Chapitre 1.

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[Rue ; quelque part près de Denver, Colorado ; début de soirée]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 3 mois et 1 jours.


La nuit commençait doucement à lever son voile sombre et Sasha n'avait toujours pas trouvé d'endroit sûr où s'abritait pour dormir. Elle avait préféré éviter de se diriger vers Denver plus tôt dans l'après-midi de peur de croiser trop d'infectés comme c'était souvent le cas dans les grandes villes mais elle avait mis plus de temps que prévu avant de tomber sur une nouvelle ville plus petite. Le stress montait en elle plus elle voyait le soleil s'effaçait à l'horizon. L'atmosphère lugubre de ce monde apocalyptique était déjà pesant la journée, il était pire la nuit.

Après avoir fait un détour pour contourner les grands axes de cette ville, elle entra dans une petite avenue résidentielle. Le genre de rue qui, avant le chaos, respirait le calme et semblait tout droit venir de Desesperate Housewives. Aujourd'hui, elle semblait tout autant délabrer que le reste des quartiers qu'elle avait traversé. Sasha s'arrêta brièvement devant une maison, hésitant entre s'y engouffrer malgré le peu de temps qu'elle avait pour s'assurer qu'elle était vide ou se créer un nid douillet entre les branches d'un arbre adjacent. Le choix fut cependant vite fait quand elle pensa aux risques et aux bénéfices et que la liste des premiers étaient plus concluantes.

D'un pas volontairement lent pour ne pas se faire surprendre par un éventuel infecté caché, elle se rapprocha de l'arbre et évalua la hauteur. Elle ne pouvait pas attraper la branche la plus basse même en sautant et escaladait le tronc était impossible sans rien pour l'aider. La jeune femme traîna alors un transat repéré dans le jardin avant de la maison jusqu'au pied de l'arbre et s'en servit comme d'un escabeau pour attraper la première branche. Difficilement, elle se hissa pour venir s'y asseoir, grinçant des dents quand ses muscles protestèrent à l'idée de travailler alors qu'elle mourrait de faim. Elle prit un petit temps d'arrêt une fois dessus puis continua son ascension plus facilement alors que les branches étaient plus proches les unes que les autres. Une fois satisfaite de la distance mise entre le sol et elle, Sasha choisit la branche la plus solide et s'y installa. Elle prit une corde de son sac à dos, la passa plusieurs fois autour du tronc et de sa taille et fit un nœud de marin comme le lui avait appris son père l'un des rares fois où il avait cherché à connaître un peu plus sa fille. Avec la longueur restante, elle attacha son sac à dos pour être sûr qu'il ne chute pas plusieurs mètres plus bas. Ainsi sécurisée, Sasha s'autorisa un second temps de repos bref puis fouilla une nouvelle fois parmi ses affaires pour dénicher une barre de céréales à moitié mangée et une gourde presque vide. Elle prenait son temps entre ses bouchées et machait lentement pour donner le temps à son corps de se rendre compte qu'il était nourri malgré la faible quantité. Une fois la barre finie, elle avala l'eau qui lui restait et rangea sa gourde vide dans son sac à dos. Elle le posa ensuite entre ses jambes et laissa sa tête s'appuyer contre le tronc d'arbre pour fermer ses yeux dans un repos bien mérité.

Quand elle se réveilla, le soleil montrait timidement le bout de son nez à l'horizon. La jeune femme grimaça aux douleurs qui irradiaient dans tout son corps. Il allait sans dire que dormir dans et attaché à un arbre était tout sauf confortable. Surtout quand votre corps était déjà poussé à ses limites. Sasha avait très mal dormi, comme toutes les nuits depuis trois mois, et ça n'aidait pas avec l'état de son corps. Son sommeil avait été entrecoupé de moments d'éveil alors que des infectés déambulaient près ou sous l'arbre dans lequel elle s'était abritée. Leurs grognements rendant impossible de s'endormir tant qu'ils ne s'étaient pas éloignés.

Après s'être laissée le temps de se réveiller, Sasha défit soigneusement la corde qui l'avait gardé en sécurité et remis son sac sur son dos. Elle observa les environs avant de décider de descendre de son perchoir. Elle fit le chemin inverse jusqu'à la branche la plus basse et y passa la corde autour pour descendre dans une sorte de rappel. Ce n'était pas sans joie qu'elle retrouva la terre ferme. Elle tira sur la corde pour la passer autour de la branche et la rangea rapidement dans son sac. Ses ressources vides et le jour levé, elle se décida à entrer dans quelques maisons du quartier pour essayer de trouver des vivres.


◇ ◇ ◇

[Maison ; quelque part près de Denver, Colorado ; matinée]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 3 mois et 2 jours.


Posant son sac sur le sol à côté d'elle, Sasha attrapa une boîte de gâteaux dont elle vérifia la date de péremption par reflex. Elle l'ouvrit, s'assura que rien n'était moisi et compta le nombre de biscuits avant de le fourrer dans son sac. Elle passa au placard suivant à la recherche de plus d'aliments pour survivre. Alors qu'elle fouinait dans les rangements de la cuisine, un bruit lointain la fit se figer. D'une main elle attrapa son sac à dos et l'enfila tandis que de l'autre elle posa une main sur le manche de son couteau. Elle se releva avec lenteur pour être debout et balaya la pièce d'un geste circulaire à l'aide de sa lampe torche pour garantir qu'elle était bien seule. Les fenêtres de cette maison étaient condamnées avec des planches de bois fermement clouées et cela plongeait la maison dans la pénombre. Aucune ombre ne semblait se tapir dans un coin. Cependant, elle ne serait pas satisfaite tant qu'elle ne s'assurerait pas que la maison entière était bien vide bien qu'elle l'ait déjà fait quand elle était entrée.

Elle traversa la maison à pas de loup, les oreilles attentives aux moindres bruits. Dans le hall d'entrée, elle dirigea son regard vers les escaliers et l'étage. Elle shoota sans faire exprès dans une chaussure qui vola et s'écrasa dans un bruit sourd contre le mur d'en face. La jeune fille se stoppa net, elle se souvenait très bien que le sol était excepte de tout obstacle. C'était quelque chose qu'elle vérifiait constamment en entrant quelque part depuis qu'elle avait fait une chute douloureuse en voulant s'échapper d'infectés quelques semaines plus tôt.

Sortant son couteau de son fourreau, Sasha fit un pas prudent vers les escaliers et posa un pied sur la première marche tout en tendant l'oreille pour attraper tout son qui proviendrait de l'étage. Le faisceau de sa lampe torche scannait le hall de droite à gauche pour déceler les traces éventuelles d'un intru. Alors qu'elle allait commencer à gravir l'escalier, la lumière se refléta sur quelque chose qui brilla. Soudainement, un chat s'hérissa et feula dans sa direction avant de prendre la fuite par la chatière de la porte d'entrée. Le cœur battant à dix milles, Sasha s'adossa contre le mur et se força à inspirer et expirer lentement pour calmer ses battements et l'angoisse qui montait. Décidant de ne pas s'attarder plus longtemps dans cette maison, elle jeta un coup d'œil à travers le juda et vérifia que la rue était vide. Elle éteignit sa lampe torche et la fourra dans la poche latérale de son sac avant de s'élancer vers l'extérieur et la prochaine maison à vandaliser.


◇ ◇ ◇

[Rue ; quelque part dans le Colorado ; fin d'après-midi]

Temps écoulé depuis le début de l'épidémie : 3 mois et 9 jours.


Sasha se pencha, une main en visière au-dessus de ses yeux pour cacher les rayons du soleil couchant tandis que l'autre tenait fermement son couteau, et vérifia que la voiture était vide. Elle se redressa, fit le tour pour arriver côté conducteur et essaya d'ouvrir la portière. Elle s'y faufila et la referma derrière elle pour éviter que quelque chose ne la surprenne quand elle n'était pas prête et vulnérable. Elle posa son sac à dos sur le siège passager et commença à fouiller le moindre recoin pour trouver des clés. Rien. Ne perdant pas de temps, Sasha balaya la rue d'un regard et chercha toute présence infectée. Elle attrapa son sac à dos de sa main non armée et se dirigea vers la prochaine voiture. Elle recommença son action quatre fois en vain.

Inquiète de voir le soleil se coucher rapidement, elle décida d'essayer une dernière voiture avant de se trouver un abri pour la nuit. De nouveau, elle colla son front à la vitre mais cette fois-ci un infecté se jeta sur elle de l'autre côté de la paroi en verre. Sasha recula d'un pas surpris et tomba sur ses fesses, le cœur battant la chamade sous la peur qui avait pris possession de son corps. L'infecté à l'intérieur de la voiture était collée contre la vitre et raclait ses dents pourries dessus dans l'espoir inutile d'avoir une bouchée de la jeune femme.

Cette dernière était tellement préoccupée par le ralentissement de sa respiration et le reflux de l'anxiété qu'elle ne faisait plus attention à son environnement. Aussi soudainement que l'infecté dans la voiture l'avait surprise, un poids lui tomba dessus. 

Le lendemain, le monde existait encore.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant