BUNNY BITCH

Chapitre 10

Bunny.

La pièce est dans le noir total. Où suis-je ? Mon cerveau se reconnecte dans la seconde quand je comprends où mon subconscient veux m'emmener. Dans les ténèbres qui régissent ma foutue vie.

Non, pitié... Pas ça...

Je ferme douloureusement mes yeux, puis les ouvre sur mon pire cauchemar. Sur ma vie, mon passé, mes blessures... La pièce s'éclaire alors me montrant les couleurs des vitraux où se reflètent les rayons du soleil du mois d'août. Mes souvenirs me hantent et semblent si réels que je les revis comme si j'y étais à chaque fois.

Il faut que je me réveille de toute urgence !

Les frissons dégringolent le long de mon échine quand cette femme entame Amazing Grace en gospel et que je marche derrière cette boite qui renferme l'amour de ma vie. Des gémissements de douleurs et des reniflements se font entendre dans cette satané église. Je sais que c'est les miens. Je m'approche du cercueil, deux roses à la main, une blanche et une rouge, symbole de la passion et de la pureté. Une pour chacun de mes disparus... Quand je suis assez près, je m'écroule dessus et laisse mon chagrin s'exprimer sans honte. J'ai réussi à faire fermer l'église aux passants. Notre histoire a suffisamment été médiatisée...

À part les journalistes postés devant l'église, je suis seule avec... Lui. Qu'est-ce que je souffre... Mon dieu, ce n'est pas vrai... Je ne peux pas l'avoir perdu lui aussi. Qu'est-ce que j'ai pu faire de mauvais dans ma vie pour mériter une existence pleine de souffrances ?

-Priez mon enfant.

Je lève le regard vers le curé qui vient de faire son apparition et retiens mes sanglots devant la pitié que son regard affiche.

-Priez pourquoi ? Pour qu'on me rende Michelangelo ? Pour partir avec lui ? Pour retrouver les seules personnes qui m'ont aimés dans ma vie ? C'est pour ça que vous voulez que je prie ?!

Je hurle de rage contre ce prêtre parce que je suis en colère contre moi, contre cet homme de Dieu et surtout contre lui, ce putain de cadavre dans ce maudit cercueil qui m'a laissé seule, abandonnée dans un monde sans goût, sans vie...

-Vous êtes en colère, je comprends mais vous avez le sexe maintenant...

-Quoi ?!

Je me réveille en sursaut, devant un Jamie inquiet. Les yeux exorbités, la mine fatiguée et les mains qui me retiennent fermement. Quand je regarde autour de moi, tout est blanc, stérile... La planque. Putain Dieu merci, c'était un cauchemar. Je ne revis pas la situation encore une fois. Je reprends mon souffle puis me dégage de son emprise en le repoussant.

-Qu'est-ce que tu veux ? Beuglé-je.

-Tu te sens bien ?

-Parfaitement bien pourquoi ? dis-je en feignant l'indifférence.

Il penche sa tête sur le côté et je déteste quand les gens font cela. Leur regard se voile de pitié, de désolation. Bordel ! Je n'ai pas besoin de ça ! Certainement pas.

Je me relève du lit puis traverse la chambre sans attendre qu'il s'exprime. Je me fous de ce qu'il peut me raconter, je vais me servir un triple bourbon. J'ai besoin de faire taire mes émotions. Je sais bien pourquoi CE souvenir est apparu maintenant. Je suis planquée ici avec un avenir incertain, pourtant si Jamie savait combien j'ai envie de me prendre cette balle dans la tête, combien je suis lâche de ne pas me bousiller la gueule autrement qu'avec des parties de jambes en l'air qui ne soulagent que partiellement mes maux. Il ne comprendrait rien, il est tellement loin de tout ça, tellement loin de cette souffrance, de ma décadence.