Chapitre 13 : Révelation

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Il est à peine 8h du matin lorsque je franchis le pas de la porte d'un pas décidé. Je me dirige vers le parc, où peut être trouverai-je une once de sérénité.

Cette nuit a été affreuse, peuplée de cauchemars où chaque fois, je tombais en silence, dans un gouffre sans fin. J'ai finalement erré dans l'appartement, en pleurant sans bruit pour ne pas éveiller ma famille. J'étais dans un désarroi complet.
Ce matin, j'ai simplement besoin de réfléchir, de décortiquer toute cette histoire afin de m'y repérer un peu mieux, de comprendre un peu mieux.
Comment ont-ils pu me cacher cela ? Comment Noah a-t-il pu ne rien me dire ? Je me sentais trahie.

-Il fait beau aujourd'hui n'est-ce pas ?

Je levai les yeux du sol et hochai la tête en esquissant un sourire poli vers le passant que je venais de croiser.
Il tenait un bouquet de roses blanches à la main, et semblait rayonner de joie.   Littéralement. Je crus voir une aura dorée l'entourer, comme si son bonheur ressortait, comme s'il voulait le partager au monde entier.
Il souriait, comme si c'était le seul usage de sa bouche et j'aurai pu passer des heures à le contempler, mais cette vérité me rendit triste.

Cette vérité, c'est que les gens heureux sont rares de nos jours. Très rares. Et c'était certainement la première fois de ma vie que je croisais quelqu'un de sincèrement heureux dans la rue. Quelqu'un d'inconnu qui m'adressait la parole sans aucune gêne, la voix débordante de gaité.
Cet homme fait partie des gens précieux sur Terre.

J'avance dans le parc désert. Le sol est encore humide de rosée et les branches des arbres oscillent de gauche à droite, bercés par la brise.
Je cueille au passage une pomme de pin et hume son parfum que j'aime tant. Je sens son doux arôme m'apaiser un peu l'esprit. Mon banc habituel est libre. Alors je m'assieds confortablement et sors mon carnet "éponge"

Ma mère m'a offert ce carnet de cuir marron, il y a quelques mois, en disant que je pourrais parler (ou plutôt écrire) dedans sans être interrompue. Et ça marche. J'ai découverte la fidèle alliée qu'est l'écriture. L'écriture personnelle. Je n'aime pas le mot "journal intime" mais, on peut dire que ce carnet en fait office.

J'y raconte mes petits soucis, souvent accompagnés de dessins caricaturaux lorsque je parle de personnes en particulier. Mais je ne raconte pas seulement ma vie dedans. J'y note tout. Tout ce qui modèle mon monde, toutes les petites choses que j'observe en partant la nouvelle couleur de cheveux de la boulangère jusqu'au chant des oiseaux. C'est mon échappatoire.

Alors je sors mon stylo noir et j'écris ma peine, ma colère jusqu'à en avoir mal au poignet. Je noircis les pages une à une, de mon écriture en pattes de mouches, en n'omettant aucun détail. Ma main est en transe, contrôlé par mon esprit, et parcourt à toute vitesse les lignes. Je danse avec les mots, je fais vivre toutes les personnes qui m'entourent à travers mes dessins. Je me vide.

C'est comme si tout sortait de ma tête pour se ranger dans ce carnet, cet amas de feuille assemblées qui, sous ses airs insignifiants, est d'une grande puissance.

Lorsque je le referme enfin, la matinée est déjà bien avancée, et je suis affamée, peut être parce que toute mon énergie a été aspirée par le carnet éponge. Je me sens mieux. Beaucoup mieux, même.

Mais pendant que j'écrivais, que je mettais mes idées en place, des question remontaient à la surface.
Comment mon père pouvait être sûr qu'il s'agissait bien de la mère de Louis et de Mia ? Se connaissait ils ? Et quel rapport avec l'accident ?

Ils n'avaient peut être pas terminées leurs explications. Il fallait que j'en sache plus.

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