Elle répétait sans cesse qu'elle était dépendante de moi et qu'elle détestait ça. Il est temps que je m'envole disait-elle. Et puis elle ajoutait mais regarde, mon aile est cassée et puis elle emplissait mon corps, de son rire.
Quelques fois elle se trouvait incapable de sortir de son lit, le matin. Alors elle m'appelait, Mat tu veux bien faire mes courses ? Je les lui apportais en fin d'après-midi, quand ma journée de travail était terminée. Il arrivait alors que je la trouve, tout habillée dans son lit, parfois buvant un thé, assise dans le canapé.
" j'ai finalement réussi à me lever, disait-elle, à me préparer, mais impossible de passer le pas de la porte. "
Au début je lui demandai,un peu naïvement, pourquoi elle avait passé la journée dans sa tenue de travail, pourquoi ne pas s'être remise en pyjama. Elle souriait.
" Il faut lutter. Si je me mets en pyjama aujourd'hui, alors je finirai par passer le reste de ma vie en pyjama.
- Ça arrive souvent?
- Tu comprends pas, c'est un cercle vicieux. Tu trébuches une fois et la fois suivante tu te casses la gueule par terre. Tu me suis ?"
Comme le Petit Prince ne semble jamais entendre les questions de l'aviateur, elle se plaisait à ignorer les miennes, ou bien elle répondait par métaphores.Un jour où je lui tendais ses sacs de courses, elle planta ses yeux dans les miens et, de manière presque imperceptible, je crus voir quelque chose qui s'écroulait en elle. J'ai vu à travers ses yeux a elle, quelque chose tomber, s'effondrer au fond d'elle même. Je pense qu'elle l'a perçu car, elle a détourné les yeux et son visage s'est illuminé.
"Merci, que ferai-je sans toi" avait-elle ri.