6. Une revanche Titanesque

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Je claquais la porte de ma chambre avant de me laisser glisser jusqu'au sol. Quel après-midi !

Le cours de sport s'était terminé dans un silence bien étrange. Seuls les crissements de nos chaussures de sport et les "HAN !" ridicules de Charlotte à chaque revers avaient osé troubler ce silence. Pour une fille qui venait de pleurer les larmes de son corps quelques minutes plus tôt, je la trouvais étrangement joyeuse. Parfois j'étais tentée de croire les bruits de couloirs à son sujet, elle avait sûrement de problèmes mentaux... Mais je me ravisais aussitôt, je n'aimerai pas que l'on croit aux miens.

Depuis que j'avais été aperçue sur les comptes Snapchat de Nour puis Léo, les rumeurs sur moi avaient bon train :

"Askip elle a baisé Clément pour devenir plus populaire."
"Elle aurait mit un rateau à Ilkay, Clément ET Félix, une vraie garce."
"En vrai elle est même pas belle, je sais pas pourquoi elle fait la meuf..."
"Si Nour lui avait pas refait la carrosserie elle sortirait même pas de l'internat..."

Léo avait l'art et la manière du potin. Ce garçon était absolument au courant de tout, et même des choses qui ne s'étaient pas encore produites. Je finissais par croire qu'il était réellement Apollon et qu'il alimentait directement l'oracle du lycée, Sybel. Sa côte de popularité avait explosé depuis que Léo lui avait proposé d'être son tuteur. D'après les rumeurs, elle avait pleuré le jour où on lui avait annoncé la nouvelle. Prétendant qu'elle le savait déjà mais qu'elle n'imaginait pas que cette prophétie prendrait forme. Sybel était handicapée et elle souffrait probablement de problèmes d'estime de soi, comme nous tous d'ailleurs.

Douchée et changée je déjeunais en toute hâte avant de retourner en cours. La philosophie commençait enfin à rentrer dans mon cerveau et je devenais plus optimiste quant à l'épreuve du bac. Il faut savoir qu'en filière littéraire la philosophie est 7 fois plus importante que les autres matières en termes de coefficient. Un hors sujet peut coûter son diplôme. "Ou pire..." ajouterai Alice, "Tu pourrais y perdre ta mention !"

De retour dans ma chambre je me brossais les cheveux en me demandant si Clara devait être mise au courant de tout ça. J'avais insisté pour l'éloigner de ce genre de problèmes et je ne devais pas manquer à ma promesse. Je faisais taire la voix qui m'intimait de l'appeler immédiatement et de tout lui raconter. Un genre de sixième sens me disait qu'elle avait de très grandes révélations à me faire. J'avais créé une fissure dans les rangs de l'ennemi et il était peut-être enfin temps pour nous de porter notre premier coup.

L'énigme des olympiens était assez simple, et c'est justement ce qui la rendait si compliquée. Des gamins à fond dans un délire de la maternelle jusqu'à la Terminale. Des personnalités hautes en couleurs et des prises de tête en permanence. Une ambiance à cheval entre la suspicion et la trahison mais au-delà de tout, une cohésion quasi-indestructible. Un terrible secret devait probablement les lier, et à en juger l'indifférence de Kimya face à certains élèves, cela pourrait bien être plus grave que la disparition de Camille.

Je scrollais ma TL Instagram lorsque j'entendis un bruit de pas dans le couloir. Je reconnaissais mes voisines de chambre à leurs pas. Selon la lourdeur ou l'entrain du pas de quelqu'un je pouvais savoir de qui il s'agissait. Il était très tard et je ne reconnaissais pas ce bruit de pas qui s'intensifiait. Je retirais mon écouteur unique de l'oreille et fixais ma porte.

On venait dans ma direction. J'éteignais mes lumières et retenais ma respiration. Le bruit de pas s'interrompit et je me glissais délicatement vers ma porte. J'entendis une respiration à mes pieds. On vérifiait si je dormais bien. Je souri nerveusement, la personne allait sûrement se trahir.
Un froissement de feuille se fit entendre et je manquai de hurler. Le messager confirmait sa livraison au téléphone et je portai une main à ma bouche en reconnaissant la voix de Clément. J'attendis quelques minutes afin d'être sûr de son départ. Ce n'est qu'à ce moment-là que je décidais d'allumer ma lampe de chevet. Ma vue s'était habituée à l'obscurité et il me fallut quelques secondes pour réaliser qu'il ne s'agissait pas d'une feuille mais d'une enveloppe. A en juger le soin avec lequel l'enveloppe avait été scellé et l'heure tardive de la livraison je pouvais deviner l'expéditeur de ce cadeau empoisonné : Kimya Alade.

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