Petit Miracle

« J'y crois pas... »

Sur un banc au Jardin du Luxembourg

- Alors ? Qu'est-ce qu'il se passe ? [lui]

- Je veux simplement savoir ce qu'il s'est exactement passé l'autre soir. Entre nous je veux dire. [elle]

- Attends, t'es pas sérieuse ? Tu veux vraiment que je t'explique...

- Mais non pas ça (l'agacement a remplacé les rires passés), je peux t'assurer que ça j'en ai bien conscience... seulement... je voulais juste savoir, pourquoi on a fait ça ? C'était quoi le projet ?

- Écoute...

- Je connais ce regard : non je ne me prends pas la tête ! Je suis on ne peux plus sérieuse ! Je comprends pas ce qui nous ai arrivé à ce moment.

- Mais j'en sais rien moi. Disons que... j'sais pas !... Perso j'ai ressentie comme une sorte d'alchimie et c'est partit de là. C'est tout, je peux pas l'expliquer plus que ça.

- En effet...

- T'en es capable toi ? De me dire ce qu'il nous a pris il y a quoi ? Quelques semaines ?

- Cinq je dirais.

- Voilà. Tu peux me l'expliquer ?

- Non, je le reconnais, mais je pensais qu'on y verrait plus clair ensemble, à en discuter tout les deux.

- A quoi tu penses au juste ?

- Ce qu'on a fait toi et moi... C'était de l'amour ou juste un coup d'un soir ?

- Franchement ? J'en sais trop rien. J'ai bien conscience d'être le cliché parfait du connard de première en te lâchant ça mais c'est la vérité.

- ... Bien sûr (murmure)...

- Crois moi s'il te plaît ! Pendant un moment j'ai cru ressentir -non, j'ai ressenti- quelque chose. Comme... un sentiment enfoui en moi... et puis le jour s'est levé. On s'est réveillé comme si de rien n'était, on s'est échangés nos numéros et on s'est dit au revoir comme des amis.

- Oui... "comme des amis".

- Je t'en pris, ne dis pas la chose ainsi...

- C'est bien ce que tu viens de faire, non?

(Silence pesant. L'ambiance est tendu comme un élastique à son maximum.)

- Mais je ne comprends pas trop où est le problème, chacun a refait sa vie. [lui]

- ...

- Tu as bien refais ta vie, n'est-ce pas ?

- Évidemment, ça remonte à un moment nous deux, tu pense bien que je n'ai pas passé ces dernières années dans ma chambre chez mes parents en goûtant chaque nouveaux parfums de glace pour essayer de t'oublier et que ça ne fait que quelques semaines que je sors à nouveau.

- (premier sourire mutuel de l'échange) Non évidemment.

- C'est juste que... c'est pas comme ça que j'imaginais les choses. La façon dont on se re croiserait je veux dire.

- Tu voyais ça sous un fond de potentielle troisième guerre mondiale ?

- Abruti (petit rictus). Pas à ce point mais j'imaginais des œillades froides et des jugements silencieux avec de la gêne comme sentiment dominant.

- On sent la L sentimentale qui resurgit !

- Qu'est-ce que tu veux ? On se refait pas.

(Nouveau silence)

- Et quelle conclusion on en tire finalement ? Sur ce qu'il s'est passé ? [lui]

- Probablement merveilleuse nuit pleine de mystère et une amnésie sentimentale au petit matin (elle le regarde droit dans les yeux) je le pense sincèrement, je n'ai pas peur de le dire.

- Je reconnais que pour moi aussi ce fut un moment que je ne saurais oublié de sitôt.

(Encore un silence, dans un but de méditation cette fois)

- Dis moi, on parlait d'avoir refait sa vie tout à l'heure. Tu qualifie la tienne comment aujourd'hui ? [lui]

- Probablement... Tournure inattendue quant à ma vocation... Surprise mais agréablement... Beaucoup d'espoir pour ce qui m'attends... Sentimentalement, des choses s'y passent mais le fond reste vide... et toi ? [elle]

- Étrangement, tu me traiteras de copieur -à ta guise- mais je dirais comme toi : mon orientation a pris une tournure que je n'aurais soupçonné mais elle me plaît, j'ai eu de nombreuses surprises agréables, j'ai de l'espoir en mon avenir et j'en passe. Cependant sentimentalement je dirais assez complexe.

- C'est-à-dire ?

- Eh bien comme dirait notre cher Maé, j'ai "le coeur en bandoulière" à force d'enchaîner les breaks.

- A force d'enchaîner ... (le ton employé semble être capable de geler les mètres alentours)

- (sent le malaise naître) Euh... Oui... Disons que j'ai quelqu'un depuis bientôt un an déjà sauf qu'ils nous arrivent d'avoir des... différents.

- Et il remonte à quand votre dernier "break" ?...

- Je ne sais plus exactement... euh, je dirais deux mois ou... (réflexion puis surprise presque aberrante)... quelques semaines ?

- Attends (la colère commence à monter)... tu es en train de me dire qu'il se pourrait que tu ai été en couple au moment où... (un haut le coeur se fit  sentir) ... Oh mon Dieu, j'y crois pas (ses deux mains vinrent se retrouver sur son visage). Dites moi que je rêve...

- Mais qu'est-ce que ça peut faire quand on y repense ? On ne faisait rien de mal et on vient de partir du fait que ce qu'il s'est passé était certe beau mais sans continuité, non ?!

- T'es vraiment con hein ?! Je peux t'assurer que plus jamais je n'oserais me regarder dans une glace après ce que je viens d'apprendre ! Tu peux pas imaginer à quel point je me sens si... sale, impure après ce que je viens d'apprendre.

- C'est bon, ça s'est passé qu'une fois ! Si c'est pour elle que t'inquiète je peux t'assurer qu'elle n'en saura rien et, en condition de break qui plus est, je suis sûr qu'elle va en boîte une fois sur deux et qu'elle ne rentre pas seule si tu vois ce que je veux dire.

- Il est pas question d'elle bordel ! Je la connais même pas, c'est à moi dont je fais allusion...

- Eh bien je te rassure, tu n'a rien à te reprocher : tu ne m'a pas allumer d'une quelconque manière et tu n'a pas à te considérer comme une maîtresse ou ce genre de personne...

- Mais ferme la putain !! Ce que tu dis est un fait qui me dégoûtera plus tard mais pour le moment c'est pas de ça dont il est question pour moi !

- Alors quoi, merde ?!

- Je vois juste pas comment je me verrais expliquer à mon enfant, quand il sera en âge de comprendre les choses, qu'il n'est pas né de l'amour commun de ses parents mais d'un soir où son père a retrouvé son ex et où il en a profité pour oublier sa copine avec qui il était en pause !!!

- Attends tu sors les choses hors contexte ! Je te rappelle qu'à mes yeux également cette nuit était spontanée, unique et mag...

- ...

- ... " Ton enfant " ? " Son père " ? ...

(Un dernier silence. Un moment de réflexion et un simple mot fatidique)

- Oui.