Chapitre 7

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Ce fut la première nuit que je passai sur le bateau et un mal de ventre s'aventurait dans mon estomac dès que le bateau tanguait.

Ali ne m'était pas d'une précieuse compagnie, bien trop occupé à vider le rhum des pirates. Le liquide ambré dégoulinait le long de ses lèvres et il suait à grosses gouttes. Son état était pitoyable et je commençai à gronder, intérieurement.

-Ton père te fait honte, gamin ?

Je me tournai vers la voix et découvris, à mon plus grand regret, le détestable capitaine qui vida le contenu de son verre d'une seule traite.

-Il faut que je m'habitue à la piraterie, répondis-je simplement en mimant un léger sourire.

-Mais, je suis extrêmement malpoli, je ne me suis pas présenté. Je suis le capitaine Jackson.

Je saisis la main qu'il me tendait et étrangement, elle était chaude, presque douce.

-Je m'appelle Gabin.

-Enchanté, Gabin.

Ses yeux marrons semblaient me dévorer mais étonnamment, ils étaient captivants et attirants. Je chassai cette idée de mon esprit et il me demanda mon âge. Je priai pour que du haut de mes vingt ans, le petit quatorze fut convainquant aux yeux de ce cher capitaine. 

-Tu sais te battre à l'épée ? continua-t-il.

Je lui expliquai que non, je ne possédais pas cette compétence et que cela me paraissait très regrettable, pour le fils d'un pirate.

-Dans ce cas, je t'apprendrais. Ce n'est pas en un claquement de doigt que nous tuerons ce fils de pute de Osman.

-En effet, déglutis-je, légèrement intimidée par l'homme qui se dressait devant moi.

Il s'excusa et rejoignit une autre table de pirates dans le but de les féliciter pour leur récente trouvaille. Mes yeux, bien trop absorbés par cette silhouette musclée, refusèrent de se détacher de ce brun mystérieux. Je ne pouvais m'empêcher de le percevoir comme un être intriguant et ne cessai de m'interroger sur quel genre d'homme se cachait derrière ce masque de capitaine.

-C'est un grand homme, déclara un homme, chassant tout image de Jackson qui envahissait mon esprit.

-Qui ? demandai-je, faisant mine de ne pas comprendre où il voulait en venir.

-Notre capitaine, j'ai bien vu comment tu l'observais. Je sais ce que tu penses mais crois-moi,  il te seras difficile de parvenir à lui ressembler.

Je souris intérieurement, me rappelant que je n'étais qu'un jeune homme de quatorze ans. Jouer ce rôle m'amusait fortement mais je n'avais guère le droit de faire un faux pas, la chute pourrait s'avérer mortelle.

-Il m'a dit qu'il t'entraînerait demain matin, poursuivit-il en allumant un cigare.

L'idée de me retrouver seule avec cet homme m'intimidait et je craignais de ne pas être à la hauteur. Cleo m'aurait sans doute rappeler de croire en moi car j'étais, à ses yeux, l'élite des voleurs et qu'un capitaine aussi insignifiant que lui ne pouvait se permette de me perturber. Je ressentais son manque, caché au fond de ma poitrine, il ne semblait pas se dissiper.

-Je ne me suis jamais battue à l'épée.

-Le plus important c'est ta volonté, de trouver ton point fort et le point faible de ton adversaire.

Il me donna d'autres conseils qui auraient pu s'avérer précieux et je buvais chacune de ses paroles en tâchant de les assimiler. Mon esprit semblait tellement captivé que j'en oubliai Ali qui s'adonnait à une danse ridicule avec un homme aussi ivre que lui.

-Excusez-moi, dis-je en m'adressant à mon professeur, je pense que mon père a besoin de prendre l'air.

Il cligna plusieurs fois des yeux et j'aidai Ali, qui titubait à en perdre l'équilibre, à descendre d'une table utilisée comme scène de cabaret.

-Oh mon garçon ! s'écria-t-il en me voyant. Enfin, garçon, c'est...

J'écrasai son pied à l'aide du talon de ma botte, sentant chacun de ses minuscules orteils se compresser sous mon poids.

-Suis-moi et ne dis plus un seul mot.

Il s'exécuta et après avoir monté un escalier en bois glissant à cause de l'humidité, nous atteignîmes le pont du bateau.

-Qu'est-ce qui te prend de boire autant ? Qui c'est ce que tu pourrais dire sous l'emprise de l'alcool ? Je ne tiens pas à regagner la prochaine île déserte en sautant à la planche, grognai-je.

Mon sang bouillonnait en moi et je ne parvenais pas à calmer mon envie d'écraser mon poing sur le visage du petit homme. Sa stupidité m'effrayait et je commençai à douter de la réussite de notre dessein. Si la moindre goutte d'alcool était capable de nous faire échouer, notre avenir devenait incertain et la vigilance devait être notre préoccupation première.

-Je peux y retourner ? demanda-t-il, un sourire idiot affiché sur ses lèvres.

Je soupirai, exaspérée et lui demandai poliment de ne plus laisser un seul mot s'échapper de sa bouche si il ne souhaitait pas nager avec les poissons.

Le calme retomba et je me concentrai sur les bruit des vagues qui venaient s'écraser sur la coque du bateau. La nuit me paraissait durer une éternité et la mer s'agitait, remuant mes entrailles et y invitant de nouveau un mal de ventre.

-Ali, l'appelai-je.

Il ouvrit un œil et j'accrochai mes mains fermement aux rebords du bateau en vidant le contenu de mon estomac dans l'eau salée. Ali se leva et tint mes cheveux en dégageant mon visage, évitant ainsi de me salir davantage.

Des bruits de pas résonnèrent dans l'escalier, je reconnus immédiatement la voix grave et masculine du capitaine. Ali lui expliqua, en maîtrisant sa voix afin de masquer son ivresse, que j'étais atteinte du mal de mer. Je me sentis honteuse et détournai le regard vers le large. Je sentis deux mains puissantes se déposer sur mes épaules frêles et Jackson m'expliqua que ce problème s'estomperaient au fil du temps, que ce n'était que passager.

Je le remerciai avec un faible sourire, manquant d'éclat et il rejoignit le reste de l'équipage. 

-Tu joues à un jeu dangereux, lâcha Ali.

-Pardon ?

-Evite de fantasmer sur le séduisant capitaine Enzo Jackson comme une petite fille naïve.

-Tu ne vas pas commencer à jouer les pères protecteurs, dis-je avec un petit rire. 

Il m'imita mais mes yeux ne quittèrent pas le fascinant capitaine.

***

Je reviens après un long moment d'absence, je m'en excuse. J'avais quelques chapitres prêts mais je préférai en écrire d'autres avant de poster.

 damon-yack 

La princesse des voleursOù les histoires vivent. Découvrez maintenant