Miah me montre ses dernières créations pendant que je m'affaire sur un croquis. Dans la salle de Conseil, aux côtés de mes semblables, elle me dérange quelque peu, mais ma sœur a toujours été d'une humeur taquine ou provocatrice. Chacun de nous a été créé à son image et même si nous sommes égaux concernant les règles, nous avons nos différences.
Elle plisse les yeux, en continuant de parler. Les six autres anges autour de nous ne la remarquent même plus, tant, elle est souvent ici. Je la regarde, niaise, avant de sourire. Ma sœur est si mignonne. Ses petites joues rosées ou son ridicule nez donnent envie de les caresser. Ils ont tous le même gabarit dans cet Ordre. Minuscule. Les Chérubins semblent adorables à première vue, mais ils ne comprennent pas le silence. Autant dire que lorsqu'un Chérubin a une histoire à raconter, nous pouvons tous nous assoir et attendre que la troisième lune apparaisse jusqu'à ce qu'il ait fini son conte. Sans parler de cette obsession pour les questions, cela est plus fort qu'eux. Ils ne peuvent pas s'en empêcher. Toutefois, des neuf Chœurs d'anges, ils sont les plus amusants. On leur pardonne donc leur pépiement constant.
Et puis, la Séraphin que je suis a des obligations. J'ai le devoir de faire attention à chacun d'eux ou de les choyer. Étant dans le rang le plus proche de Dieu, il y a certaines lois auxquelles je n'échappe pas. Comme celui de l'exemple et de la protection.
Nous sommes huit sous l'ordre de Metatron. Sept d'entre nous ont une mission particulière, et un dernier est responsable de nous. Sept anges pour sept fardeaux, et leur gardien. La première des volontés est de préserver les autres de nos devoirs. Car aucun de nos frères et sœurs ne doivent savoir qu'ils existent.
Je baisse un instant le regard vers ma robe et tire sur le tissu. La nudité n'est pas permise au Ciel. Nous devons soigner le paraître selon notre rang. Vêtus de tuniques, ces dernières arborent sur la taille une boucle symbolisant notre Chœur. En revanche, les Séraphins ont un secret, bien caché sous l'apparence. Entourée de deux paires d'ailes d'argent, une petite pierre y est piégée dans un pendentif. D'un rose flamboyant, elle s'illumine sous mes yeux. Je m'égare toujours dans sa contemplation, je me laisse envahir par sa nuance. Mon esprit est happé avec elle. Comment une œuvre si minuscule, si belle, peut être si destructrice ?
— Siah !
Je me redresse et fronce les sourcils face à Miah. Je m'en veux de ne pas l'écouter parfois. Cela m'arrive lorsque je saisis ma pierre, mais je ne dois pas faiblir ainsi. Au final, sans mon attention, elle se tarit pour reprendre une lueur moins forte.
— Tu ne m'écoutes pas, n'est-ce pas ?
— Si, bien sûr que si, Miah.
— Tu mens mal, et en plus tu enfreins une loi.
Les autres ne réagissent pas à sa remarque, bien trop afféré à leurs parchemins. Je lui souris, cette petite a tapé juste. Je ne souhaite pas lui donner raison pour autant. Bien heureusement pour moi, l'arrivée de Metatron évite de me justifier. La Chérubin écarquille les yeux, apeurée, avant de filer en vitesse. Elle emporte avec elle un courant d'air qui soulève la chevelure grisonnante de mon Régent.
— Siah ! Combien de fois dois-je te dire que personne ne doit entrer dans ce lieu ?
— Navrée, elle n'est pas docile. Je lui ai déjà répété plusieurs fois...
Mon frère à ma droite pouffe. Je lui lance un regard en coin pendant que Metatron soupire et dépose les tablettes sur la table. Mon Régent me réprimande ensuite d'un œil torve. J'enfonce ma tête dans mes ailes, m'excusant du comportement de Miah. Il retrouve un air plus compatissant et commence à nous divulguer les derniers écrits de la parole de Dieu. Et là où nous sommes tous supposés écouter de manière assidue, mon frère retient encore un gloussement. Je me penche vers lui tandis que Metatron nous tourne le dos en lisant.
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GADREL
FantasyAvant le commencement, Dieu créa des êtres purs. Il les fit intelligents, beaux et obéissants. Il leur donna un but et des missions à accomplir. Il insuffla dans leurs âmes bonté et amour. Tous différents et pourtant tous identiques. Chacun reçut ce...