Chapitre 3.

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Il est préférable de vouvoyer un haut gradé dans un club de biker. C'est une règle tacite, respectée par tous les membres, quel que soit leur grade, même si le club est rival de l'ancien ou du nouveau. Pour ma part, je reconnaîtrais ce club parmi des milliers d'autres. Il est l'ennemi juré de mon ancien club. Dès que j'ai parlé, l'homme se retourne. Et, il faut l'avouer, je l'ai reconnu depuis un moment déjà, et lui le sait, puisqu'il penche légèrement la tête sur le côté et m'examine avec une intensité qui laisse peu de place à l'inconnu. Il me regarde comme si j'étais une intrusion dans son espace, alors que c'est moi qui devrais me sentir envahie.

Et bon dieu, de près, ce gars dégage un charisme impressionnant. Si Georgio ou Gary t'entendaient, tu te serais pris une sacrée remontrance pour ce jugement.

Il me répond par un simple hochement de tête, confirmant ce que je pensais : c'est bien moi qu'il cherche. Je souffle profondément, passe devant lui, et me dirige vers ma porte d'entrée. Je la déverrouille, l'ouvre, puis me décale sur le côté pour lui permettre de rentrer.
- Je présume que vous souhaitez entrer ?

Un second hochement de tête confirme ma supposition. Ce n'est pas gagné d'avance, mais je ne suis pas vraiment surprise ; il est exactement comme on me l'a décrit, ou presque.

Une fois à l'intérieur, il scrute attentivement l'appartement, ses yeux parcourant chaque recoin.
- C'est... Petit. Me dit-il, une remarque que je ne m'attendais pas à entendre de la part d'un président.

Wow, le président parle ! Je réprime un sourire.
- Oui, disons ça comme ça... Mais c'est suffisant pour moi, réponds-je en tentant de garder un ton neutre.

Il hoche la tête en signe de compréhension et entre entièrement dans l'appartement, ses mouvements assurés, comme s'il était chez lui. Je me demande ce qu'il cherche ou pourquoi il a voulu me rencontrer en personne. Son attitude calme et mesurée contraste fortement avec l'aura de puissance qu'il dégage.

Je m'efforce de rester posée, malgré la tension palpable. Il est évident que cette rencontre ne se limite pas à une simple récupération de veste. Les raisons derrière sa visite me semblent encore mystérieuses, mais je suis prête à en savoir plus. Je le fixe brièvement avant d'ouvrir mon sac et de saisir la veste en cuir pour lui rendre. Je lui tends, et il la prend avec un geste fluide avant de la déposer sur le meuble proche. Je me demande ce qu'il en pense, car il semble détaché, presque indifférent à ce geste qui pourrait être interprété comme un signe de respect ou de défi.
- Vous n'êtes pas là par hasard, je me trompe ? demandai-je, cherchant à comprendre ses intentions.
- Non, en effet. Mais tu sauras tout en temps voulu, j'en suis sûre, Lexie.

Je me contente d'un sourire poli et, dans un effort pour alléger l'atmosphère, propose :
- Bien. Un café ?

Il hoche la tête en accord et prend place sur l'une des chaises proches de la cuisine. Je mets la machine en marche, et pendant que le café coule, je me permets d'espérer avoir des réponses à mes nouvelles questions.
- Du coup ? Je vous écoute. Vos prospects vous attendent, non ?

Il sourit légèrement en entendant ma question.
- Oh Lexie... Tu sais très bien qu'ils sont là pour ma sécurité, mais aussi pour apprendre mes règles, mon fonctionnement, et tout le reste... Enfin, je ne te fais pas de dessin, je crois que tu sais ce que c'est, non ?
- C'est exact ! Mais pour y avoir été, je peux vous dire que c'est l'un des trucs les plus chiants à faire.

Son regard s'assombrit légèrement, et je sais que j'ai touché une corde sensible. Qui aimerait vraiment se faire reprendre sur la façon dont il gère ses recrues ?
- Je sais, mais tu le sais toi-même. C'est une des premières choses que l'on apprend quand on entre dans un club. Et surtout la patience...
- Je sais...
- Tu sais, Lexie, tu n'as pas été simple à retrouver. Et pour être totalement honnête avec toi, les raisons de ton départ de ton ancien club restent très vagues.

À l'évocation de cette phase de ma vie, je ne peux que grimacer. Les souvenirs sont encore frais et douloureux.
- Je sais que tu ne veux sûrement pas revenir sur cette période, mais j'avoue être intrigué par la raison de ton départ.
- Non, en effet. Vous avez raison, je ne veux certainement pas revenir sur cette période. Vous n'avez pas idée de ce que vous êtes en train de faire. Imaginez, ne serait-ce que quelques instants, si Gary ou Georgio l'apprenait.
- Oh non, Lexie. Je sais très bien ce que je suis en train de faire. Ne t'inquiète surtout pas pour ça.

Il termine sa phrase en portant sa tasse à ses lèvres, la vidant d'une traite, puis se lève.
- À plus tard, Lexie.

Je n'ai pas le temps de répondre, qu'il a déjà franchi le seuil de la porte. Un sentiment d'incompréhension et d'inquiétude m'envahit alors qu'il disparaît dans le couloir. Je me demande ce que tout cela signifie et quels jeux politiques ou personnels se trament dans l'ombre. Une chose est certaine : cette rencontre n'était que le début d'une intrigue beaucoup plus complexe.

Je me retourne pour nettoyer la table, mais mon regard se fixe sur le gilet en cuir laissé sur le meuble. Attends une seconde ! Il se moque de moi ? Il me laisse encore son cuir ? Tant pis pour lui. Je lave les tasses et la vaisselle qui traînent, profitant de ce moment pour accomplir une bonne action dans mon propre espace. Ensuite, je prends une douche pour éliminer le sang restant sur ma peau.

À 21:00, je me glisse dans mon pyjama et m'effondre sur le canapé, prête à rattraper mon retard dans ma série Netflix. Je passe le reste de la soirée, oscillant entre éveil et somnolence, et je me traîne finalement dans mon lit quand je vois 23:00 sur mon réveil.

Soudain, des bruits sourds me réveillent en sursaut. Je rêve ? Les bruits continuent de plus en plus insistants... Oh ! Mais c'est ma porte d'entrée ! Je me lève d'un bon, paniquée. En traversant mon appartement dans le noir, je me cogne contre la table, me blessant au passage. J'atteins la porte en boitant, l'ouvre et me retrouve nez à nez avec un prospect.
- Le président m'a dit de vous déposer ça, annonce-t-il en levant un sac de boulangerie.

Je suis tellement en colère que j'en oublie la politesse.
- Tu diras au président que s'il veut me donner quelque chose, il n'a qu'à bouger ses fesses ! Et pendant que j'y suis, tiens ! Je lui tends le cuir de son président, enragée.

Je claque la porte et, à peine ai-je le temps de tourner le dos, que de nouveaux coups retentissent avec force.
- QUOI ENCORE ?!

Je rouvre la porte avec une impatience palpable. Le prospect est toujours là, l'air étonné mais résigné.
- Le président a aussi demandé de vous dire qu'il veut que vous gardiez le cuir pour l'instant. Et... il a aussi laissé un message.

Il sort un petit papier de sa poche et me le tend. Je le prends, l'ouvre et lis : « Ne te fâche pas. Je reviendrai en personne. »

Je soupire, la frustration laissant place à une étrange curiosité. Je remets le cuir sur le meuble et referme la porte avec un soupir d'exaspération. Il est clair que cette histoire est loin d'être terminée.

Knights of Hell.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant