Teriani entra dans l'auberge et s'assit dans un coin. La Loutre rouge accueillait une populace suffisamment diversifiée pour qu'elle y passe inaperçue. Éa, la capitale d'Éores, le principal royaume du Sud-ouest, était bondée en cette saison. Le début de l'hiver était doux, le commerce était dans sa meilleure saison, et la ville portuaire attirait du monde en tout temps. Elle était donc bondée.
Pendant que je tombais lentement vers la misanthropie, Teriani observait les clients. Il y avait des représentants la plupart des espèces humanoïdes, mais la salle se vida rapidement quelques heures après la tombée de la nuit. Teriani se leva pour demander un repas et une chambre mais un inconnu assis à notre table la retint. Nous n'avions pas remarqué son arrivée, ni Teriani ni moi, alors que notre seule occupation avait été de scruter la salle.
Ses traits étaient encore caché par l'ombre d'un grand chapeau à plume, et son long manteau à haut col masquait sa silhouette. Il m'était par ailleurs entièrement dissimulé, ce qui était théoriquement impossible.
Il sortit un jeu de carte de sa manche, et lança : '' il n'y a plus qu'une chambre libre. On peut parier ?
- Comment savez vous que je voulais une chambre ?
- Vous n'êtes pas partie.
- Soit. Jouons. Mais, pas aux cartes. Je ne les supporte plus depuis trois siècles.
L'homme ne réagit pas à l'annonce de cet âge, mais fit apparaître quelques dés et un plateau d'un jeu que je ne connaissais pas. Teriani et lui commencèrent à manipuler les dés. Après quelques tours, je compris qu'il s'agissait d'une simple partie de Kesterel, alors que le plateau m'avait induit en erreur. La partie se prolongea sur près d'une demi-heure, lorsque un développement inatendu me remémora une salle remplie de canaux. Ce n'était plus un plateau de jeu que nous voyions, mais un rappel de nos premiers jours à l'Académie. Même après près d'un millénaire, surtout après près d'un millénaire, ce souvenir restait douloureux. Teriani arracha son chapeau à son adversaire. Des cornes et des plumes nous furent dévoilées.
- Bonjour, Nériam. Cela faisait longtemps que nous ne nous étions pas vus.
- À peine trois siècles, non ?
- Nous ne nous étions pas vraiment croisé à Jughur. J'avais à peine vu ton message.
- Vrai. Tu viens de gagner ta chambre, dit il en regardant le plateau.
- Ce n'est pas comme si c'était la première fois qu'on dormais dans la même pièce. Tu peux venir, je te fais confiance. Et puis je suis loin de ressembler à une antargonne.
Ils rirent d'un souvenir que je ne connaissais pas, puis se dirigèrent vers le comptoir, où ils arrivèrent à temps pour entendre un gobelin réserver la dernière chambre. Ils se dirigèrent donc vers la place royale en devisant tranquillement.
Aussi près du palais, une elfe en tenue de voyage, même immaculée, et un antargon dépenaillé contrastait avec le luxe ambiant. Un garde les suivi même sur quelques rues, jusqu'à ce qu'ils se dirigent vers la rivière. Ils s'arrêtèrent entre les racines d'un saule où Teriani se fabriqua un hamac et où s'immergea Nériam.
- Et que faisais tu là-bas, lui demanda l'elfe.
- Je suis devenu un joueur professionnel. De tous types de jeux.
De tous types de jeux légaux. J'évite les arènes et les repères de bandits trop mal famés. Donc les tavernes sont mon lieu de travail. Et toi ? Que deviens tu ?
- Je grappille dans les champs. Et j'écris des glyphes de développement pour compenser.
- Tu ne devient pas une divinité, hein ? Jughur nous a suffit j'espère.
- Oui, j'ai compris à quel point c'est important. Je fais attention à devenir une légende.
- Comme nous tous. J'ai entendu parler d'un compteur humain capable de raconter l'histoire des explorateurs de l'Académie comme s'il en avait fait partie.
- Quel rapport ?
- Il s'aide avec du sable vivant, pour conter.
- Zacharie ? Alors Cilm ...
- Je pense. Ça doit être difficile pour eux, mais eux aussi essayent de rester dans les mémoires sans se faire adorer. Par contre, aucune nouvelle de Juma.
- Tu n'as pas répondu à ma question. Pourquoi es-tu venu à Éa ? Tu est loin des tiens.
- Ils ont disparu, comme pour nous tous. L'éternité, ça leur en laisse le temps.
- Excuse moi. Je ne devrais pas parler de ça.
- Ce n'est pas grave. L'un de nous aurait fini par aborder le sujet, et il est clos maintenant. Si tu as besoin d'aide durant ton séjour, utilise ça. Ajouta-il en lui lançant une carte enluminée avec art. Bonne nuit.
Il plongea et je le suivi. Cela faisait près d'un millénaire que je ne l'avais pas vu, et que je suivais Teriani. J'avais besoin de changement.
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Sous les ténèbres scintillantes
Fantasiles chroniques de l'Académie ne sont que fragments. Cependant celles de Gif'ra sont elles complètes et exhaustives. Vous pouvez doncetudier les légendes de cette ère de façon sûre