quotidien - 1

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Mélanie rabat sa veste près de son corps en réprimant un frisson, le vent était glacial ce soir. Elle marchait à pas rapide l'esprit fixé sur ses cours de la journée. Enfin le restaurant en vue, elle se précipitait presque vers la porte. Une fois celle-ci ouverte, une vague de chaleur la percuta, lui faisant lâcher un sourire de bien-être.

— Salut Jo, comment tu vas ?

— Bien ma puce et toi ? Répondit l'homme d'une cinquantaine d'année.

— Ca va maintenant que je suis au chaud.

— Je te comprends, ce temps fait fuir tous les clients, on dirait.

Mélanie sourit à sa phrase, elle adorait ce bar/restaurant nommé Jeaz's en référence à chaque début de prénom des personnes qui faisaient le bonheur de Jo : Emma sa femme, Antoine son fils, et Zoé sa fille. Mélanie y travaillait depuis désormais deux ans, et Jo trouvait qu'il n'y avait jamais assez de clients bien que le Jeaz's soit toujours complet.

— Allez file ! va te changer et au boulot.

Mélanie acquiesça de la tête toujours avec le sourire aux lèvres, puis elle se dirigea vers l'arrière du Jeaz's. Elle déposa ses affaires, enfila le chemisier du restaurant/bar, un tablier noir à la taille, et un chignon fait à la va-vite. Elle se positionna derrière le bar.

    La soirée passa tranquillement, beaucoup d'habitués étaient présents ce soir. À un instant Mél pensa à quel point elle était heureuse des soirées comme celle-ci : le rire des personnes dans la salle, les paroles un peu éméchées des personnes adossées contre le billard. Elle adorait cette ambiance.

A deux heures du matin, Mélanie défit son chignon, se secoua légèrement les cheveux, et souffla un grand coup. Elle aimait certes cette ambiance, mais elle était épuisée, elle n'avait pas eu une pause pour elle et désormais, la fatigue s'abattait sur elle lui arrachant un profond bâillement.

— Allez rentre, tu as fait suffisamment ce soir.

— Tu ne veux pas que je t'aide à faire un dernier coup de ménage ? Je ne suis pas à quelques minutes près.

— Ne t'en fais pas, je gère, allez oust! Tu commences à huit heures en plus demain si je ne me trompe pas ?

— Oui, souffla Mélanie déjà épuisée à l'idée du son de son réveil à sept heure.

— Allez, file tu veux que Eric te dépose ? Demanda son patron Jo.

— Non, ça va aller, je n'ai pas loin.

— Très bien, et dépêche toi tu vas finir par louper le dernier tramway.

Mélanie lui rendit son sourire et se dirigea vers la porte, avant de l'ouvrir elle se tourna une dernière fois pour saluer tout le monde. Elle vit Eric secouer son téléphone dans la main en la regardant avec insistance.

— Oui, je t'envoie un message quand je suis rentrée, je sais.

— Je préfère vérifier, ta mémoire disjoncte pas mal.

Mélanie lâcha un petit rire, il est vrai qu'en ce moment elle était tellement concentrée sur ses cours que bien des choses lui sortaient de la tête. Enfin elle sortit du Jeaz's, une bourrasque de vent la frappa aussitôt, la faisant frissonner de plus belle. Elle habitait dans un petit appartement à une dizaine de minutes en tramway d'ici. Au loin, elle vit la lumière de celui-ci arriver à son arrêt. Mélanie jura puis elle se mit à courir dans la rue. Cependant lorsqu'elle atteignit l'arrêt, le tramway démarra.

— C'est pas vrai ! Jura Mélanie à voix haute.

Elle leva les yeux vers l'arrêt et surtout vers le panneau d'affichage : à sa plus grande désolation la phrase "service terminé, reprise à 5h35" s'afficha. Elle souffla encore une fois, puis elle ferma son blouson en cuir, ajusta son écharpe et elle marcha vers son domicile dans la nuit noire. Elle n'était pas une grande trouillarde, mais marcher dans la nuit à cette heure-çi n'était pas la chose la plus rassurante du monde, elle pressa alors le pas. Des pensées irrationnelles se mirent à se bousculer dans sa tête, et à nouveau la même sensation lui parcourut les veines. Cette sensation qu'elle ressentait depuis son enfance, et qui l'avait amené à se séparer de toutes les personnes qu'elle aimait. Une angoisse l'a pris et elle se mit à courir, il fallait qu'elle atteigne son domicile. Elle savait que tous cela étaient irrationnels et que ce n'était que son imagination qui lui jouait des tours comme l'avait précisé tous ses médecins et psychologues, mais elle ne pouvait s'en empêcher.

La reconquête d'EphithéliaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant