Elle était assise, le visage tourné vers la vitre et dans le fond du bus, dans le sens de la route. Blonde aux yeux bleus, elle était des plus banales, mais pourtant très jolie. Je suppose que le bus avait du faire un long trajet avant que quelqu'un ne monte, car elle tourna la tête vers moi, lorsque mon pied se posa dans le véhicule. Ses yeux ; vers le bas, vers le haut, puis de retour sur la vitre, un sourire au coin des lèvres. Son inspection avait l'air de s'être révélée satisfaisante ; de même pour la mienne. Alors je me plaçai à ses côtés, malgré les nombreuses places disponibles. Je posai mon sac à dos à mes pieds, et me rapprochai légèrement d'elle.
J'hésitai alors : devais-je commencer la conversation ? Visiblement pas, car la blonde tourna la tête vers moi, et me tendit ses doigts fins. Se présentant comme Rachel, elle me serra la main. Je me présentai, et elle me dit :
"Ravie de te recontrer, Charlie."Le trajet de ce bus devait devait être long, car c'est au bout de ce qui me parut des heures que la jeune fille ré-engagea la conversation.
"Où vas-tu, Charlie ?
- Nulle part. Je ne prend jamais le bus. J'avais quelque chose de prévu, mais sous cette chaleur écrasante, j'ai préféré monter ici pour faire passer le temps. Et toi ?
- Je rentre chez moi. Tu souhaiterais venir ?"Drôle de sensation que l'on ressent à ce moment là, lorsqu'on commence à s'attacher à cette personne encore inconnue. J'acceptai alors sa proposition avec plaisir ; je n'avais rien de mieux à faire. Et le bus roulait, roulait, et roulait encore. Finalement, et sans surprise, nous descendîmes au terminus. Quelques mètres plus loin, cachée dans les fougères se dressait une bâtisse plutôt moderne. Les yeux de Rachel me captivèrent jusqu'à notre entrée chez elle, alors qu'elle me tenait la main.
C'est fou comme certains détails s'impriment dans notre mémoire. Je me souviens de sa longue chevelure, qu'elle avait l'air de porter depuis l'enfance, aux vues des cadres accrochés dans son entrée. En revanche, je serai incapable de savoir ce qu'elle me dit après : ses parents étaient-ils chez elle, à ce moment là, ou non ? Probablement pas, étant donné qu'une fois dans sa chambre aux murs épurés, on s'embrassa.
Voilà, c'est comme ça, c'est arrivé. On ne connaissait même pas l'âge de l'autre, que nos deux bouches se mêlaient déjà. Et mes mains se perdirent dans sa chevelure agréable, tandis que les siennes parcouraient mon dos, soulevant mon t-shirt. Perdant légèrement l'équilibre, mais nos bouches toujours liées par cette étrange force, nous tombions sur son lit. Inconfortable, mais parfait pour nous à ce moment là. Ses mains changèrent de position pour venir sur mon ventre, et son souffle s'accélèra, en rythme avec le mien. Je passai alors ma main sur sa joue, et nous nous séparions, le coeur battant. Je ne remaquai qu'après coup que mes chaussures n'étaient plus à mes pieds, tout comme les siennes. Je me redressai, et, repoussant une mèche de cheveux, je la regardai droit dans les yeux. Elle me dit :
"J'avais envie de tester quelque chose de nouveau. Et si on se contentait de connaître nos prénoms ?
- Avec joie, Rachel."Elle me conseilla de remettre mes chaussures et de rentrer chez moi, car elle ignorait ce qu'elle était capable de faire en ma présence.
" Qu'est-ce que tu veux dire par là ?
- Je ne sais pas si je dois t'embrasser ou t'offrir un jus de fruit. Alors le mieux, c'est que tu partes, et qu'on se retrouve demain.
- On se retrouvera ?
- Je n'en sais rien."
Alors je quittai sa chambre, ainsi que sa maison, et ses fougères, sans un mot. Je n'ai pas souvenir d'avoir énormément réfléchi à la situation et à ce que nous venions de faire, sur le chemin du retour. J'avais moi aussi envier de goûter à de nouvelles choses, de m'occupper en ce début d'été qui semblait si ennyeux.
Mais, elle avait raison, je ne sais comment ; le lendemain, nos chemins se recroisèrent.
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Le Bus
Short StoryIl y a ceux qui prennent le bus tous les jours et à qui il n'arrive rien. Puis il y a ceux qui ne le prennent presque jamais et à qui il arrive des choses merveilleuses, inoubliables. Charlie appartient à la deuxième catégorie. Et Rachel, à une au...