se trouvait ridicule. Comment pouvait-il en être arrivé aussi bas ? Il jeta un dernier regard vers la silhouette allongée de la jeune fille et rejoignit sa chambre sans bruit. 

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Le lendemain matin, Rose se leva avec un mal de crâne d'enfer. L'étudiante se dirigea vers la cuisine, la mort dans l'âme. Tout ce qu'elle récolterait à coup sur ce jour-là, se serait un avertissement de Mr Fitz quant à son manque d'implication dans son projet. Et, les cernes creusées sous ses yeux ne plaideraient pas en sa faveur. La jeune fille ne se comprenait plus elle-même. Toute sa vie elle s'était montrée être une élève modèle, appliquée dans tout ce qu'elle entreprenait. Mais, deux jours dans cette collocation avait eu raison de sa détermination. 

Elle se prépara une grande tasse de café, tout en chantonnant. Un album rock résonnait depuis la chambre de Dean. Ce dernier était pourtant déjà partit pour la faculté depuis vingt bonnes minutes: Rose l'avait entendu filer à sept heures tapantes. Un baillement bestial fit sursauter l'étudiante qui manqua de peu de renverser le contenu de sa tasse sur son chemisier. 

- Freddy, grinça t'elle des dents.

L'intéressé haussa un sourcil, une main fourageant dans son épaisse chevelure brune. Il étudia sans retenu la tenue de sa colocataire. Un chemisier blanc digne d'une femme d'affaire, un jean de lycéenne: il était clair que Rose n'était au top de sa forme. Et, une infime partie en Freddy se sentait coupable. Une infime partie. 

- J'ai pas le temps de t'assister ce matin, je suis en retard, pour ce qui est de ma tenue, vu ton regard tu as déjà compris par toi-même et pour parachever le tout, je n'ai pas avancer dans mon projet !

Elle quitta la pièce en coup de vent, empoigna sa veste, son sac et ses clés en tornade et claqua la porte. Apparemment ils n'auraient pas de discussion à propos de l'incident de la nuit précédente, pas ce matin-là. 

La drôle histoire d'une colocation | NaiadFreedomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant