Partie 11

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Rebecca

   Je me réveillai seule dans mon lit. Je pris une longue douche et m'arrêtai devant le miroir. Me demandant ce que je fais et ce que j'avais fait. Et surtout pourquoi je l'avais fait.
   Je m'habillai pour mon jogging du dimanche. Je fis comme d'habitude le tour de quelques pâtées de maisons avant de décider sur un coup de tête d'aller jusqu'à la résidence des N'gamon. L'agent de sécurité me reconnut et me salua chaleureusement. J'aperçus la voiture grise métallisée de Junior au loin à travers la grille. Junior dormait toujours à tous les coups. Je fis demi-tour sous le regard interrogateur de l'agent.
   Il était temps pour moi d'appeler Cynzura, ma seule et meilleure amie. On s'était rencontrée au lycée elle et moi. Et nous étions tout de suite devenues inséparables. Elle était issue d'une famille aisée alors quand ses parents ont appris ma décision de laisser tomber les études faute de moyen, ils m'ont payé l'université et tout le reste. Quand j'ai été embauché à N'gamon Assurance, Cynzura a été la première à qui je l'ai annoncée. Ses parents ont organisé un petit dîner pour me féliciter. Je leur devais tout.
- Becky ! s'exclama-t-elle en décrochant.
- Oui chérie ! m'exclamai-je à mon tour. Ça fait super longtemps !
- Toi même tu sais, nos boulots respectifs ne nous permettent pas de nous voir, répondit-elle avec une once de mélancolie dans la voix.
- Ça te dirait qu'on déjeune ensemble demain ? lui proposai-je.
- Attends je vérifie mon emploi du temps, fit-elle. C'est bon j'ai un créneau d'une heure demain à partir de 13h.
    Je souris.
- J'ai hâte de te revoir ma chérie, répondis-je. On se voit à notre endroit habituel.
    On avait l'habitude de manger dans un petit restaurant pas loin de notre appartement. La nourriture était vraiment bonne et la vieille dame qui gérait le restaurant était notre amie. Mais avec nos emplois du temps chargés, nous ne nous voyions plus beaucoup. Elle était devenue journaliste au 15Min, le quotidien national.
    Nous échangeâmes quelques banalités puis je raccrochai.
    Je passai le reste de la journée devant la télé, attendant que Junior revienne ou fasse signe mais surtout, appréhendant la réaction de son père au bureau.

Le lendemain

    Je me présentai naturellement au bureau, dans une robe moulante blanche et des talons, ce qui ne me ressemblait absolument pas. Tout le monde au bureau se retournait à mon passage. Je saluai gaiement Olivia qui me regarda avec les yeux ronds qu'elle réservait aux visiteurs mal habillés. Je la dépassai sans me retourner et allai dans mon bureau. Une demi-heure plus tard mon téléphone de bureau sonna.
- Dans mon bureau tout de suite ! ordonna la voix du patron.
   Il raccrocha. Même si je m'y étais préparée, mon rythme cardiaque s'emballa. Je sortis de mon bureau et me dirigeai vers le sien avec une certaine assurance. Je connaissais la conversation qui allait suivre, j'avais eu toute la journée de la veille pour me la répéter. Je pris une profonde inspiration pour laisser Becky la dure prendre le dessus puis poussai la porte du bureau.
   Il était assis derrière son bureau avec son calme légendaire.
- Bonjour monsieur, le saluai-je poliment.
- Bonjour Rebecca, répondit-il. Assieds-toi !
   Je m'assis sans broncher, attendant qu'il me dise ce pourquoi il m'avait appelé.
- Tu sais très bien pourquoi je t'ai appelée n'est-ce-pas ? me demanda-t-il.
- Je sais bien. Je sais que vous avez l'impression que je vous ai désobéi mais en vrai j'ai fait de mon mieux pour éloigner votre fils de moi. Je lui ai même demandé de rester le plus loin possible de moi puisqu'il ne semblait pas comprendre ma froideur. Mais au final, que pouvais-je contre tant d'entêtement ?
- Pour je ne sais quelle raison, tu n'as pas pris ma mise en garde au sérieux. Mais pour te montrer à quel point je suis sérieux, je te vire. Et si tu tentes quoi que ce soit contre moi ou ma famille, je te le ferai payer très cher
- Quoi ? ! m'exclamai-je, feignant la surprise. Non vous ne pouvez pas faire ça monsieur. J'ai vraiment besoin de ce boulot.
- Il fallait y penser avant de flirter avec mon fils. Je veux ta lettre de démission sur mon bureau avant midi.
- Je...
   Il leva une main pour m'interrompre et me montra la porte. Je m'y attendais un peu mais je me disais qu'il serait indulgent si je m'excusais.
   Je me levai et sortis du bureau, la démarche traînante. Je retournai dans mon bureau et me posai devant mon ordinateur pour rédiger ma lettre de démission. Je choisis un modèle sur Google et j'y ajoutai les informations qu'il fallait. Pourquoi se donner de la peine quand on se fait virer ?
   Quand j'eus fini, je pris mon téléphone pour appeler Junior mais son numéro était hors service. Il avait dû payer les frais de ma désobéissance lui aussi, me dis-je. Je sortis de ce qui allait devenir mon ancien bureau, la lettre de démission à la main. Je frappai à la porte de M. N'gamon et entrai dans la pièce.
   Il était toujours assis à son bureau. J'avançai au milieu de la pièce et déchirai la lettre. Il me jeta un regard noir qui me glaça le sang.
- J'ai bien réfléchi et j'ai décidé de rester, lançai-je sans m'approcher du bureau.
- Dans quelle partie de « Je te vire » t'ai-je fait comprendre que tu as ton mot à dire ? Dis le moi pour que je me rectifie immédiatement.
- Vous connaissez Cynzura Maku ?
   Il s'adossa à sa chaise.
- La journaliste du 15Min ?
- Exactement ! Eh bien, il se trouve qu'elle est comme une sœur pour moi et qu'on déjeune ensemble tout à l'heure. J'aurai une petite histoire à lui raconter avec deux ou trois photos à l'appui. Ça devrait vous faire un peu de pub pour votre campagne à la mairie.
   Il se redressa et riva les yeux sur moi.
- Serait-ce du chantage que tu me fais ? me demanda-t-il d'une voix grave.

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