"Mais alors, dit Alice, si le monde n'a absolument aucun sens, qui nous empêche d'en inventer un ?"
-Alice au pays des merveilles-
Elle
La porte s'entrouvre. Puis se referme.
Quelqu'un pleure derrière la porte.
Je reconnaîs la voix d'Adaline demander:
« Ça va, mademoiselle?
- Je peux pas, je... je peux pas la voir comme ça. »
Anna!
Anna, cela fait deux mois que j'attends ta visite.
« Voulez-vous que je vous accompagne? interroge l'infirmière.
- Je... je veux bien, répond mon amie. »
La clenche émet un petit bruit aigu et j'entends des pas s'approcher de moi.
Pendant quelques instants, seuls les pleurs d'Anna se font entendre.
« Qui est-elle pour vous? demande Adaline.
- C'était... non, elle l'est toujours. C'est ma meilleure amie, sanglote Anna.
- Parlez lui, je suis sûre qu'elle vous entend.
- Pensez-vous qu'elle a mal? interrompt mon amie.
- Je ne pense pas, les médicaments de nos jours sont très efficaces, informe l'infirmière.
- Je... j'étais là quand elle est tombée dans ce coma, vous savez. Avant cette fameuse soirée, elle m'avait dit qu'elle stressait. Et.. et c'est moi qui lui ai conseillé de se lâcher, de vivre dans le moment présent au moins un soir. Elle pensait toujours à son avenir, elle voulait devenir avocate, vous savez. C'était ma meilleure amie, mais regardez dans l'état dans lequel je l'ai mise.»
Anna, non, ce n'est pas de ta faute.
La décision de boire abondamment ce soir-là, c'est moi qui l'ai prise, pas toi.
J'en suis l'entière responsable.
Tout est de ma faute, je le sais.
« Je dois y aller, mademoiselle, soupire Adaline, mais parlez lui, elle en a besoin et ça lui fait du bien, j'en suis persuadée. »
La porte se referme.
Anna, en pleurs, pose sa tête sur mon ventre et éclate en sanglots.
« Je suis trop désolée, Ethel. J'ai honte de moi. Je suis nulle. Tellement nulle que pendant deux mois, j'ai été tétanisée par la peur de te revoir. C'est trop dur sans toi au collège. Tu n'es plus là pour me rappeler d'étudier certains cours ou pour me conseiller de manger plus sainement à la cantine. Je suis perdue sans toi, Ethie.
Tu me manques tellement.
J'ai repensé aux paroles que tu avais dit le soir où nous sommes couchées dans l'herbe humide et où nous avons observé la nuit étoilée. Tu avais dit: "On se croit grand mais on est si petit face à l'immensité du monde." et j'ai compris ce que tu voulais dire il n'y a que quelques jours. J'ai longtemps pensé que le monde tournait autour de moi, que j'étais le centre de l'univers, que j'étais la plus heureuse, puis la plus souffrante. Je me plaignais souvent pour attirer l'attention sur moi. Tu n'étais pas comme ça, tu préférais t'intéresser à la souffrance des autres, plutôt qu'à la tienne. Tu m'as fait changer ma vision de l'existence, Ethel.»Tous ces moments que j'ai passé avec mes proches tomberont sûrement dans l'oubli.
Les souvenirs s'estomperont mais j'aurai changé la vision de la vie de quelqu'un.
Et pas de n'importe qui, de ma meilleure amie.
Je ne savais pas que j'avais laissé derrière moi tant de remords et de regrets.
J'aimerais encore m'attarder à regarder comme le ciel est beau.
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LA FILLE DE L'OMBRE
Short StoryElle est dans le coma et son corps semble vouloir y rester. Lui, vient lui parler, lui réciter des poésies ou lui faire écouter de l'opéra. Elle se dégrade au fur et à mesure, mais dès qu'il vient auprès d'elle, son cœur se remet à battre de plus be...