Chapitre 8

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Thiefaine

      Mes parents sont partis peu de temps après le départ de Louise. Ma mère n'a pas cessé de croire que j'avais bougé, mais bien-sûre aucun médecin ne la cru. Je ne pense pas non plus que mon beau-père la soutienne là-dessus. Il n'y a qu'une seule personne qui aurait pu croire en ses mots : Jade.

En parlant de ma douce rose, ça fait quelques temps que je ne l'ai pas vu. Même si je n'ai plus aucunes notions de temps, je sais qu'on est l'après-midi. Le matin, l'Aide-Soignant passe pour me faire une toilette. Je la remarque au bruit qu'elle fait dans la chambre. Elle ne reste jamais bien longtemps, vingt minutes à tout casser. Elle ne parle jamais. Après tout, à quoi bon parler à quelqu'un qui ne vous répondra jamais ? L'après-midi, il y a les femmes de ménages, les ASH les appellent-ont, aujourd'hui. Cela veut dire Agent des Services Hospitaliers, je crois. C'est en quelques sortes les larbins des médecins, infirmières et autres fonctionnaires. Je détesterai faire ce métier. Je n'ai jamais vu d'homme exercé cette profession. Qui voudrait ce ridiculisé à ce point ? Sûrement aucun homme. Je sais aussi que c'est l'après-midi lorsque j'ai des visites. Même si je n'en ai pas tant que ça. Hormis mes parents et mon petit cercle d'amis, il n'y a pas grand monde qui vient me voir, et mes amis ne viennent pas tous les jours. Sur ce point, je les comprends. Il est normal qu'ils vivent leur propre vie. Je préfère ça plutôt qu'ils se morfondent sur mon simplet lit d'hôpital.

La porte claque, j'espère sincèrement que c'est elle. La femme qui hante chacune de mes pensées. Des pas résonnent à mes oreilles, et quelqu'un s'assoit lourdement sur la chaise près du lit. Je sais déjà que ce n'est pas Jade. Elle aurait déjà prononcé quelque chose. Elle n'est pas du genre à rester silencieuse. Mais si ce n'est pas elle, de qui s'agit-il ? Consciemment, je sursaute lorsque je sens une main serrer la mienne. La main est douce et tendre. Je pense que c'est une femme. C'est dur à expliquer ce que je ressens actuellement. Je n'avais jamais senti personne me touchait depuis que je suis dans ce foutue coma. Comment cela se fait-il ? Je ne comprends foutrement pas ce qui est en train de m'arriver.

- Thief'...

Cette voix que je comparais autrefois à une mélodie. J'aimerai à présent qu'elle me lâche la main, même si sentir quelque chose de quelqu'un me fait me sentir vivant et plein de vie. Pourquoi est-elle venue ? Je ne l'avais plus jamais entendu depuis notre dernière dispute, avant mon accident.

- Excuse-moi de ne pas être venue plus tôt...

Mais je ne voulais pas te voir de toute façon, aimerai-je lui avouer. C'est sans doute mauvais de dire ça, mais cette fille m'a entraîné dans ma chute. Si je ne l'avais pas rencontré, je ne serai sans doute jamais devenu ce petit con prétentieux et arrogant.

- Je suis pourtant certaine que tu ne voulais pas me voir.

Au moins, elle est plus aussi stupide qu'avant. Peut-être a-t-elle murie en quelques mois ? J'ai toujours été certain que tout le monde pouvait changer un jour. Sauf moi.

- Mais ta mère m'a appelé et m'a juré t'avoir vu bouger. J'ai réfléchi une grande partie de la journée avant de me déplacer jusqu'ici....

Elle ? Elle aurait réfléchi ? Ce serait effectivement nouveau. Avant, elle parlait tout le temps sans réfléchir. Elle sortait tout un tas de conneries devant mes parents lorsqu'elle venait dîner chez nous. Cela rendait mon père fou furieux, mais je m'en foutais lourdement. La porte de la chambre s'ouvre à nouveau, plus brusquement cependant. Et comme à chaque fois que cette porte s'ouvre, j'espère que ce soit toujours la même personne.

- Qui êtes-vous ?

Jade. Enfin, tu es revenu. Je mentirai si je n'avouai pas que je craignais qu'elle m'ait oublié.

- Vous, qui êtes-vous ?
- Oh, oui, pardon. Je m'appelle Jade Jefferson, l'interne de gardes. Je viens prendre les constantes de Thiefaine.
- Vous appelez tous vos patients par leur prénom ?

Jade bafouille. Cette connasse de toujours a dû la rendre mal à l'aise.

- Je plaisante, rit-elle déjà.

Son rire, lui, n'a pas changé. Il est toujours aussi beau, malgré moi. Elle me lâche enfin la main et semble se lever pour s'approcher de Jade sans doute.

- Je suis Aimée Dawson, une vieille amie de Thiefaine.

En réalité, Aimée est ma petite amie. Enfin, elle l'était quand j'étais encore en vivante aux yeux du monde. On trainait beaucoup ensemble, on faisait pas mal de conneries, je me sentais existé à travers elle et j'aimais ça. Mais la veille de mon accident, je l'ai surprise avec un autre type et j'ai rompu.

- Oh, je ne vous avais encore jamais vu.
- Je... C'est juste que...
- C'est compliqué, c'est ça ?
- Oui, si on veut.

Elles rient ensemble. Pourrait-elle s'entendre si Aimée savait ce que je pense de Jade ? Et si Jade connaissait mon histoire avec Aimée ? Hélas, je ne le serais sans doute jamais.

- Vous permettez que je vérifie ses constantes ?
- Je partais de toute façon, soupire Aimée.
- Oh, non, vous pouvez rester. Mais je vous demanderai simplement de sortir une minute.
- Hm, d'accord.

La porte claque quelques secondes après la demande de Jade. Je ne comprends pas pourquoi elle l'a fait sortir. Elle ne le fait pas habituellement. Je l'entends tourner autour de mon lit. Je pense qu'elle vérifie que je vais bien, comme elle fait à son habitude. Elle marque, s'énerve sans doute sur son calepin, puis je n'entends plus rien. Je sens simplement son souffle s'écraser contre mon visage. J'essaie plus que tout de renifler, mais je ne sens rien de son parfum ou d'elle. Sa bouche se dépose sur ma joue. J'entends l'appareil indiquant mes battements de cœur sonnait. Il doit battre excessivement vite s'il se met à sonner. Je n'ai pas vu m'en empêcher. Ce baiser sur ma joue m'a secoué et me donne encore plus envie de me battre pour me réveiller. Elle s'éloigne, je ne sens plus sa respiration.

- Elle doit déconner cette machine.

Elle marque une pause et je l'entends taper dessus. Je suis un peu déçu qu'elle n'est pas trouver ça suspicieux que la machine s'accélère lorsqu'elle m'a embrassé.

- Tu frisonnes ! Les fenêtres ne sont pourtant pas ouvertes...

Parce que je n'ai pas froid et que la machine ne déconne pas, c'est simplement toi qui me fais ressentir ce genre de choses que je ne pourrai pas définir.

- Thiefaine... Il faut que tu te réveilles rapidement... Ils comptent te débrancher, je t'en supplie...

Pourquoi me supplie-t-elle de m'éveiller ? Pour elle, je ne devrais représenter qu'un numéro de chambre, comme tous les autres internes de ce service.

La porte s'ouvre encore. Je crois qu'elle ne sait jamais autant ouvert en une seule journée. Je suis sûr que c'est Aimée qui nous dérange.

- J'ai cru entendre un drôle de bruit.
- Ce n'était rien.
- Je peux vous posez une question ?
- Bien-sûre, allez-y.
- Est-ce que... Parmi l'une de ses machines... Il y en aurait une qui indiquerait qu'il a bougé ?

Je reconnais qu'elle a posé une bonne question, mais je suis pratiquement sûr de la réponse que lui donnera Jade.

- Hélas, non. Cela ne peut être que visuelle.
- Donc si un visiteur vous dit qu'il a bougeait, vous êtes obligé d'y croire ?
- Le cas de Thiefaine est complexe, mais moi, personnellement, j'y croirai.
- Alors expliquez-moi, pourquoi, hier lorsque la mère de Thiefaine a avoué avoir vu son fils bougeait, personne ne l'a cru ?

Aimée m'impressionne. Elle a véritablement changé. Je me demande si c'est mon accident qui l'a amené à se remettre autant en question.

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Hello mes chatons!

J'ai enfin pu vous écrire une suite. J'espère qu'elle vous plait et vous incitera à commenter.

Bisous,
Rxvglem

Indispensable Où les histoires vivent. Découvrez maintenant