LA FILLE DE L'OMBRE

Quarante et un jours avant

"Il y a deux façons de voir la vie, l'une comme si rien n'était un miracle, l'autre comme si tout était miraculeux."

-Albert Einstein-

Lui

Je regarde sa douce silhouette dans ce lit où elle a l'air perdue tant il est grand.

Tant elle est petite et fine surtout.

Frêle et fragile.

Elle semble paisible.

Sa respiration et les battements de son cœur sont réguliers.

Beaucoup de tuyaux la relient à toutes ses machines qui font un bruit constant.

Ethel Rose.

Quel beau prénom a-t-elle!

Ethel. Ethel. C'est tellement peu commun.

Ses deux mains sont jointes sur son ventre.

Ses doigts sont fins et gracieux.

Son visage est paisible.

Ses traits semblent relâchés.

Elle a un beau nez retroussé et une canule qui lui souffle de l'air dans les narines.

Je ne devrais pas être là.

Je le sais.

Mais je sais qu'elle doit vivre.

Sa place n'est pas dans ce lit bien trop grand pour elle.

Sa place est dans la vie.

Dans le monde.

Je lui ai amené mon lecteur MP3, branché à mon casque.

Je le pose sur ses oreilles et sélectionne une de mes musiques favorites: Holocene de Bon Iver.

Lorsque la musique commence, son cœur semble accélérer.

Étonnant.

Lorsque la musique s'arrête, j'enlève le casque et commence à lui parler.

« Ethel, ma douce Ethel, ta place n'est pas ici. Pas dans ce lit. Tu dois vivre et tout ne dépend que de toi. Sors de ce coma, tu sais le faire. »

Son rythme de cœur s'accélère.

Elle m'entend sûrement.

Certainement.

Elle doit se demander qui je suis.

Parfois je me le demande aussi. Qui suis-je?

Qui est cet inconnu qui souhaite de tout cœur qu'elle se réveille.

J'irai me renseigner à son sujet afin de savoir ce qui l'amène dans cette triste chambre d'hôpital.

Une infirmière me demande de sortir pour réaliser quelques soins sur Ethel.

Je sors à contrecœur mais je reviendrai.

Tant qu'elle ne sera pas réveillée,

Je reviendrai.