Chapitre 21

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Je suis amoureuse d'Adrien Agreste.

Le soleil se lève sur ce mercredi maussade. Je ne peux m'empêcher de penser que le temps dehors est à l'image de mon humeur. Mon téléphone, dont l'alarme résonne dans le studio et réduit mes tympans à néant, manque de subir l'affront de mon poing. Ma tête me fait horriblement souffrir, mes joues sont irritées à force d'accueillir mes larmes. Tikki, épuisée de me consoler durant ces trois derniers jours, peine à ouvrir les yeux. Les jours de congé pris à l'improviste n'ont pas manqué d'intriguer mes collègues. J'avais fini par me faire à l'idée de me terrer dans ce studio durant les quatre prochaines années mais il me faut de quoi me nourrir et payer mon loyer.

- « Marinette? » Baille Tikki alors que mes yeux s'emplissent de larmes.

Je ne parviens plus à réfléchir, à chasser de ma tête tous les espoirs que j'avais placés en Adrien. Il n'a pas revu Ladybug non plus, je ne me sentais pas le courage d'affronter son regard après avoir subi son refus. Je ne lui en veux pas de ne pas me reconnaître à travers le masque de coccinelle, mais je ne me sens pas capable de continuer à faire semblant.

- « Tout va bien Tikki », je réponds la gorge serrée. « Je vais me lever et aller à l'atelier. »

L'ordinateur placé à mes pieds et les ultimes réserves de nouilles en boite témoigne de la bulle dans laquelle je me suis enfermée. Je n'ai aucune envie de quitter cet endroit. A quoi bon? Si j'ai rejoint les Agreste, c'est notamment parce qu'il y a Adrien. Ce n'est pas faute de l'avoir répété à Yan, les quelques fois où il est parvenu à me garder éveillée au téléphone. Il a été le premier à m'appeler samedi soir, quand j'étais réduite à l'état de larve. Je penserai à le remercier plus tard, quand je serai d'attaque.

Le plus lentement du monde, je me glisse en dehors du lit, frissonnant au manque de chaleur et m'empresse de prendre ma douche. Les gouttes d'eau bouillante s'abattent sur mon corps. Je me laisse aller une nouvelle fois, adossée au mur froid, rassurée que personne ne puisse me voir dans cet état. Je maudis la vie d'avoir créé ce qu'on appelle des sentiments, je me maudis de ne pas être capable de les contrôler. Consciente que je ne pourrai pas me cacher ici éternellement, je ressors de la douche et m'essuie, prenant soin au passage de frotter mon visage jusqu'à ce qu'aucune larme ne subsiste. J'enfile une tenue simple, mais correcte: un chemisier et un jean taille haute. Mes cheveux tiendront seulement en queue de cheval et un peu de mascara suffira à embellir mon regard. De toute façon, je n'ai pas envie qu'on me regarde. Je souhaite simplement qu'on m'oublie l'espace d'une semaine. Cela ne devrait pas être bien compliqué.

Quand je reviens près de mon lit, Tikki a troqué le coussin sur lequel elle somnolait pour ma bourse bleue. J'y glisse des petits bouts de cookies pour la remettre d'aplomb. Une seule tête de déterrée suffit et autant que ce soit la mienne.

Le trajet se déroule sans encombre, personne ne m'embête, sûrement ont-ils peur de mon teint que je devine fade et sans grand intérêt. Je me cache des passants à l'aide de mon téléphone portable, tapotant des mots dans le bloc-notes que j'efface aussi vite. Alya m'a beaucoup écrit, prévenue par Adrien qui s'inquiétait de mon état. Je pousse un long soupir. S'il s'inquiétait autant, pourquoi ne m'a-t-il pas rendu visite? Non, bien sûr, ça aurait empiré les choses.

J'arrive à l'heure au travail. Mes prièrent sont exaucées car Monica n'est pas à l'accueil, je gravis les escaliers jusqu'au deuxième étage, regrettant amèrement de ne pas avoir emprunté l'ascenseur cette fois. La voie est libre jusqu'à l'atelier, j'entre et m'enferme à l'intérieur. Tikki s'échappe de mon sac et s'envole en direction de mon bureau où un mystérieux paquet m'attend.

- « Ca sent gravement bon! » S'exclame-t-elle, les pattes accrochées au dit paquet.

L'odeur de croissants chauds remplit mes narines. Il n'y a pas de mot, mais ça a bel et bien été déposé ici pour moi. Je remarque que le sachet est orné du logo "TS" entouré de deux épis de blé formant un cercle. Il s'agit du motif de la boulangerie Dupain-Cheng, celles de mes parents. Pour la première fois en trois jours, je me surprends à sourire de bon cœur. Quelle délicate attention, mais...Qui devrais-je remercier?

Cécité [TOME 1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant