Keep It In The Closet

chapitre 1

Les coups de pinceaux ne cessent de pleuvoir sur la toile, les couleurs se mélangent parfaitement, faisant ressortir les yeux cuivrés de ce visage dont je ne trouve ni la forme du nez ni celle de la bouche ou de la mâchoire. Je suis clairement en panne d'inspiration.

Une clope dans la main droite, le pinceau dans l'autre et "Empty pack of cigarettes" de Joseph Angel à fond dans mon appartement, j'étais certaine de trouver l'inspiration. Mais elle se fait désirer, et je déteste ça. Je jette un coup d'œil furtif vers l'horloge violette accrochée près d'une fenêtre, une heure dix du matin. Génial, je m'étais réveillée en imaginant les yeux et maintenant, je n'ai plus d'idée. Et je ne peux pas me rendormir. Super.

Éteignant ma chaîne, je nettoie mes pinceaux et vais m'habiller, ce n'était pas en nuisette que j'allais sortir quand même. Ma robe enfilée, j'accours dans ma salle de bain pour me maquiller légèrement, ajoutant tout de même mon rouge à lèvre prune matte -mon préféré- et me coiffe à la va-vite. Me jugeant en bon état, j'enfile ma veste et sort en fermant bien la porte à clé. Pas la peine qu'on me cambriole. Je suis à peine dans le hall que mon téléphone sonne déjà.

- Ouais. Dis-je en décrochant sans regarder le nom sur mon écran.

- Salut, on peut se voir ? Me demande Jullian.

- Ouais, justement je vais au Trust là.

- Super, je te rejoins dans dix minutes et on va chez moi ? Dit-il avec une voix pleine de sous-entendus.

- Ouais, j'ai besoin de décompresser, alors grouille toi. Dis-je avant de raccrocher.

Jullian et moi sommes des sexfriends, ou disons plus qu'il est mon plan cul et que je suis le sien, en fait on est pas amis. On s'apprécie physiquement, on prend du plaisir sans attache ni jalousie, chacun est libre d'aller voir qui il veut quand il veut et ça nous va très bien comme ça.

En entrant dans le bar, je retrouve cette ambiance familière de musique latine et d'alcool que j'apprécie particulièrement. J'ai découvert cet endroit il y a six mois, quand je suis revenue ici. J'y vais régulièrement quand je suis en quête d'inspiration et parce que j'adore l'ambiance. Ici personne ne se prend la tête et se détend en se déhanchant sur la salsa en sirotant un bon mojito ou une tequila. Je m'assieds sur un tabouret libre, commandant un mojito qui arrive dans la seconde, le gérant connaît mes habitudes.

- Vous peignez ? M'interroge une voix diablement sexy.

- Oui, comment... Dis-je en me tournant vers cette voix.

- Vous avez de la peinture sur les mains et un peu sur le visage aussi. Me coupe-t-il avec un sourire en coin lui aussi très sexy.

Merde, c'est vrai que je me suis juste habillée et maquillée sans regarder l'état de ma "propreté" on va dire, de plus près.

- Ah. Dis-je pauvrement.

Merde alors ce mec est vraiment... une pure bombe atomique. Il doit être un peu plus vieux que moi, vingt-cinq ans peut-être un peu plus, ses cheveux foncés font ressortir le brun cuivré de ses yeux, enfin c'est ce que je distingue avec l'éclairage, et mettent vraiment les traits parfaitement symétriques de son visage en valeur. Sur sa mâchoire carrée, une petite barbe de trois jours commence à apparaître. Et ses lèvres... pleines et pulpeuse sans trop l'être. Justes parfaites...

- Vous êtes observateur. Dis-je au bout de quelques secondes.

Mais quelle conne ! C'est tout ce que tu trouves à dire ? M'engueule ma petite voix intérieure.

- Oui, c'est vrai. Dit-il en plantant son regard dans le mien.

Je délaisse mon mojito et le défie du regard, le perdant est celui qui détournera les yeux le premier, et je suis forte à ce jeu là. Ce jeu de regard dure un moment, ses iris cuivrés rivés sur les miens, bleus glacials. Le feu contre la glace. Notre contact se brise quand une main se pose sur mon épaule. Je sursaute en découvrant Jullian, muni de son éternel sourire pervers. Avant de le regarder, j'eus le temps de voir les joues de ce mec frémir. Il voulait se marrer ?