Tome II - 06.

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[La vengeance est un plat qui se mange froid] et que je cuisine à la perfection. #6

Le lendemain, aux aurores Ghali se leva en sursaut sans raisons particulières. Il se toucha le corps de la tête aux pieds et fut d'autant plus étonné lorsqu'il se rendit compte qu'il ne se sentait pas comme d'habitude.. Il ne sentait plus son corps. Mettant cette sensation sur le coup de la fatigue, il tenta de se rendormir, ce qu'il fit assez rapidement. Quelques heures plus tard lorsqu'il se réveilla il était encore plus déboussolé.. Ghali avait chaud et n'avait pas reconnu sa chambre tout de suite, là-dessus il voulait encore avoir une explication : il était dans les gaz du sommeil.. Encore fatigué, il se rendormi, et ce même scénario se répéta toute la journée, il ne passait pas plus d'un quart d'heure éveillé.

Lui qui ne s'inquiétait pas au départ aurait dû car une semaine plus tard, Bressom était méconnaissable. Des cernes violettes contournaient ses yeux explosés rouges vifs, son teint était devenu blanchâtre.. Tout ça lui donnait bien une dizaine d'années de plus, on aurait dit un cancéreux en dernière phase. Même bousillé sous alcool et nicotine au plus haut point, jamais il n'avait eu cette dégaine de macchabé, Ghali donnait l'impression d'avoir la mort au bout du nez. Une semaine qu'il se sentait étrange, c'était comme s'il n'avait plus la force de rien mis à part dormir. Comme si quelqu'un d'autre vivait dans son corps avec lui et qu'il lui pompait le peu de vie qu'il lui restait.. C'était impressionnant.

Le jeudi qui suivait, il se leva en sueur, frissonnant comme s'il faisait cinq degrés alors que c'était l'été. À bout de force sans rien faire et sans comprendre ce qu'il lui arrivait, le jeune Kabdi commençait à s'inquiéter. Il réalisait enfin qu'il n'était pas bien, que ça n'était pas son état normal.. Il sorti de son lit en grimaçant et alla se doucher, il s'habilla tout en noir et pris soin de bien se couvrir. Mal en point, il prit la boîte en féraille sous son lit avant de partir et se dirigea jusqu'au bâtiment D, capuche sur la tête. Bien que ce soit la tour en face, son piteux état lui donnait l'impression d'avoir fait le tour du monde.. Il monta les six étages sans broncher et tapa à la porte numéro treize encore essoufflé.

Lentement, il retira sa capuche et la porte s'ouvra au même moment. Un sourire se figea sur le visage malade de Ghali, la Toubib était en sous-vêtements. Il se demandait pourquoi elle se baladait toujours en petite tenue chez elle, quand bien même il appréciait la vue.

- Entre, dit-elle en le laissant passer.

Sahra s'engouffra dans une pièce et en ressorti habillée tout en noir.

- C'est censé être toi le médecin tu le sais ça ? lâcha-t-elle en se dirigeant vers une autre pièce.
- Mais je vais bien, je voulais juste te parler d'un truc, répondit Ghali.

Au son de sa voix, Sahra se retourna immédiatement. Elle le regarda dans les yeux un moment avant de bredouiller du latin à une vitesse affolante. Rapidement elle le fit s'installer sur un fauteuil noir, situé dans une pièce où tout était de couleurs sombres. Les murs étaient abîmés, comme griffés et la tapisserie avait noircie. La seule lumière présente était défaillante, rien à voir avec la pièce où il avait été l'autre fois.

- T'es comme ça depuis quand ?
- Une semaine je crois, j'ai dû choper une grippe, répondit Ghali.
- C'est quelqu'un qui te rend malade, ça se guérit pas comme tu le penses.
- Je te fais confiance c'est toi la Toubib.

Pour réponse la blonde platine se mit à sourire, elle se plaça derrière lui et mis sa main sur le front de Ghali en répétant des invocations latines. Il avait un espèce d'esprit qui s'accrochait à lui, dans le but d'entrer dans son corps. Elle l'avait entendu à la voix de Bressom, elle n'avait plus le même de timbre. Sahra était sûre d'elle, il avait tous les symptômes.

- Qui t'as envoyé ? demanda Sahra calmement.

Elle n'eut aucune réponse. Elle se répéta plusieurs fois, en vain.

- C'est une femme ?
- Oui, répondit la chose.
- Qui ? redemanda Sahra.
- Une femme.
- Pourquoi faire ?
- Monsieur doit être amoureux d'elle. Il ne doit plus se passer d'elle. Il doit être fou amoureux.
- Tu es un filtre d'amour ?
- Oui.
- Quitte ce corps, cria Sahra.
- Il doit être amoureux !

Après ça, plus rien, Sahra parlait sans avoir de réponse. Pour l'instant la chose était inoffensive, mais vu l'état de Ghali ça n'allait pas durer.  Après avoir marmonné en latin elle secoua le malade et lui demanda quelle femme il avait fréquenté ces derniers temps.

- Molly. J'ai couché avec Molly la semaine dernière. C'est la seule du mois.
- Ouvre la bouche, dit Sahra.

Elle sorti une mini lampe torche de sa toge noire avant de de regarder dans la bouche de Ghali. Bingo, se dit-elle. Il souffrait, elle le voyait à son visage, pourtant il ne se plaignait pas.

- Garde-là bien ouverte j'vais t'enlever cette merde.

La Toubib Noire utilisa l'ongle de son petit doigt afin de retirer l'espèce d'étiquette collée sur le palais de Bressom. C'était plus compliqué que prévu, Ghali hurlait de douleur dès qu'elle tentait de le décoller. Une fois fait, elle sorti son briquet et le fit brûler dans sa main. Elle ne craignait pas le feu.

- Qu'est-ce j'avais ? demanda Bressom les yeux fermés.
- Ton « amie », Molly, t'as foutu un filtre d'amour. Ça se boit pas forcément, elle te l'a flanqué dans la bouche. Sûrement quand elle t'embrassait.

Sahra s'approcha de Ghali et lui toucha le front afin de sentir s'il avait toujours la fièvre ou non. Il en avait encore, mais depuis tout à l'heure elle avait bien diminué.

- J'ai mal au crâne, souffla-t-il.
- Tu t'étais pas plains jusque là, répliqua Sahra.
- Parce que c'est insupportable maintenant.
- Première porte à droite quand tu sors d'ici. Barre toi quand tu te sens mieux, dit-elle en quittant la pièce.

C'était plus qu'avoir mal au crâne, on aurait dit que ses neurones se battaient dans sa tête tellement ça lui tapait et résonnait. Sans surprise l'endroit décrit était la chambre de la Toubib, il ne prit même pas la peine de défaire les draps. Il s'allongea et s'endormi sur le lit tel qu'il était.. Ghali était trop fatigué pour s'embêter avec ça.

De son côté, Sahra s'alluma une cigarette et fit son activité préférée placée bien avant la sorcellerie : jouer du piano. Plus les notes retentissaient dans l'appartement mieux elle se sentait, c'était un vrai plaisir pour elle, comme si c'était la seule chose qui la sortait de son monde vers un autre..

Elle se demandait pourquoi elle aidait autant Ghali, ça n'était pas qu'une simple histoire d'argent.

« Toi et moi c'est la même. »  🥀

Où est passée Dolly ?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant