Le choc m'a rendue complètement inutile pendant trois jours. Une vraie larve, tellement molle que mon sauveur Gek a fini par me laisser roupiller dans son refuge pendant que lui retournait explorer cette foutue lune.Ma bitza. Ma compagne de route depuis 15 ans, tout comme Pili. Elle était toute ma vie. Le dernier crash avait failli avoir sa peau, mais je l'avais une fois de plus retapée et on s'en était bien sorti, elle et moi. C'était une splendide Harli Dovizon 6500c, à la carlingue rutilante de noir et or, avec des petites ailes peintes sur les réacteurs arrière. Son museau plongeant était profilé à la manière d'un chasseur Yuv, mais avec une double soute bien utile lorsqu'on jouait les transporteurs.Et maintenant, j'allais devoir continuer sans elle.Je sers les poings. L'image de Pili et ses genoux en sang me revient. J'ai perdu ma Harli, mais je vais tout faire pour remonter la piste laissée par mon copain Xien.Le lendemain matin, je laisse encore partir le Gek seul pour son safari photo.
J'attends une bonne heure et je me mets en branle. Je récupère le matériel intact sur ma vieille combi et le greffe sur une combinaison neuve, recharge mon extracteur laser, l'améliore avec un module de visée plus précis et une meilleure batterie, trouvés dans le bazar du refuge.
Je fais le plein de doses d'antiTox et de barres aux lentilles – plaisir coupable de mon sauveur, ce qui n'arrange en rien le parfum qui règne dans sa baraque.En sortant, je vérifie que le Gek n'est pas dans le coin en regardant de tous les côtés. Je me dirige vers la plateforme de décollage. Son vaisseau, un petit cargo jaunâtre avec un pif aplati, attend patiemment que quelqu'un l'emmène en balade. Depuis que je suis au refuge, le Gek n'a pas redémarré son bike. Alors... c'est moi qui vais m'en charger.J'entends Pili ronchonner : "Cassy, tu fous ce pauv' gus dans la merdasse. T'as pas un peu de remords ?" Il a toujours été plus éthique que moi. Souvent, il arrive à me convaincre de ne pas faire de conneries.
Mais là, bon, c'est un cas de force majeure. Il faut vraiment que je me barre d'ici.
Je fixe l'outil de piratage sur le verrou du cargo grâce à ses ventouses et lance la procédure automatique. Très vite, les petites loupiotes bleues du hacking s'agitent, puis tournent dans le vide. Je tapote l'écran de temps à autre avec l'impression que ça me fait gagner du temps. C'est un tic nerveux qui faisait rager Pili.
Au bout de cinq minutes, j'entends enfin le petit claquement de la serrure électronique qui rend les armes. Le cargo déverrouillé, je grimpe à l'intérieur et m'empare des commandes de bord. Je charge illico les coordonnées que j'ai trouvées dans l'usine Xienne, et roulez jeunesse !Les moteurs ronronnent doucement. Je m'envole en pensant à ma Harli. J'espère qu'elle a trouvé le chemin pour le paradis des meules...Cassy - DU. 17-1201 - T°C : 35,2° C (ext.) - 19,6 ° C (int.) - Loc. : Triirasefli, système Oibosolumill (Euclide)
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Echos stellaires
Science FictionJournal de bord de Cassy, une baroudeuse de l'espace qui vient de se crasher sur une planète inconnue. Ill. de couverture : Lars Kristensen