Chapitre 31

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Mon meilleur ami se tenait devant moi, et je n’en croyais pas mes yeux. C’était incroyable, impensable… Comment m’avait-il retrouvé ? Il était comme je l’avais quitté : grand, athlétique, le regard rieur. Au fil des mois, sa carrure s’était néanmoins développée pour laisser ressortir de larges et puissantes épaules. Son teint était désormais bronzé et son sourire, lorsqu’il me vit, fit monter des larmes au coin de mes yeux. J’éclatai en sanglot, et dans un même élan désespéré, nous courûmes dans les bras l’un de l’autre. Le choc de son corps contre le mien fut brutal, comme si je revenais à la réalité, après avoir passé des mois à rêver. Je me blottis tellement fort contre lui, respirant sa bonne odeur.

Je n’admettais toujours pas ce qui se produisait et avais peur qu’il disparaisse d’un moment à un autre. Pour sa part, il me serrait au point de m’asphyxier, mais cela m’était complètement égal, au contraire. Il me berçait doucement en répétant sans cesse mon prénom. Un sanglot étouffé sortit du fond de sa gorge. Nous pleurions tout les deux à chaudes larmes. Finalement, il releva la tête et ses yeux bleus ciels, remplis de larmes, rencontrèrent les miens. Il posa délicatement ses deux mains sur mes joues et murmura en souriant :

-          J’ai cru que je t’avais perdue. J’ai eu si peur.

-          Tu m’as retrouvée… sanglotai-je au bord de la crise de nerf. Tu vas bien. Dieux merci, tu vas bien…

Il se blottit à nouveau contre moi, me caressant doucement les cheveux.

-          Chut, je suis là maintenant, tout va bien se passer.

J’hochai frénétiquement la tête, ne voulant plus le lâcher. Il m’avait tellement manqué ! Une part de moi m’avait été arrachée pendant des mois, et j’avais enfin la sensation de pouvoir à nouveau respirer. Tant d’inquiétude et de souffrance !

Lorsque je relevai à nouveau la tête pour le regarder, une silhouette derrière lui attira mon attention. Aaron se tenait prêt de la fontaine, visiblement sous le choc. Son corps s’était arrêté, comme en plein mouvement, dès qu’il nous avait aperçus. Il avait tout vu et tout entendu. La confusion marquait ses traits, vite remplacée par la déception. Il contracta fortement la mâchoire, plissa les paupières et fit demi-tour, sans un regard pour moi. Tant pis, je m’expliquerai plus, tard. Je n’avais en rien envie de gâcher ce moment de retrouvailles. Je regardais à nouveau les yeux d’Alexandre qui me fixaient avec adoration.

Je lui pris la main et l’entrainai vers le jardin. Nous avions tant de choses à nous raconter, après tout ce temps ! D’un signe de tête, Eulalie me fit comprendre que cela ne la dérangeait pas de travailler seule. Bien sûr, elle voudrait des explications en temps voulu, mais pour l’heure, je me consacrais entièrement à mon meilleur ami. Il me pressa la main et nous sortîmes pour retrouver l’air frai du dehors. Depuis la tempête, il ne faisait plus du tout la même chaleur, au contraire, une sorte d’humidité flottait en permanence. Malgré tout, le ciel était à nouveau dégagé, si on ne prenait pas en compte quelques nuages épars.

Alexandre me pressa la main et nous partîmes nous assoir contre un arbre, après avoir marché quelques minutes. Nous continuions à nous regarder, savourant la présence réconfortante d’un ami d’enfance.

-          Tu vis dans une belle maison, commença-t-il de son doux sourire, j’espère que tes maitres te traitent bien.

-          Oui, assurai-je, ils sont tous très avenants, sauf Carmen, la mère qui me déteste.

-          C’est elle qui t’a fait cela ? demanda-t-il en effleurant l’hématome sur ma joue, comme Aaron la veille.

-          Oui, mais ne te fais pas de soucis pour moi, je vais très bien. Je m’occupe généralement de Silène, c’est sa fille, et elle semble m’apprécier.

La tête baisséeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant