Chapitre 25 : Le bazar

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Staïlz part avec un petit 'pouf' qui résonne encore dans la pièce. Personne ne bouge, personne ne parle. On ne sait pas quoi faire. Nous n'avons pas eu d'instructions pour les moments d'absence du Passeur.

- Est-ce que quelqu'un peut me détacher ? Demande Naro avec un calme forcé.

Il est toujours affalé dans le canapé, toujours attaché et avec une goutte de sang qui dévale son menton.
Caï fait un pas en avant pour le libérer mais Lehcim l'arrête.

- Il est peut-être encore dangereux, suppose-t-il, plus par envie de défier le vampire que parce qu'il a de vrais soupçons.
- Je vais bien mieux, contredit l'autre.
- Je suis sûr que... commence Lehcim.
- N'importe quoi, soupirai-je. Il faudrait que vous arrêtiez de vous chamailler comme deux enfants.

Je m'avance vers Naro et défais, non sans mal, les nœuds qu'avaient faits le Passeur. Retrouvant sa liberté, le vampire s'étire et masse ses poignets endoloris où il a des bracelets rouges et mauves dessinés. Il grimace.

- C'est rien par rapport à ce que tu as fait à Staïlz, assène Edilyn.

Je ne pensais pas, qu'elle, serait du style à parler comme ça. Je la pensais douce et subtile. Je me suis trompée ? Ou c'est que la situation l'a vraiment retournée ?

- Comment vous voulez que je vive ? S'insurge le vampire avec une voix légèrement plus aiguë que d'ordinaire. C'est comme ça. C'est ma nature. La nourriture 'normale' ne me sers à rien. J'ai besoin de sang.

Il avait dit sa dernière phrase dans un souffle.

- Ce n'est pas sa faute, dis-je, juste assez fort pour qu'ils m'entendent.
- On ne sait même pas ce qu'il t'aurait fait et toi, tu le défends ? Fait Lehcim, étonné.
- Mais c'est comme vous. Il est comme vous. Anya est une Folle, elle ne peut pas s'empêcher d'être folle. Lehcim, tu es un loup-garou et tu ne peux pas empêcher ta transformation. Et puis Edilyn est une métamorphe et elle se métamophose. Ça fait partie de vous. Vous avez chacun votre particularité.

Ils ne discutent pas et partent chacun de leur côté. Naro va à l'étage. Lehcim s'installe en tailleur devant la télé, fouillant dans sa mémoire pour se rappeler comment l'allumer. Anya et Edilyn vont dans la cour arrière, sûrement pour jouer à chat, à cache-cache ou autre. Et Caï ne bouge pas.

- C'était un beau discours, me dit-il, l'air de rien.
- Oh ça va, hein, soufflai-je.
- Non, vraiment.
- Merci, murmurai-je après un temps d'hésitation.

Sans rien avoir à ajouter, on reste plantés l'un face à l'autre. Puis, il bouge en premier, allant chercher le grimoire que Staïlz lui a donné. Il revient vers moi, portant le gros ouvrage, et s'adosse au mur.

- Je vais m'exercer un peu, me dit-il en souriant.

Il feuillette distraitement les pages poussiéreuses pendant un instant puis s'arrête sur l'une d'elle et la parcoure rapidement.

- Oh... Fait-il, surpris. J'ai bienfait de jeter un coup d'œil à ça tout de suite.
- Qu'est-ce qu'il y a ?
- Il y a que la potion de Lehcim va pas se faire toute seule et que ça risque de prendre un bout de temps.

Il se dirige vers le placard où Staïlz l'avait aidé à ranger tout son attirail d'apprenti sorcier et en sort presque tout ce qu'il y a, étalant son bric à brac sur la table à manger.

- Même avec ce qu'il y a là-dedans, il manque un truc, marmonne-t-il.
- Quoi ?
- Une aiguille de pin.
- J'en ai vu quelques uns près du sentier de tout à l'heure, dit Naro en redescendant l'escalier qui grince à chacun de ses pas.
- Tu m'y emmènes ?
- Ça marche.
- Je viens avec vous ! Crie Anya qui rentre par la porte d'entrée.
- Hors de question, s'écrient en même temps les deux autres.
- J'ai le droit de venir moi ? Demandais-je.
- Bien sûr, répond aussitôt Caï.

Naro m'analyse rapidement.

- Si tu veux.
- Mais ! C'est pas juste ! Râle Anya. Elle peut venir et pas moi !?
- La vie est injuste, lance Naro, déjà sur le perron.

On prend toutes les précautions du monde pour traverser la route et on reprend le chemin d'il y a à peine une demie-heure.

Arrivés au pied d'un pin, Caï s'accroupit pour ramasser ce dont il a besoin.
Naro m'agrippe le bras et me tire à part, pour que le sorcier ne nous entende pas.

- Qu'est-ce qu'il y a ? Le questionnai-je.
- Tu as peur de moi ? Dit-il du tac au tac.
- Quoi ? Mais c'est quoi cette ques...
- Est-ce que je te fais peur ?

Il marque une pause pendant laquelle je le regarde sans totalement comprendre.

- Maintenant que tu as vu la pire de mes faces.

Je prends​ un moment pour réfléchir à comment formuler ma phrase.

- Disons qu'en deux jours,... il y a eu mon frère qui m'a presque attaquée lui aussi, le changement de monde... et puis toi qui... Donc ça va. Pour tout ce qui s'est passé, je pense que je réagis​ assez bien. Et puis... ne t'en fais pas, on a tous un mauvais côté... qui finit par sortir un jour... Je n'ai pas peur de toi.

Il reste là, planté devant moi, un air quelque peu reconnaissant sur le visage.

- Tout va bien ? Demande Caï, méfiant, en arrivant.
- Oui, répondis-je.
- Très bien, fait le vampire.

Il nous rejoint en trois pas et passe entre Naro et moi.

- On peut rentrer, j'ai ce qu'il me faut.
- Parfait, commente l'autre.

Et on retourne à la maison, avançant en file, les uns derrière les autres​.

On traverse la route dans l'autre sens et je rentre en première.

- Mais qu'est-ce qu'il s'est passé ici !? M'écriais-je, encore sur le seuil de la porte.

La pièce était sens dessus dessous. Le canapé renversé, les fauteuils pareil et le tapis les recouvrant partiellement. La télé était​ par terre et faisait un bruit d'enfer, le son certainement augmenté au maximum. Tous les bibelots des étagères étaient éparpillés au sol. Le porte-manteau était en équilibre sur le bord de la table et la nappe avait atterrit on ne sait où.

- Ça, tu vas me le payer ! Hurle Lehcim depuis l'étage.

Et on voit Anya dégringoler les escaliers et s'étaler au sol, hilare. Puis vient Edilyn, suivie de près par Lehcim qui la poursuit. Lehcim est partagé entre la crise de colère et de fou rire et Edilyn rit ouvertement. Ils sautent au-dessus de la Folle qui ne s'est pas encore relevée et tournent autour de la table au moins deux fois avant de nous apercevoir et de s'arrêter complètement.
Je n'avais pas bougé de l'encadrement de la porte et les regarde, éberluée. Comment, en si peu de temps, ces trois-là avaient réussi à faire un désordre pareil ?
Naro et Caï regardent chacun au-dessus d'une de mes épaules, se posant sans doute la même question que moi.

- Euh... commence Lehcim.

C'est ce moment que choisi le Passeur pour revenir.

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Et voilà ! Je trouve que pour un fois, le titre est particulièrement adapté​ au chapitre.
J'espère qu'il vous a plu. 😘

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